L’ancien bourgmestre de Sandweiler a été fixé sur son sort mardi après-midi. La Cour d’appel a revu à la baisse les peines prononcées contre lui en première instance il y a deux ans.
La Cour d’appel a jugé mardi après-midi «recevables» et «partiellement fondés» les appels interjetés par Charles Unsen et Habiba K. de leurs condamnations en première instance. Elle a ainsi condamné l’ancien bourgmestre de Sandweiler à une peine de prison de 30 mois assortie du sursis intégral et ramené l’amende prononcée contre lui à la somme de 25 000 euros. La cour a également levé l’interdiction d’exercer des fonctions, emplois ou offices publics pour une durée de cinq ans. Habiba K. est, quant à elle, condamnée à une peine de 18 mois de prison assortie du sursis intégral et échappe à une amende. Des peines réduites de moitié par rapport à celles prononcées contre eux en première instance ainsi qu’à celles requises par le ministère public.
Charles Unsen a été à la tête de la commune de Sandweiler de 2009 à 2011. Une affaire de prise illégale d’intérêts, corruption, faux et usage de faux a mis un terme à la carrière politique de l’élu socialiste. Huit ans après avoir renoncé à se présenter aux élections communales de 2011, l’ancien bourgmestre avait dû se présenter face aux juges de la 12e chambre correctionnelle pour en répondre. Cette dernière l’avait condamné à une peine d’emprisonnement de trois ans, dont deux avec sursis, ainsi qu’à une amende de 50 000 euros.
Il aurait, affirmait la cour à l’époque, perverti sa fonction d’élu pour acquérir en 2010 un terrain à titre privé à un prix très bas. En parallèle, l’administration communale de Sandweiler avait acheté un terrain voisin entre les rues de Remich et d’Oetrange à la même vendeuse, Habiba K., à un prix quatre fois plus élevé. Un petit arrangement qui ne se serait pas arrêté là, puisque la vendeuse, employée au service de nettoyage de la commune de Sandweiler, aurait vu son contrat passer de 20 à 40 heures par semaine à la suite de la vente des terrains. De plus, la cousine de cette dernière aurait également été engagée à la commune peu de temps après. En première instance, Habiba K. avait été condamnée pour corruption à une peine de deux ans d’emprisonnement avec sursis et à une amende de 5 000 euros. Condamnation qu’elle conteste.
«Je n’ai rien à me reprocher»
Le septuagénaire et elle auraient préféré être acquittés. «Je n’ai rien à me reprocher. Je n’ai commis aucun des trois délits. Le tribunal m’a condamné sur la base de suppositions et d’hypothèses», expliquait-il au mois de mars dernier lors de sa comparution face à la cour d’appel pour justifier sa décision de faire appel de sa condamnation. Si l’ancien élu a estimé à la barre de la cour d’appel être au cœur d’un «complot politique», pour le ministère public, «la trame chronologique des évènements débouche sur un faisceau d’indices graves et concordants».
Tout commence par un échange de parcelles pour construire une canalisation entre la commune et le compagnon d’Habiba K., un bon ami de Charles Unsen, apprendra-t-on. Un compromis est signé en 2008, mais le propriétaire n’a jamais formalisé l’acte. Le terrain en question, de 3 ares, a finalement été acquis par la commune pour 215 000 euros. Charles Unsen a, de son côté, acheté à titre privé à la même propriétaire un terrain de 9 ares à 16 500 euros l’are, soit 148 500 euros. Largement en dessous du prix du marché, alors que le terrain ne manquait pas d’amateurs.
Habiba K. s’était retrouvée en possession des deux terrains après que son compagnon les lui aurait cédés en 2009, avant de décéder en 2010. Un compromis de vente pour le plus grand des deux est signé avec un couple pour 460 000 euros, mais Habiba K. se rétracte pour conclure la vente au profit du bourgmestre de Sandweiler. Le jour de la signature de l’acte notarié pour la parcelle de 9 ares, Charles Unsen aurait aussi versé la somme de 100 000 euros sur le compte de la vendeuse avec la mention «indemnité». Une indemnité qui se serait transformée en «reconnaissance de dette» après l’ouverture de l’instruction judiciaire, selon le ministère public.
En mars dernier, le parquet général avait demandé confirmation des peines prononcées en première instance, les jugeant appropriées. Son représentant a cependant demandé que l’ancien bourgmestre puisse bénéficier d’un sursis intégral étant donné que ce dernier est un délinquant primaire. Il a également reconnu que les juges de première instance avaient à juste titre prononcé une interdiction de remplir des fonctions, emplois ou offices publics pour une durée de cinq ans et que la Cour d’appel devait confirmer la confiscation de la parcelle de terre litigieuse.
Charles Unsen et Habiba K. n’ont finalement pas obtenu l’acquittement souhaité.
Sophie Kieffer