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[Littérature] Sophie Marceau, femme au pluriel 


Sophie Marceau. (photo Francesca Mantovani)

Adolescente, elle faisait la boum. Adulte, elle est devenue une des figures du cinéma francophone, «la femme française, cette énigme captivante, jamais impudique, même jetée en pâture, semblant toujours sereine même sous la tempête», lisait-on récemment dans un hebdomadaire féminin. Elle avait à peine 30 ans quand elle sortait un premier livre, Menteuse (1996). Vingt-sept ans plus tard, elle se glisse à nouveau en librairie avec La Souterraine, livre publié chez Seghers, historique éditeur des lettres françaises.

Deux semaines avant la parution, Sophie Marceau, resplendissante de naturel, a présenté son nouvel ouvrage au salon du Livre à Paris, et la veille, était invitée à la seule véritable émission littéraire de la télé hexagonale, La Grande Librairie. Deux écrivains étaient à ses côtés et ne manquèrent pas d’y aller de leurs compliments. À Jean-Christophe Grangé d’affirmer : «Sophie est une écrivaine. Une vraie !» Et à Régis Jauffret de glisser, à son tour, son enthousiasme à la lecture de cette Souterraine.

De son côté, l’animateur lui posa sa question : «Pourquoi écrivez-vous ?» Réponse de l’intéressée : «Parce que j’en avais besoin.» Et pourquoi, encore, ce titre ? «Parce que c’est ce qui ressemble le plus à l’ambiance du livre : une rivière souterraine. Avec de la fluidité, de l’énergie, et du mystère aussi !» N’empêche, voici un bon livre. Mieux, une délicieuse surprise printanière en treize histoires et sept poèmes. Textes éclatés. Éclats de texte. Histoires courtes. Fables diverses.

Ouverture de la première nouvelle : «Ils louent le rez-de-chaussée d’un pavillon de banlieue avec un garage. Ils ont un numéro de sécurité sociale, un berger allemand et une Renault 16. Il n’y a pas de plans d’avenir. Le revenu mensuel permet juste de vivre au jour le jour. Alimenter le présent et oublier comment hier a survécu. Se projeter jusqu’à la moitié du mois. Quant à la seconde moitié… Il faut improviser, trouver des combines et tenter de ne pas dérailler.» Le quotidien ordinaire des «gens de peu», comme les avait définis le sociologue Pierre Sansot.

J’ai écrit parce que j’en avais besoin

Plus loin, un poème : «Je garde toujours un livre ouvert / À côté de mes rêves / Son encre a bavé sur mon pull / De l’aube figée sur le cadran solaire / Jusqu’au talon plat du crépuscule / Le sang d’Anna a coulé dans mes draps». Le visage et le souvenir de la poétesse russe Anna Akhmatova (1889-1966) flottent dans l’air, nous enveloppent – hommage à cette «femme belle et amoureuse qui porte le deuil au fond des yeux».

Au fil des pages, piscine, Palais-Royal, poussière ou encore couronne de fleurs s’enchaînent. On va passer un moment avec des petites filles : l’une se réfugie dans un imaginaire à grande distance du monde des adultes, et l’autre, mal-aimée, laisse son corps se déformer (une troisième est interdite de se réjouir d’être magnifiquement belle). Avec des femmes jeunes aussi (l’une d’elles grandit soudainement de vingt centimètres). Avec des femmes mûres encore (l’une s’interroge sur la façon de supporter le deuil).

Des femmes, des mères, des amantes, des amoureuses. Des actrices également, comme celle-ci confrontée à ses doubles, à ce personnage féminin qu’elle doit interpréter et qui doit faire rêver… Livre pétillant et élégant, La Souterraine est un ouvrage plein de surprises, de mystère(s) et de sensibilité. Avec des variations autour d’un même thème : la femme. À toutes les pages, «parce que les choses aussi ont des choses à dire», il y a du caractère, de la beauté, même cachée.

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