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Markobi manie les cartes et brise les codes


La pratique intensive de la prestidigitation, nourrie des interactions avec un public sans cesse renouvelé, a forgé peu à peu l'artiste qu'il est devenu. (Photo AFP)

Connu pour ses tours dans les rues et son sens de l’improvisation, le magicien strasbourgeois Markobi détonne dans le milieu. Ce qui ne l’a pas empêché de devenir champion du monde!

Il est capable de s’octroyer une pause pour manger des chips en plein spectacle aux championnats du monde, et pourtant, ça ne l’empêche pas de remporter le titre! Avec son audace et son sens de l’improvisation, le magicien français Markobi renouvelle le genre. Peu connu du grand public, Marc Bittar (de son vrai nom), 28 ans, est pourtant une sommité dans son domaine, la magie des cartes. Pour preuve, au FISM 2022, la plus grande compétition internationale de magie, il est monté sur la plus haute marche du podium. «C’est un peu l’équivalent des Jeux olympiques de la magie : c’est organisé une fois tous les trois ans, dans un pays différent… Être arrivé à ce niveau-là, dans mon domaine, c’est un accomplissement», explique ce Strasbourgeois d’origine syro-libanaise.

Depuis la création de la FISM en 1948, c’est seulement la seconde fois qu’un Français remporte le titre dans la catégorie reine, après Jean-Jacques Sanvert en 1979. Pour en arriver là, Marc Bittar a pris des chemins de traverse, apprenant la magie sur le tas, notamment dans la rue, et refusant de s’inscrire dans un club pour «éviter d’être formaté». Ses premiers tours, c’est un cousin qui les lui enseigne alors qu’il a huit ans. Le déclic intervient véritablement dix ans plus tard, en visionnant une démonstration de magie sur internet. Il tente de reproduire le numéro avec des cartes qu’il trouve dans le bureau de ses parents.

« Je faisais de la magie partout et avec tout le monde »

«Au bout d’un mois à m’exercer, je vais à la gare. Je passe toute l’après-midi dehors, j’hésite pendant des heures, et finalement je me lance et je fais mon tour à un inconnu. Bon, c’était médiocre, mais c’est comme ça que ça a commencé», se remémore-t-il. Il recommence le lendemain, puis les jours suivants, jusqu’à s’autoriser, quelques mois plus tard, à entrer dans les bars et les boîtes de nuit, pour ce qu’il appelle ses «nuits magiques». «Je faisais de la magie partout et avec tout le monde, les touristes à l’arrêt de bus, les amoureux cachés derrière une porte. J’ai commencé à aller dans d’autres villes, à Lyon, à Marseille, à l’étranger…»

Ses études en prennent un coup. «Je n’étais pas très investi», admet ce fils de médecins qui a validé sa licence de biologie «grâce à l’anglais», et après avoir redoublé trois semestres. «Je continuais mes tours en séance de TP (NDLR : travaux pratiques), quand le prof avait le dos tourné», sourit-il encore. Mais la pratique intensive de la prestidigitation, nourrie des interactions avec un public sans cesse renouvelé, forge peu à peu l’artiste qu’il devient, jusqu’à en faire son métier. «Un jour, quelqu’un m’a donné cinq euros. Je n’en revenais pas! Je n’avais jamais rien demandé, je n’avais pas une vision marchande de la magie.»

Ma magie s’est toujours développée en allant à l’encontre des stéréotypes

Puis vient le temps des spectacles au chapeau, des prestations lors de galas étudiants ou encore de dîners d’entreprise. Markobi devient professionnel sous statut d’autoentrepreneur et rejoint l’équipe de France. «La première fois qu’il est arrivé, on a tout de suite vu qu’il était très original : il proposait quelque chose qu’on ne voyait pas habituellement en magie. Et en plus, il nous a beaucoup fait rire!», raconte Jean-Jacques Sanvert, désormais entraîneur de l’équipe nationale.

«Il est très fort techniquement, sans en avoir l’air. Et il a réussi à imposer un style personnel, ce qui est particulièrement difficile en magie», complète-t-il, tout en reconnaissant que son élève ne fait pas encore l’unanimité. «Il casse tellement les codes que, dans le milieu, certains n’aiment pas du tout.»

A rebours des attentes du public

Exemple aux championnats du monde qui se sont déroulés à Québec l’été dernier : faussement désinvolte et plein d’autodérision, jouant de son anglais mâtiné d’un fort accent français ou interpellant directement le jury, Markobi a bluffé le public avec ses tours de cartes où une dame de cœur finit toujours par réapparaître comme par enchantement.

L’intéressé revendique ce positionnement à rebours des usages traditionnels ou des attentes du public. «Ma magie s’est toujours développée en allant à l’encontre des stéréotypes. J’aime bien créer des décalages, brouiller les pistes. Et si je peux le faire avec une pointe d’humour, je le fais!»

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