Même sans véritable avant-centre, la sélection possède une palette de talents offensifs très variés. Il lui manque encore un petit truc crucial quand même…
Le bilan offensif de ce début de Nations League n’est pas mauvais (cinq buts en quatre matches) et pourtant, il y plane comme un soupçon de trop peu. C’est comme si la plupart des pièces étaient là, encore en désordre, et qu’il ne manquait que d’y mettre un peu d’ordre, ou alors de trouver… celle qui manque. Entre la capacité de percussion en petits appuis d’un Vincent Thill, la folie technique d’un Gerson Rodrigues, les décrochages de meneur et la patte gauche diabolique de précision d’un Danel Sinani, le potentiel d’élimination encore embryonnaire d’un Yvandro Borges mais aussi la capacité d’infiltration d’un Leandro Barreiro, le pied gauche de velours capable de trouver des lignes de passe nickel d’un Sébastien Thill ou l’opportunisme tout neuf d’un Mathias Olesen quand l’équipe joue suffisamment haut pour ne pas qu’il ait à multiplier les courses à haute intensité, il y a de la matière. Énormément même.
Le Luxembourg vient de voir le bout d’un long tunnel de quatre matches en dix jours et il en ressort avec la quasi-certitude de finir de nouveau deuxième de son groupe de Nations League (pour la troisième fois en trois campagnes), mais aussi avec des matches surtout maîtrisés où, rarement, a percé la folie créative qui s’est souvent caractérisée ces trois dernières années. Certes, la sélection aurait pu facilement inscrire deux à trois buts de plus avec un peu de réalisme, mais ils ne sont pas là, inscrits noir sur blanc dans le classement de la compétition après quatre journées. Et à bien y penser, c’est un problème. Relatif certes, mais un problème quand même.
Ne serait-ce que parce que contre les Féroé, on a eu l’impression, par exemple, que le jeu était souvent abandonné à… Maxime Chanot. Un défenseur central meneur de jeu? Très bas (forcément), le New-Yorkais semblait avoir pour consigne de rechercher quasi systématiquement la profondeur par de longs ballons dans le dos de la défense adverse, surtout à destination de Gerson Rodrigues, bon dans ses appels. D’autres l’ont fait et c’est souvent comme ça que le danger est venu. Si c’était une stratégie, elle était intelligente, car jamais les Féroïens n’ont semblé comprendre qu’il faudrait peut-être mettre la pression sur le défenseur central ou tout autre joueur en capacité de délivrer une transversale à 40 mètres du but. Cela leur a coûté un but (le premier, concédé sur penalty) et pas mal d’autres frayeurs. Validée, l’option du jeu long.
Le souci, qui rejoint celui de la multitude de talents offensifs, tient à la diversification. Contre les Féroé, n’aurait-il pas fallu apporter plus de vitesse et être capable de plus de variations? C’est un constat du jour. Mais il vaut aussi pour tout le mois de juin à des degrés divers : quand Olesen, dont ce n’est clairement pas la qualité première, a fait l’effort de réclamer le ballon d’une course verticale dans la surface, un peu en dépassement de fonction, à Vilnius, cela a fait 0-2. L’exemple donné par un immense gabarit dont l’enthousiasme aura été l’une des plus belles satisfactions de cette fin de saison. Un exemple à suivre?
Pivots, coups de reins, éliminations…
Facile à dire après 360 minutes en fin de saison et un turn-over limité. Mais nécessaire à évoquer quand, visiblement, Luc Holtz a épuisé sa patience envers les solutions avec un joueur de pivot (quasiment pas de temps de jeu pour Deville et Omosanya) qui lui permettraient de jouer autrement. Et qu’il ne parvient manifestement pas à trouver de joueurs au profil capable de lui apporter la profondeur cruciale à notre époque. Qui la prend? Qui donne le coup de reins vers l’avant? Où sont les lignes de passes courtes qui transpercent un dernier rideau ? Holtz a un temps vendu l’idée qu’un Alessio Curci pourrait avoir le profil, mais il ne sort jamais du banc. Pas illogique : il revient de onze matches en deux saisons de Regionalliga à Mayence. Peut-il faire des différences au niveau international ? Dans le doute…
Il y a aussi que ses joueurs les plus capables d’élimination sont en cale sèche. Borges est encore léger pour gagner des duels à répétition et ébranler une défense. Gerson lui… ne le fait carrément plus. Comme si son jeu avait évolué vers une épure trop sage. On le voit esquisser des tentatives avant de se raviser et de repartir vers l’arrière. Sa dinguerie ne semble plus s’exprimer ouvertement que devant le but. Il a d’ailleurs encore tenté un retourné acrobatique face aux Féroé, qui fait écho à celui, vainqueur, contre l’Azerbaïdjan. Mais on aimerait tellement voir ses deux facettes.
Car avec lui et ses 12 buts en 47 sélections, tout autant que les 8 pions en autant de matches de Danel Sinani (mais lui ne tire pas les penalties), ces Roud Léiwen ont un potentiel de nuisance comme jamais auparavant. Reste à trouver la formule magique? Peut-être plutôt l’élément rare : la verticalité. Et pas forcément celle qui sort des pieds de Chanot à 40 mètres du but.