En tout juste un an de pouvoir en Allemagne, Olaf Scholz a résisté au choc de la guerre en Ukraine qui a bouleversé la première économie européenne. Mais sa popularité décline et il peine à s’imposer au plan international.
Le chancelier social-démocrate a été élu par les députés allemands le 8 décembre 2021, fermant ainsi les 16 ans de l’ère Angela Merkel.
Le bilan dans l’opinion nationale douze mois plus tard sonne comme une sanction. Au total, 64 % des Allemands se disent insatisfaits du gouvernement de coalition qu’il conduit avec les écologistes et les Libéraux (contre 36 % il y a un an), 58 % sont mécontents d’Olaf Scholz (contre 22 %), selon un sondage Insa publié dimanche dans le quotidien Bild.
En cas d’élections aujourd’hui, la coalition serait loin d’obtenir une majorité. Néanmoins, « compte tenu des événements dramatiques survenus cette année, il s’en sort très bien », estime Nils Diederich, professeur à l’université libre de Berlin.
À peine arrivé en fonction, son programme gouvernemental qui prônait rigueur budgétaire et politique climatique ambitieuse a été chamboulé par l’invasion russe et ses conséquences : arrivée des réfugiés, pénurie d’énergie, inflation.
Son discours au Bundestag, le 27 février, trois jours après le début de l’offensive de Poutine, dans lequel il annonçait une nette augmentation des dépenses militaires allemandes, a fait entrer le pays dans une nouvelle ère.
Un tournant
En outre, « le gouvernement de Scholz est formé de trois partis aux objectifs très différents. Cela ne lui facilite pas la tâche », constate Ursula Münch, directrice de l’Académie pour l’éducation politique à Tutzing.
« Gouverner est devenu d’autant plus difficile que le système politique est davantage fragmenté que sous la chrétienne-démocrate Angela Merkel », relève Mme Münch.
Malgré tout, le gouvernement Scholz est parvenu à mettre en œuvre certains points du programme qu’il s’était fixé, telle que la hausse du salaire minimum horaire à 12 euros, contre 9,6 euros auparavant, et la réforme de l’indemnisation-chômage. Deux thèmes chers aux sociaux-démocrates.
Deux autres dossiers, la légalisation du cannabis et la modernisation du droit de la citoyenneté allemande, sont actuellement sur le métier. En revanche, la politique climatique, grand objectif des Verts, est pour l’instant mise en veilleuse.
Dans un contexte de pénurie d’énergie orchestrée par la Russie après l’invasion de l’Ukraine, Scholz a tordu le bras aux écologistes, viscéralement opposés à l’atome, en prolongeant le fonctionnement des trois dernières centrales nucléaires allemandes.
Et si le retour à la rigueur budgétaire défendue par l’autre partenaire de la coalition, le FDP, est prévu l’an prochain, c’est en réalité grâce à un numéro d’équilibriste, avec la multiplication de fonds spéciaux, non comptabilisés dans le budget officiel.
« Pas l’Obama de l’Allemagne »
Sur la scène internationale, l’ancien ministre des Finances de Merkel prend encore ses marques. « C’est difficile de succéder à un leader qui a été en place pendant 16 ans », relève Rachel Rizzo, experte du centre européen du think tank américain the Atlantic Council.
En outre, Scholz a fait campagne aux élections en s’inscrivant dans la lignée de la chancelière. « Il ne voulait pas paraître comme un candidat de la transformation, ce n’était pas l’Obama de l’Allemagne », constate Mme Rizzo. À l’échelle européenne, « on a du mal à le saisir politiquement », juge Éric Maurice du bureau de Bruxelles de la fondation Robert-Schuman.
Fin août, Scholz avait plaidé pour un élargissement de l’UE et la fin du droit de veto qui rime avec paralysie des institutions, lors d’un discours à Prague, sorte de réponse à celui d’Emmanuel Macron tenu cinq ans plus tôt à la Sorbonne. Mais selon Éric Maurice, « on n’y voit pas une vision englobante sur l’avenir de l’Europe ».
En outre, le plan national de 200 milliards d’euros d’aides face à la hausse des prix de l’énergie présenté par Olaf Scholz fin septembre, est mal passé auprès de nombre de pays de l’Union, qui n’ont pas les mêmes moyens que l’Allemagne et craignent une distorsion de la concurrence.
Les désaccords entre Paris et Berlin ont également récemment été étalés au grand jour, le président français Emmanuel Macron envoyant cette pique au chancelier: « ce n’est pas bon, ni pour l’Allemagne, ni pour l’Europe qu’elle s’isole ».