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À bord de la première voiture autonome du Luxembourg


Raphaël Frank, responsable du 360Lab et son équipe ont mené ce projet sur les routes du Kirchberg.  (Photos : fabrizio pizzolante)

Pour la première fois au Luxembourg, une voiture autonome s’est immiscée dans le trafic. Un exploit de technologies pour un test réussi.

Un véhicule futuriste très spécial s’est discrètement mêlé à la circulation du Kirchberg, jeudi. Mis à part ses barres de toit surplombées d’un étrange petit boîtier, rien ne laissait imaginer aux autres automobilistes que cette voiture blanche, tout à fait banale, se déplaçait sans que le conducteur ait à toucher le volant ni la moindre commande. Pour la première fois au Grand-Duché, une voiture autonome unifamiliale s’est déplacée sur les routes publiques sans la moindre difficulté et sans aucune intervention humaine.

Cette démonstration s’est déroulée de 10 h à 12 h au niveau du boulevard Konrad-Adenauer à Luxembourg où l’automobile autonome a parcouru plusieurs fois une boucle d’une dizaine de kilomètres. À l’intérieur de cet engin bourré de technologies, une personne derrière le volant, présente afin de prendre le contrôle si jamais la situation le nécessitait, ainsi que Raphaël Frank, professeur à l’université du Luxembourg et responsable du 360Lab, un laboratoire dédié à la mobilité intelligente au sein de l‘Interdisciplinary Centre for Security, Reliability and Trust (SnT)

Ces deux ordinateurs sont considérés comme les «cerveaux» de la voiture.

«Regardez, elle a repéré que le feu est passé au vert et nous avançons. Quand la voiture qui est en train de doubler sera à notre niveau, elle va apparaître ici», décrit-il en pointant l’écran placé sur le tableau de bord. Sur celui-ci, on voit apparaître, en blanc, les différents véhicules qui nous entourent ainsi que les nombreux objets qui balisent la route, tels que les bornes, les poteaux ou les arbres. Sur ce même écran, une sorte d’aura multicolore englobe la représentation de notre voiture, dévoilant le champ de vision des caméras.

Sans les mains

En tant que passager, l’expérience est étonnante. Même après le briefing détaillé réalisé par Raphaël Frank, voir le volant tourner tout seul ou la voiture réagir aux mouvements du trafic laisse l’impression d’être en présence d’un engin de parc d’attractions ou face à un de ces pianos automatiques que l’on trouve dans certains halls d’hôtel. La progression se fait en grande partie de façon très fluide.

Le véhicule autonome réagit très bien à la couleur des feux, aux actions des autres automobilistes et prend mieux les ronds-points que la plupart d’entre nous. À noter que nous sommes suivis en permanence par une voiture de l’université, si jamais notre belle mécanique autonome venait à défaillir. 

Mehdi, chargé de prendre le contrôle en cas d’imprévu, conserve ses mains à proximité des commandes. Plus tôt, un piéton un peu pressé l’a forcé à intervenir. «Un conducteur doit être là en permanence, concentré sur la route. Il est plus facile de circuler sur l’autoroute avec ce type de véhicule. En ville, c’est plus compliqué, car moins prévisible», fait remarquer Raphaël Frank. Lors de notre passage, seul un freinage quelque peu brutal en réaction à une queue de poisson, nous fera sursauter. 

Intelligence artificielle, cartes et caméras

Ce projet de voiture autonome a démarré en 2018 au sein du 360Lab de l’université du Luxembourg. La première sortie en conditions réelles d’hier représente le climax de quatre ans de recherches où plusieurs générations d’étudiants et d’ingénieurs se sont succédé. Tous ont opéré pour que cette voiture devienne autonome et contrôlable électroniquement.

Pour comprendre comment fonctionne cette automobile du futur, il faut simplement ouvrir son coffre. Là se trouve «le cerveau», comme l’appelle Raphaël Frank. Il s’agit de deux ordinateurs qui gèrent les décisions du véhicule en direct.

L’un des deux peut ressembler à  «ce que l’on trouve dans une Tesla», explique le professeur en computer science, «il gère une intelligence artificielle entraînée à la conduite qui va prendre des décisions suivant les situations». Le second est  «beaucoup plus standard».

Un écran à l’intérieur de l’habitacle permet de voir en direct les paramètres que prennent en compte les ordinateurs.

Ces machines fonctionnent de pair avec les six caméras installées sur le toit de l’auto. Trois ont été placées à l’avant, deux sur les côtés et une à l’arrière. Également à l’avant, se trouve un capteur laser qui scanne, en permanence, l’environnement à 360 degrés. Tout ce dispositif offre au véhicule autonome, 200 mètres de vision.

«Cela permet une bonne appréciation de ce qu’il y a autour de nous.» Pour optimiser encore plus l’autogestion dans l’espace, une carte haute définition a été conçue par l’équipe de Raphaël Frank en partenariat avec une start-up de San Francisco, Civil Maps, spécialiste dans les cartes HD pour la mobilité automatisée.

Celle-ci a été développée uniquement pour le secteur du Kirchberg où la première sortie a eu lieu, vendredi. Dans le futur, il s’agirait d’augmenter cette zone à l’ensemble du pays. «En plus des caméras, la carte apporte une vision plus statique de l’environnement. Elle permet, par exemple, de voir où se trouvent les lignes du trafic.» Elles sont exponentiellement plus détaillées que les cartes à définition standard (SD), couramment utilisées par les services de navigation traditionnels présents dans les voitures et les appareils mobiles. 

De quoi sera fait le futur?

Grâce à cet ensemble de technologies très poussées, le véhicule autonome est en capacité de «réagir plus vite qu’un être humain en cas de problème», explique le responsable du 360Lab. Malgré cela et la présence de Mehdi derrière le volant, il a fallu obtenir une autorisation pour que la voiture individuelle circule sur les routes luxembourgeoises. Ce faisant, cette grande première pose la question de la réglementation de la conduite autonome dans le pays.

«Aujourd’hui, plusieurs facteurs bloquent la démocratisation sur les routes des voitures autonomes : un facteur légal, un facteur technique et un facteur social», liste Raphaël Frank. «Au 360Lab, nous nous focalisons sur la recherche, pas sur l’aspect commercial, et le processus progresse à grands pas.»

Alors que le baptême du feu vient d’être franchi avec succès sur les routes du Kirchberg et que le Luxembourg a montré son savoir-faire en matière de véhicule autonome, de quoi sera faite la suite pour le professeur et son équipe? «Cette plateforme de recherche réunit énormément de sujets très intéressants et en relation avec notre époque, comme la robotique, l’intelligence artificielle ou l’autonomisation. Il s’agit de continuer à travailler sur ses disciplines. Maintenant, nous pourrions nous concentrer sur la connectivité et la collaboration entre les véhicules autonomes.» 

Un commentaire

  1. Cela ne dit pas à partir de quand ce sera possible !!!!! Et où en est le projet sur les questionnement d’ordres socials éthiques et légaux. à quand une autorisation. Il est déjà possible d’acheter des voitures autonomes Alors on fait quoi, beaucoup de personnes sont demandeuses ( PMR souvent exclus de conduite automobile ce qui constitue aussi une discrimination et un problème d’éthique et social. Donnez-nous une date de départ svp
    un tout grand merci

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