La nouvelle exposition temporaire du Naturmusee alerte le public sur la perte de la biodiversité et ses graves répercussions, potentiellement irréversibles.
Une espèce sur huit menacée de disparaître, un tiers des forêts déjà détruit par les activités humaines depuis le début de l’ère industrielle, 85 % des milieux humides (marécages, mangroves, etc.) disparus entre 1700 et 1980… Les chiffres sur la biodiversité sont affolants et les conséquences de cette perte de biodiversité risquent de devenir rapidement irrémédiables.
C’est de ce sujet d’actualité brûlant que s’est emparé le musée national d’Histoire naturelle (MNHN) pour sa nouvelle exposition temporaire baptisée «Impact. La biodiversité en questions». Conçue et réalisée par le muséum de Toulouse, l’exposition, d’ores et déjà visible au MNHN, se décline en trois axes : le monde d’hier, l’accélération actuelle, ce qui nous attend pour l’avenir.
Une sixième extinction de masse ?
Dans un cocon de filets de pêche qui évoquent les dégâts causés dans nos fonds marins, panneaux explicatifs et interactifs détaillent aux visiteurs les menaces qui pèsent sur le monde tel que nous le connaissons et les dommages que l’homme a déjà fait subir à son environnement. En cela, le dodo, dont une reproduction en carton ouvre l’exposition, est tout un symbole (voir encadré).
Avec en trame de fond cette question (quasiment rhétorique) : sommes-nous à l’aube de la sixième extinction de masse? «Cela ne fait aucun doute», déplore Monique Kirsch, la commissaire de l’exposition. Or pour la première fois, le principal responsable de cette extinction serait l’homme.
Le dodo, ce gros volatile endémique et emblématique de l’île Maurice, est devenu le symbole de l’extinction des espèces provoquée par l’homme. Apparu il y a quatre millions d’années, il fut à partir du XVIIe siècle la proie des marins fraîchement débarqués sur l’île, ainsi que celle de leurs chiens et de leurs chats. Quant aux rats et aux porcs apportés par les bateaux, ils firent festin des œufs des dodos, dont les nids étaient à même le sol. Résultat? «En 70 ans, le dodo avait complètement et définitivement disparu», rappelle Monique Kirsch, commissaire de l’exposition.
En cause : nos modes de vies et nos modes de production. La production d’un seul jean par exemple nécessite jusqu’à 10 000 litres d’eau, l’équivalent de 285 douches. Un tiers de la surface terrestre est quant à elle aujourd’hui dédiée à l’agriculture et à l’élevage. «Nous sommes aussi trop nombreux», souligne Monique Kirsch.
Mais si certaines espèces peuvent s’adapter à ce que nous leur infligeons et à la perte de leur espace, «d’autres non», signale la commissaire. Une installation permet à cet égard, en manipulant un bouton, de voir les animaux voués à disparaître en fonction de l’augmentation – même infime – de la température.
De surcroît, en poursuivant cette voie, l’homme met aussi en péril sa propre espèce : selon la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), la santé de quatre milliards de personnes est ainsi menacée par la perte de biodiversité.
Sur les huit millions d’espèces animales et végétales (dont 5,5 millions d’insectes), plus d’un million d’espèces animales et végétales sont en danger d’extinction. (Source : IPBES)
Des solutions existent
Drones-abeilles pour remplacer cet insecte indispensable à notre survie, plantation d’arbres dans nos régions quand la forêt tropicale est détruite : l’exposition temporaire présentée par le MNHN explore quelques-unes des différentes pistes (qui s’apparentent plus à du greenwashing) déjà envisagées pour stopper «la grande accélération», non sans en souligner les aberrations et les nouveaux problèmes qui peuvent en découler. À l’instar du slogan «Le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas», mieux vaut en effet peut-être éviter d’en arriver là. Et c’est bien l’objectif visé par cette exposition : montrer qu’il est temps d’agir. Il est tard, mais pas trop tard.
De nombreuses associations, y compris au Luxembourg, se mobilisent ainsi pour espérer survivre à cette crise biologique. Le documentaire Eng Äerd de Tom Alesch et des banderoles des jeunes de Youth For Climate viennent aussi le rappeler. «Nous aimerions que cette exposition sensibilise encore davantage le public à toutes ces questions», espère Monique Kirsch.
Florilège d’activités
Dans le cadre de l’exposition «Impact. La biodiversité en questions», le MNHN a mis en place une multitude d’activités qui se dérouleront entre octobre et décembre : conférences menées par des experts, projection d’un film, découverte des différentes espèces de champignons, création d’une fresque, visite suivie d’une assiette gourmande de produits régionaux à la cafétéria du musée… Le programme et le détail des conférences et des ateliers est à retrouver sur www.mnhn.lu/impact.
«Impact. La biodiversité en questions», jusqu’au 16 avril 2023, au musée national d’Histoire naturelle (25, rue Münster à Luxembourg).