Le jeune Suisse de 22 ans, en verve ces dernières semaines, a remporté sa première classique mecredi en assommant ses rivaux en haut de l’épouvantable Mur de Huy. l était tout simplement imprenable sur ce terrain où même Tadej Pogacar a baissé pavillon, laissant le Français Benoît Cosnefroy prendre la deuxième place.
Le baby-boom continue de marquer le cyclisme mondial. Depuis le sacre de Tadej Pogacar, pas une course de résonance internationale où la jeune génération ne montre les crocs acérés.
Même si Remco Evenepoel, qu’on attendait comme un grand favori du prochain Giro, ronge son frein en convalescence, la jeune génération grignote inexorablement du terrain.
Mercredi, en haut du Mur de Huy pour une fois dégarni de sa dizaine de milliers de spectateurs qui prennent place chaque année très religieusement le long du chemin des Chapelles, un jeunot de 22 ans s’est imposé devant un autre jeunot de 25 ans. Sur le podium, le Canadien Michael Woods, avec ses 33 ans, ressemblait à un grand-père.
Mercredi, sur la Flèche Wallonne, c’est donc à une nouvelle consécration de la jeunesse à laquelle on a assisté. En guise de hors-d’œuvre, c’est le Belge Mauri Vansevenant, néo-professionnel de 21 ans, qui fit des étincelles jusqu’au Mur de Huy où il dut, la mort dans l’âme, déposer les armes.
Vansevenant amuse le terrain
Il était le dernier rescapé de l’échappée matinale forte de quatre unités et plus les kilomètres défilaient dans la grisaille automnale le long des bords de Meuse, plus il se plaisait à faire de la résistance. Il allait même pousser l’héroïsme, à son corps défendant, jusqu’à plonger la tête la première dans le ravin alors qu’il avait le madré colombien Rigoberto Uran et, surtout, tout un peloton lancés à ses trousses.
Le jeune coéquipier de Bob Jungels chez Deceuninck-Quick Step se releva presque miraculeusement pour enfourcher sa machine et reprendre, presque comme si de rien n’était, sa fuite en avant. Non seulement Mauri Vansevenant n’abdiquait pas mais les griffures qui lacéraient ses avant-bras semblaient même fouetter sa bravoure. Il en fallait bien plus que ça pour le faire plonger sur le toboggan de la capitulation. De lui aussi, on reparlera sûrement ces prochaines années.
Mais ce n’est pas un Belge mais bel et bien un Suisse qui allait décrocher le pompon un peu plus haut sur le Mur de Huy qui, pour le coup, semblait, mesures sanitaires obligent, plongé dans sa ouate hivernale. Drôle d’ambiance quand même, cette absence de public…
De quoi faire perdre tous leurs repères aux vieux habitués des lieux. Mais manifestement pas à cette nouvelle vague qui, course après course, bouscule tout sur son passage. Dan Martin et Michal Kwiatkowski finiront cinquième et sixième, sans jamais donner l’impression de se retrouver éjectés du groupe des meilleurs. Mais lorsque l’un et l’autre ont commencé à lever les fesses de la selle, c’était seulement pour admirer ce qui se passait juste devant eux. Tadej Pogacar également, mais après son succès dans le dernier Tour, après sa fugue avortée dans le final du récent Mondial, on lui pardonnera sa… neuvième place.
Marc Hirschi était favori après sa troisième place à Imola et son si joli Tour de France, où il aura passé le plus clair de son temps à viser des étapes, avec succès, comme à Sarran.
Marc Hirschi est devenu le 2e suisse à gagner La #FlecheWallonne après Ferdi Kübler (vainqueur en 1951 et 1952) ?? pic.twitter.com/5l8QgsXPZj
— Les Rois du Peloton (@LRoisDuPeloton) September 30, 2020
Irrésistible ascension
Le jeune Suisse conseillé par Fabian Cancellara aura fait oublier l’absence de Julian Alaphilippe même si, après coup, on fantasmera sur la qualité du duel à côté duquel on est passé…
Mais pas de doute possible, dans sa construction de champion, ce succès lui a permis non seulement de marquer son territoire, mais aussi et surtout de matérialiser son irrésistible ascension au plus haut niveau mondial.
«C’était vraiment raide, il fallait attendre et ne pas partir trop tôt. C’est vraiment violent, on a les muscles pleins d’acide lactique, il faut être fort dans la tête pour surmonter la douleur», soufflera Marc Hirschi au moment de commenter sa course.
«Ça s’est déroulé parfaitement pour nous, avec un groupe de quatre coureurs à l’avant. On a mis un ou deux équipiers en tête du peloton pour contrôler la course. Le dernier tour de circuit a été très rapide et la montée finale n’a été qu’une question de jambes. C’est toujours dur, dans toutes les courses que j’ai gagnées, je ne me suis jamais senti super fort. En général, je ne me sens pas si bien que ça en début de course. J’essaie juste d’être bien placé et dans les derniers mètres, on a les jambes ou pas. Aujourd’hui, j’ai eu de la chance, elles étaient là. Mais je n’ai pas fait d’erreur non plus.»
Un autre illustre Suisse, Ferdi Kubler, avait remporté la Flèche Wallonne en 1951 et 1952 mais l’épreuve n’était en rien comparable quant à son parcours. Mais pas de doute, Marc Hirschi est parti pour se bâtir une sacrée carrière.
Denis Bastien