Trois cambrioleurs présumés ont fait une peur bleue à une grand-mère et sa petite-fille en faisant irruption chez elles. Ils jurent qu’ils croyaient la maison inhabitée.
Le dimanche 17 décembre 2017, à Gonderange, quelques minutes avant 7 h, Yvonne prévient la police. Deux hommes viennent de sonner à sa porte pour lui proposer de nettoyer sa cheminée. La dame de 80 ans se méfie et leur claque la porte au nez. Mais elle est inquiète. Une vingtaine de minutes plus tôt, son téléphone a sonné à deux reprises et personne n’était à l’autre bout du fil.
Ce week-end-là, elle recevait Lisa, sa petite-fille âgée de 12 ans. La maman de la gamine devait venir la chercher vers midi. Aussi, quand on a à nouveau sonné à la porte, Lisa ne s’est pas méfiée. Ce n’était pas sa maman qui était derrière, mais deux grands gaillards aux cheveux noirs armés de couteaux. «Ils ont immédiatement forcé le passage», a expliqué l’enquêteur de la police judiciaire hier après-midi à la barre de la 13e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.
Un des hommes tient la grand-mère et sa petite-fille en respect avec un couteau pendant que le deuxième homme fouille la maison à la recherche de butin, témoigne Lisa qui reconnaît Walid. Elle lui aurait également remis l’argent du sac à main de sa grand-mère. Ils repartiront avec 200 euros et des bijoux. Une voiture les attend un peu plus loin. Des témoins l’ont aperçue stationnée avec les phares allumés.
« J’ai cru que cela allait mal tourner »
Une enquête de téléphonie sur base des deux appels à la victime permet de remonter au numéro de téléphone de Gernot, 27 ans, qui a borné à moins d’un kilomètre du lieu du cambriolage le jour des faits. Les policiers remontent également la piste de la voiture utilisée qui s’avère avoir été louée par le même homme. Petit à petit, l’enquêteur collecte les éléments qui lui permettent d’inculper Gernot, Walid et Abdullah. Ce dernier, qui figure sur la liste des personnes les plus recherchées par Europol, est en fuite en Turquie.
Les trois jeunes hommes sont venus depuis Brême et Hambourg pour «voler une dame âgée», a écrit Abdullah à sa petite amie en cours de route. Gernot affirme qu’ils pensaient que la maison de la victime était inhabitée. L’enquête démontre le contraire. Le trio aurait d’abord repéré les lieux choisis par Gernot avant d’agir. Ce dernier se serait également chargé de revendre les bijoux. Yvonne est toutefois parvenue à conserver sa bague de fiançailles et son alliance. «J’ai cru que cela allait mal tourner vu comment elle leur parlait», ajoute l’adolescente. «Je pense qu’ils ne devaient pas s’attendre à ce que ma grand-mère ne soit pas seule. Ils ont eu l’air surpris quand ils m’ont vue», a précisé Lisa qui assure que les cambrioleurs étaient les mêmes que les hommes qui avaient sonné à la porte le matin des faits.
Les absents ont toujours tort
«Abdullah m’a contacté quelques jours avant les faits pour me demander de participer à un cambriolage. Gernot avait repéré une maison au Luxembourg où il y avait de l’argent liquide. Il y avait effectué des travaux et avait été payé en liquide», résume Walid. «Ils sont venus me prendre la veille. On a passé la nuit à Trèves et on est reparti tôt le matin. Gernot nous a montré la maison. Pour nous assurer qu’elle était vide, Abdullah et moi avons sonné à la porte.» Les trois jeunes hommes auraient discuté pendant des heures sur la suite à donner à leur entreprise. «On y est retourné. Je suis allé dans le débarras où l’argent devait se trouver dans une enveloppe. Il n’y en avait pas», poursuit-il. Le trentenaire raconte comment il a visité la maison à la recherche de butin, mais prétend ne pas s’être fait remettre d’argent liquide par Lisa.
Gernot tente, quant à lui, de les faire passer pour des pieds nickelés. Sauf le troisième larron qui manque à l’appel. «Abdullah me harcelait pour que je lui donne une adresse à cambrioler. Je lui ai parlé de cette maison que je pensais inhabitée pour qu’il me laisse tranquille», explique-t-il. «Pourquoi penser qu’il y aurait quelque chose à voler dans une maison inhabitée?», lance la présidente. «Vous essayez de nous faire croire que vous avez fait cinq heures de voiture pour cambrioler une maison dans laquelle vous n’étiez pas certain de trouver quelque chose à voler? (…) Votre version ne tient pas la route. Ne croyez pas que les demi-vérités fonctionnent avec nous. La seule chose qui marche est de nous dire la vérité.»
Il tente une pirouette et prétend ne pas s’être trouvé sur les lieux le matin et ne pas avoir su que la maison était habitée. Abdullah a pu lui prendre son smartphone pour téléphoner à Yvonne. Gernot se cramponne à sa version. La présidente le place tout doucement, de question en question, face aux incohérences de son récit. Petit à petit, le grand jeune homme perd de sa superbe et de son assurance. Il se gratte le front. «Je vous laisse le temps de réfléchir aux bonnes réponses à mes questions jusqu’à demain», le prévient la juge. «Je vais y réfléchir», promet-il.