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Jugé pour avoir filmé les basketteuses dans les vestiaires à Esch-Lallange


Le parquet a soulevé la "perversité" des actes du prévenu. Après l'incident au centre sportif de Lallange, la perquisition à son domicile avait permis de voir qu'il avait aussi filmé des femmes aux toilettes à Foetz. (Photo : archives lq/Isabella Finzi)

Muni de son portable, un trentenaire était monté début 2015 sur le toit du centre sportif d’Esch-Lallange. Son expédition nocturne a fini dans le viseur de la justice. Son procès a eu lieu mardi matin.

«Comment en vient-on à l’idée de grimper sur un toit pour filmer des personnes en train de se changer dans les vestiaires?» Aujourd’hui, il a 41 ans. En février 2015, il en avait 36. Quand ce père de famille divorcé s’était posté avec son portable sur le toit du centre sportif boulevard Hubert-Clément à Esch-Lallange pour filmer les basketteuses, il faisait nuit. À travers une des coupoles, il avait une vue plongeante sur ce qui se passait dans le vestiaire occupé par l’équipe dames. Ni vu ni connu, il pensait visiblement mener à bien son expédition nocturne.

Mais la lumière blanche de son flash l’avait trahi. Surprise, l’une des joueuses avait alerté le concierge du bâtiment. «Il était autour de 22 h 10. Je suis monté et j’ai découvert l’individu perché sur le toit. Pour y arriver, il avait dû enjamber une passerelle. Quand il m’a aperçu, il a voulu s’en aller. Mais je l’ai retenu jusqu’à l’arrivée de la police.» Le témoin se souvient encore qu’il avait même deux portables : «L’un, il l’avait caché sous sa jambe. L’autre, il le tenait dans ses mains.» Autre détail qu’il avait signalé à la police à l’époque : «Il avait son pantalon baissé.»

«Les photos, c’était juste pour mes besoins»

«Au moment où on m’a attrapé sur le toit, je devais pisser…», a d’abord tenté d’expliquer le prévenu, mardi matin, à la barre du tribunal correctionnel. Mais il finira par reconnaître qu’il était en train d’assouvir ses pulsions sexuelles.

Parce qu’il a filmé les basketteuses à leur insu en train de se déshabiller dans les vestiaires, le quadragénaire est poursuivi pour avoir enfreint la loi concernant la protection de la vie privée. Des faits qu’il a d’emblée reconnus face aux juges. «Je regrette profondément ce que j’ai fait. Entre 2011 et 2015, je traversais une phase difficile. Je n’avais pas de travail fixe. J’avais perdu toute mon existence. Je m’enfonçais toujours plus dans ce marécage. Depuis 2016, je suis en traitement chez un docteur pour parler des faits.» Et d’ajouter : «Je n’ai jamais eu l’intention de rendre les photos publiques. C’était juste pour mes besoins.»

Mais quant à savoir d’où lui était venue l’idée de monter sur ce toit, le tribunal, dont c’était la première question, attend toujours une réponse. «Et que faisiez-vous en tant qu’homme adulte dans les toilettes dames d’une aire de jeux?», l’a relancé le président.

Lors d’une perquisition en mars 2016, la police avait en effet saisi l’ensemble de son matériel informatique. Matériel dans lequel les autorités avaient découvert deux autres vidéos litigieuses. Elles dataient de novembre 2013 et février 2014 et avaient été captées dans les toilettes dames d’un parc de jeux couvert à Foetz. L’une montrait une femme, l’autre une fille âgée de six à huit ans, également sans pantalon. «En tenant son portable sous la paroi de séparation, il ne voyait pas forcément ce qu’il filmait, mais par la voix il aurait dû clairement entendre qu’il s’agissait d’une enfant», estime le policier en charge de cette enquête.

Divorce et comportement «voyeuriste»

Le prévenu, quant à lui, conteste avoir eu «l’intention de faire des photos pédophiles» : «Je ne pouvais pas voir que c’était une enfant. J’attendais une personne…» Des explications qui ont toutefois laissé le tribunal dubitatif : «C’étaient les toilettes d’une aire de jeux pour enfants. Et si l’image de la fille vous répugnait, vous auriez pu l’effacer de suite et ne pas la mettre sur votre ordinateur…» Car même si la vidéo était effacée (la date de la suppression n’a pas pu être établie), la police l’avait bien retracée sur son ordinateur.

«En 2015, j’ai fait la connaissance de ma future femme. Depuis je remonte la pente», insistera le prévenu face aux juges pour dire que tout ça, c’est de l’histoire ancienne. À l’experte psychiatre, il avait, par ailleurs, confié avoir développé ce «comportement voyeuriste» à la suite de son divorce en 2011. L’expertise n’a révélé aucune maladie mentale chez ce quadragénaire.

«On n’a pas une personne malade et dangereuse face à nous. Il s’est un peu égaré, mais a tout fait pour se rattraper. Et il a cherché une aide utile», a plaidé Me Cédric Bellwald, parlant d’«une affaire pénible tant pour les victimes que pour le prévenu». Selon l’avocat du quadragénaire, le fait isolé avec l’enfant ne permettrait pas de retenir qu’il a des tendances pédophiles. Il faudrait également prendre en compte ses aveux, la thérapie qu’il suit de «manière ininterrompue» et le fait qu’il n’a pas de casier judiciaire.

«Perversité» : 18 mois et une amende requis

Dans son réquisitoire, le représentant du parquet a toutefois soulevé la «perversité» de ses actes. Car le prévenu aurait filmé toutes ces personnes à leur insu. Et en filmant la fillette aux toilettes, il aurait bien fabriqué, puis conservé du matériel pédopornographique. Il a au final requis 18 mois de prison et une amende contre le quadragénaire sans antécédents. Il propose d’assortir la peine d’un sursis probatoire avec l’obligation qu’il continue à se faire soigner. Aucune des victimes ne s’était présentée lors du procès pour se constituer partie civile.

La 12e chambre correctionnelle rendra son jugement le 22 octobre.

Fabienne Armborst

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