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Affaire Bisdorff : «C’est ma Bianka !»


Le 21 juillet 2015, lors des recherches de la petite Bianka à l'étang de Linger, près de Pétange. (Photo : archives LQ/Didier Sylvestre)

Les images d’une audition par la police de Sarah un mois après la disparition de sa fille ont permis au tribunal de se faire une image de la prévenue qui refuse de comparaître.

«Je sais que vous ne la trouverez jamais.» Prémonition ou provocation de la part de Sarah? Le fait est que plus de sept ans après la disparition de sa fille, le mystère reste entier. Et Sarah continue de l’entretenir en refusant de comparaître à son propre procès.

Mardi matin, les images d’une audition de la jeune femme réalisée le 15 juillet 2015 ont été projetées à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.

On y découvre une jeune femme brune au regard frondeur qui semble s’amuser d’être la seule à détenir une information qu’un enquêteur tente par tous les moyens de lui soutirer. Mais aussi une jeune mère convaincue d’être traitée de manière injuste par la justice qui veut lui enlever son bébé.

L’évidence des traces de son ADN et de celle d’une de ses filles présentes sur un body et une serviette retrouvés à proximité des étangs de Pétange et l’ampleur du dispositif mis en place pour essayer d’y retrouver le corps du nouveau-né ne la font pas vaciller. Seuls un clignement d’yeux accéléré et une manière presque animale de rabrouer le policier quand elle se sent acculée trahissent une pointe de nervosité.

«Je ne suis pas allée avec Bianka aux étangs», assure-t-elle. «Vous pouvez chercher, mais elle n’est pas là. J’en suis plus que certaine.» Où est le bébé alors? Sarah refuse de donner une réponse concrète.

«C’est ma Bianka!» ou «Je ne donnerai pas ma fille à quelqu’un que je ne connais pas. Une bonne mère ne fait pas cela. (…) Vous aimez voler les enfants des bonnes mamans» ou encore : «Là où elle est, elle est mieux que dans un foyer. Je la reverrai un jour», «je sais qu’elle va bien. Très bien».

Sarah revendique être une bonne maman

Sarah, 32 ans à l’époque et mère de sept enfants, n’a, semble-t-il, pas accepté que la justice veuille lui retirer sa dernière née comme elle l’a déjà fait avec ses aînés. Elle revendique être une bonne maman, semble en être convaincue et ne se laisse rien dire.

«Elle s’est emportée quand je lui ai montré comment mieux s’y prendre avec le bébé», a témoigné une sage-femme du centre hospitalier Émile-Mayrisch qui s’était occupée de Sarah et du bébé trois jours après l’accouchement. Elle a pourtant constaté des négligences suffisamment alarmantes pour alerter l’assistante sociale de l’hôpital.

Le nouveau-né n’était pas habillé de manière appropriée, un biberon sans capuchon dépassait du sac de sa maman, qui portait l’enfant dans les bras, énumère-t-elle.

L’assistante sociale de l’hôpital a prévenu le SCAS (service central d’assistance sociale) qui suivait Sarah de loin depuis un signalement de l’office social de Pétange à la suite duquel un assistant social avait été chargé d’une enquête quelques mois avant la naissance.

Ce dernier a déposé une demande de mesure de garde provisoire auprès du tribunal de la jeunesse trois jours après la naissance de la petite fille, soit le 9 juin 2015. Le tribunal ne donnera son feu vert que le 3 juillet 2015. L’enfant a déjà disparu. Sarah est placée en détention préventive et les recherches ont débuté.

«À l’issue de mon enquête, j’avais proposé une assistance éducative à Sarah», explique l’assistant social. «Après l’alerte du CHEM, j’ai rédigé une demande de placement.» Il était alors évident pour lui que Sarah ne disposait pas des compétences pour s’occuper d’un nouveau-né dont elle avait, selon l’enquête, insuffisamment préparé l’arrivée.

Le lait UHT ne tue pas

C’est donc pour échapper à ce placement que Sarah aurait fait disparaître sa fille. Une autre hypothèse soulevée par la justice est celle d’un manque de soins appropriés qui aurait pu conduire au décès du nourrisson qui pesait à peine 2,5 kilogrammes à la naissance. Sarah avait notamment dit l’avoir nourri avec du lait UHT et l’ami chez qui elle avait passé la nuit précédant son incursion aux étangs avait trouvé Bianka étrangement calme.

Le Dr François Kirch, pédiatre au CHEM qui a examiné Bianka à deux reprises lors de ses tout premiers jours de vie, se souvient «d’un enfant cliniquement tout à fait normal» et «d’un petit bébé qui buvait bien». Une petite fille en bonne santé qui aurait pu le rester même en n’étant nourrie que de lait UHT.

«En principe, on recommande de donner du lait entier ou maternisé aux enfants parce qu’ils contiennent des protéines et des matières grasses, mais du lait UHT ne les tuera pas», affirme-t-il. Les enfants peuvent tout au plus accuser un retard de croissance.

La déshydratation en revanche peut leur être fatale. Surtout pour des petits gabarits comme Bianka. Un enfant peut se déshydrater en trois ou quatre jours. Si un bébé n’est pas nourri suffisamment, «qu’un ou deux biberons sont sautés et que l’enfant a un épisode de diarrhée», des signes d’apathie et de déshydratation peuvent intervenir en 12 ou 24 heures. Est-ce ce qui est arrivé à la petite Bianka? Le pédiatre ne peut se prononcer.

Demain après-midi, seront entendus la maman et la tante de Sarah, ainsi que Mike, l’ami chez qui elle a passé la nuit du 14 au 15 juin 2015. Déjà entendu la semaine passée, il a souhaité s’exprimer à nouveau face à la chambre criminelle. Des témoins seront encore entendus jeudi après-midi et le contenu des «aveux» filmés par le colocataire de la prévenue devrait également être dévoilé.

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