En soi, le constat dressé par Gilles Roth, le coprésident de fraction du CSV, est implacable. Le Luxembourg sortira de cette législature avec une dette publique, une charge fiscale, un taux de pauvreté et des inégalités sociales plus élevés que jamais. Le gouvernement sortant a-t-il pour autant échoué sur toute la ligne?
Du moins, en ce qui concerne les finances publiques, la coalition tricolore bénéficie de circonstances atténuantes. Quelque 7 milliards d’euros ont été débloqués depuis 2020 pour atténuer les conséquences de la crise du covid et de la guerre d’agression que mène la Russie contre l’Ukraine. Les résultats sont là : l’économie ne s’est pas effondrée, le chômage n’a pas explosé et le pouvoir d’achat a globalement pu être sauvegardé.
On pourrait affirmer que le pire a été évité. Le point noir demeure les failles sociales qui ne cessent de s’accentuer. Une partie de la faute incombe aussi aux majorités précédentes. Frôlant, en 2006, les 15 %, le risque de pauvreté était déjà trop important pour un Grand-Duché ayant connu cette année-là une croissance économique de 6 %.
«Pourquoi ce pays prospère ne parvient-il toujours pas à réduire significativement les inégalités sociales et la précarité», s’interroge à juste titre Nora Back, la présidente de la Chambre des salariés. Les fractures sont telles que sans l’intervention de l’État, le taux de risque de pauvreté pour 2021 ne serait pas de 18,1 %, mais bien de 42,9 %. Malgré tout, les monoparentaux et les familles nombreuses sont menacés à plus de 40 % de tomber dans la pauvreté.
Pour sortir de cette situation explosive, le prochain gouvernement sera obligé de prendre des décisions courageuses. Un système d’imposition plus équitable, taxant davantage les plus riches, et une mise en œuvre accélérée des mesures de lutte contre la spéculation foncière sont indispensables.
Se taper sur l’épaule pour la gestion de crise (DP, LSAP, déi gréng), fustiger les déséquilibres (CSV), dénoncer un diktat gouvernemental (ADR), critiquer la politique de l’arrosoir (déi Lénk) et d’autres manquements du gouvernement (Parti pirate) ne sera plus suffisant. Des solutions concrètes doivent être mises sur la table, parce qu’on ne veut plus continuer à entendre la même chanson, celle d’un pays sans failles majeures.