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Au Soudan, cessez-le-feu de 72 heures entre les belligérants


Lundi soir, près de 200 personnes, originaires de plus de 20 pays, ont débarqué dans la ville côtière de Djeddah après un voyage périlleux et épuisant pour se mettre à l'abri. Photo : AFP

Un cessez-le-feu de 72 heures conclu au Soudan entre les belligérants sous l’égide des États-Unis est officiellement entré en vigueur mardi, après 10 jours de combats qui ont fait plusieurs centaines de morts et provoqué un exode massif.

L’armée et les paramilitaires ont confirmé le cessez-le-feu, mais on ignore encore si les combats ont cessé dans la capitale Khartoum. Depuis plusieurs jours, les belligérants avaient déjà annoncé accepter des pauses, avant de s’accuser l’un l’autre d’avoir brisé la trêve.

« Après d’intenses négociations ces dernières 48 heures, l’armée soudanaise et les Forces de soutien rapide (FSR) ont accepté de mettre en œuvre un cessez-le-feu dans tout le pays », a affirmé dans un communiqué le secrétaire d’État américain Antony Blinken peu avant l’entrée en vigueur de la trêve à minuit.

Dans une déclaration sur Facebook, les Forces armées soudanaises, menées par le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du Soudan, ont indiqué qu’elles respecteraient le cessez-le-feu à condition que leurs rivaux fassent de même.

Les paramilitaires des FSR, dirigés par son adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo, ont également annoncé une « trêve dédiée à l’ouverture de couloirs humanitaires et pour faciliter les déplacements des civils ».

Khaled Omar Youssef, le porte-parole des Forces de la liberté et du changement(FLC), le bloc civil historique du Soudan, a déclaré se féliciter « d’une médiation américaine, pour la mise en place de cette trêve humanitaire ».

« Elle donnera lieu à un dialogue sur les modalités d’un cessez-le-feu définitif », précise-t-il, alors que le secrétaire d’État américain indique travailler avec les alliés et les partenaires des États-Unis en vue de la mise en place d’une « commission » chargée de négocier une cessation permanente des hostilités au Soudan.

« Durant cette période, les États-Unis s’attendent à ce que l’armée et les FSR respectent pleinement et immédiatement ce cessez-le-feu », a prévenu Blinken.

« Précipice »

Explosions, raids aériens et tirs n’ont pas cessé depuis le 15 avril à Khartoum, poussant à l’exode des milliers d’habitants de la capitale plongée dans le chaos. Ceux qui ne peuvent s’enfuir tentent de survivre, privés d’eau et d’électricité, soumis aux pénuries de nourriture et aux coupures d’internet et de téléphone.

Les combats ont déjà fait plus de 427 morts et 3 700 blessés, selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires.

Les violences dans ce pays de l’est de l’Afrique risquent d' »envahir toute la région et au-delà », a mis en garde le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

L’ONU avait réclamé plus tôt lundi l’arrêt des combats pour « éloigner le Soudan du précipice ». Le Conseil de sécurité doit se réunir mardi soir au sujet du conflit.

Malgré le départ de nombreux diplomates et citoyens étrangers, Volker Perthes, le chef de la mission de l’ONU qui tente depuis quatre ans d’obtenir des militaires au pouvoir une transition vers la démocratie, a annoncé qu’il resterait au Soudan.

Les capitales étrangères sont parvenues à négocier des passages avec les deux belligérants.

« Un premier groupe » de Chinois, plusieurs dizaines de Sud-Africains et des centaines de ressortissants de pays arabes ont pu partir lundi par la route, la mer ou les airs. Plus de 1.000 ressortissants de l’UE ont eux aussi été évacués.

Tokyo a annoncé mardi avoir évacué « tous les Japonais qui se trouvaient à Khartoum » et qui désiraient en partir et avoir fermé temporairement son ambassade.

Environ 700 employés internationaux de l’ONU, d’ONG et d’ambassades « ont été évacués vers Port-Soudan », a indiqué l’ONU. Des dizaines d’autres employés humanitaires ont été évacués vers le Tchad depuis le Darfour, dans l’ouest, la région la plus touchée par les combats avec Khartoum.

La plupart des étrangers évacués sont des membres du personnel diplomatique, comme ceux des États-Unis et du Royaume-Uni. De nombreux ressortissants attendent toujours une place dans les longs convois de voitures blanches ou les bus qui partent en continu de Khartoum.

« Long voyage »

« Alors que les étrangers qui le peuvent s’enfuient, l’impact des violences sur une situation humanitaire déjà critique s’aggrave », prévient l’ONU, dont les agences ont suspendu leurs activités.

Cinq humanitaires ont été tués et, selon le syndicat des médecins, près des trois quarts des hôpitaux sont hors service.

Les deux camps s’accusent d’avoir attaqué des prisons pour faire sortir des centaines de détenus et de piller maisons et usines. Des affrontements ont éclaté aux abords de plusieurs banques.

Dans un pays où l’inflation est déjà à trois chiffres en temps normal, le kilo de riz ou le litre d’essence s’échangent désormais à prix d’or. Or le carburant est la clé pour s’échapper vers l’Égypte ou pour rallier Port-Soudan et espérer monter dans un bateau.

Lundi soir, près de 200 personnes, originaires de plus de 20 pays, ont débarqué dans la ville côtière de Djeddah après un voyage périlleux et épuisant pour se mettre à l’abri.

« Nous avons fait un long voyage de Khartoum à Port-Soudan. Ça nous a pris environ 10 ou 11 heures » puis « encore 20 heures sur ce bateau pour aller de Port-Soudan à Djeddah », a déclaré un ressortissant libanais, Suhaib Aicha, sa petite fille sanglotant dans ses bras.

Des Soudanais ont déjà fui en Égypte et au Soudan du Sud et au Tchad, frontalier du Darfour.

La guerre couvait depuis des semaines entre les deux généraux rivaux, qui s’étaient alliés pour évincer les civils du pouvoir lors du putsch de 2021, mettant fin à la transition démocratique.

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