L’université du Luxembourg va compléter dès septembre ses formations en soins de santé avec de nouveaux bachelors en sciences infirmières spécialisées. Une seconde étape suivra en 2024.
La «Medical School», imaginée début 2014 par le ministre Claude Meisch (DP) après consultation des acteurs du terrain, continue de prendre forme. Si le nom du projet a été abandonné, les offres pour permettre au Grand-Duché de former davantage de personnes dans les soins de santé continuent de se multiplier. Dès la rentrée académique de septembre, «un pas important pour l’écosystème médical luxembourgeois» sera franchi, se félicite le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Il fait référence aux nouveaux bachelors en sciences infirmières spécialisées (lire ci-contre), officiellement présentés hier à l’université du Luxembourg (Uni.lu). Depuis 2020, il est déjà possible d’entamer sur le campus Belval un premier cycle complet d’études en médecine. En 2021 sont venus s’ajouter trois formations dans des spécialités médicales (lire ci-dessous). La troisième étape majeure de «l’académisation des professions de santé» est l’introduction de diplômes universitaires en soins infirmiers.
Une spécialisation en quatre disciplines
ATM DE CHIRURGIE La formation pour devenir assistant technique médical de chirurgie permettra à l’infirmier d’exercer en salle d’opération.
ANESTHÉSIE ET RÉANIMATION La formation permet d’acquérir des compétences avancées pour travailler au sein du service des urgences, aux soins intensifs et en salle de réveil.
PÉDIATRIE La formation permet d’accompagner l’enfant en bonne santé ou malade, dans une approche familiale, aussi bien en milieu hospitalier qu’en milieu communautaire.
PSYCHIATRIE L’infirmier psychiatrique sera capable de promouvoir la santé mentale auprès de personnes ou de groupes, mais aussi de dispenser des soins spécialisés à toute personne vivant avec des maladies psychiques.
Ces bachelors, déclinés sur quatre semestres, sont destinés à des professionnels déjà diplômés en soins infirmiers et qui sont autorisés à exercer comme infirmier en soins généraux au Grand-Duché. Le niveau B2 en français et en allemand est également requis. Un maximum de 15 étudiants peut être admis par année dans chaque programme de formation. Les inscriptions sont ouvertes jusqu’au 17 juillet 2023.
«Un enseignement individualisé»
Les quatre premiers bachelors sont destinés à des professionnels diplômés. Au Luxembourg, il faut ainsi être, au moins, en possession d’un brevet de technicien supérieur (BTS) en soins infirmiers généraux, proposé au Lycée technique pour professions de santé (LTPS). Cette formation initiale ne va pas disparaître, même si, à partir de 2024, l’université va aussi proposer un bachelor infirmier en soins généraux. «Cette nouvelle formation pourrait permettre de toucher une autre cible de jeunes voulant se lancer dans le métier. Ils ne seront en effet plus obligés de faire, après leurs études secondaires, un pas en arrière (NDLR : d’une classe de terminale à une classe de 2e) pour devenir infirmier», indique le ministre Meisch. D’un autre côté, le maintien du BTS peut «permettre à ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas suivre une formation universitaire de devenir infirmier et de faire du très bon travail sur le terrain».
Les bachelors de spécialisation, dispensés à l’Uni.lu, seront dans un premier temps limités à 15 étudiants par discipline. «Nous avons l’opportunité d’offrir un enseignement individualisé en petits groupes, ce qui est vraiment une chance incroyable», souligne Marie Friedel, une des deux directrices des bachelors en sciences infirmières. «Les méthodes pédagogiques seront innovantes, interactives et réflexives. Des simulations permettront à chaque étudiant de s’exercer dans un environnement sécurisé avant de réaliser des actes techniques en stage auprès de vrais patients», ajoute-t-elle.
Formation commune avec les médecins
Un tronc commun de cours sera mis en place sur les fondements des sciences infirmières (par exemple la gestion des risques et les soins palliatifs). L’autre grand avantage est que la formation de l’étudiant infirmier se fera en commun avec d’autres disciplines, comme la médecine ou la psychologie. «La coopération interprofessionnelle est indispensable», insiste Marie Friedel.
Quatre axes de recherche, «sans quoi on ne peut pas enseigner à l’université», vont être déployés pour encadrer les nouvelles formations. «L’éclairage en recherche va bénéficier en particulier à la sécurité du patient», indique Laurence Bernard, la codirectrice des bachelors en sciences infirmières.
Le bachelor complet en médecine, lancé en 2020, affiche un taux de réussite en hausse. Les étudiants sont aussi plus nombreux à poursuivre leur formation au Luxembourg.
Urgence, mardi après-midi, à l’université. Un homme, victime d’une crise cardiaque, se plaint de douleurs et de difficultés respiratoires. Deux étudiants en médecine le prennent en charge. Un massage cardiaque est pratiqué sans tarder. Des médicaments sont administrés. Au bout de quelques minutes, le soulagement. Le patient – qui est en fait un mannequin intelligent – est sauvé.
Ce type de simulation figure régulièrement à l’ordre du jour de la formation des futurs médecins. «Une règle absolue dans l’enseignement médical de nos jours est que les gestes techniques que l’étudiant fait pour la première fois ne se font pas sur un vrai patient», affirme Gilbert Massard, le directeur des études médicales à l’université du Luxembourg.
L’unité de simulation n’est qu’un des atouts du nouveau bachelor en médecine. Cette formation initiale, déclinée sur trois ans d’études, repose sur trois piliers : le savoir, le savoir-faire et le savoir-être. «Après une mise à niveau dans les sciences fondamentales, des matières plus spécifiques comme l’anatomie, l’histologie ou la biologie cellulaire et médicale sont dispensées dès le premier semestre. L’approfondissement des connaissances acquises a lieu lors des deuxième et troisième années. Les étudiants apprennent la sémiologie, l’étude des signes et symptômes, qui est la base du métier de médecin», résume Gilbert Massard.
Trois formations spécialisées
En moyenne, ce sont 135 étudiants par an qui se lancent dans les études de médecine. Entre 2021 et 2022, le taux de réussite des étudiants en première année a augmenté (voir ci-contre). Plus important encore est le fait que le nombre d’étudiants qui décident de rester au Luxembourg est également en hausse. «De 29 % en 2021, on est passé à 51 % en 2022. Il s’agit d’une belle preuve de confiance vis-à-vis de la qualité de notre formation», se réjouit Gilbert Massard.
Le ministre de l’Enseignement supérieur, Claude Meisch, se félicite aussi du succès grandissant du bachelor en médecine. Depuis 2021, il est également possible de suivre trois formations spécialisées en médecine à l’université : médecine générale, neurologie et oncologie. L’université compte actuellement 24 jeunes médecins en voie de spécialisation. «Peut-être faudra-t-il un jour décider d’introduire d’autres spécialisations. Dans un premier temps, il faut analyser les premières expériences», affirme le ministre libéral.
Aucune piste ne mène actuellement vers la création d’un centre hospitalier universitaire. Par contre, les étudiants ayant décroché leur bachelor initial au Luxembourg ont 33 places d’études garanties dans des universités françaises (25) et belges (8).