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Café incendié à Niederkorn : dix ans requis contre la serveuse


Pour le parquet, même si le mobile de la serveuse n'excuse rien, il est à prendre en considération au niveau des circonstances atténuantes. (photo d'illustration / AFP)

Le 11 août 2011, vers 19h, le café des Amis, situé rue de Longwy à Niederkorn, était dévasté par les flammes.La serveuse avait fini par reconnaître avoir incendié son lieu de travail après avoir été abusée sexuellement par son patron. Plusieurs tentatives avaient précédé cet incendie criminel. Mercredi, elle a dû s’expliquer à la barre.

C’est avec les larmes aux yeux que la prévenue âgée aujourd’hui de 27 ans s’est avancée, mercredi, à la barre. Plusieurs fois au cours de son audition devant la chambre criminelle, elle a éclaté en sanglots en racontant son histoire. En mars 2011, elle avait commencé à travailler dans le café. En contrepartie, le patron mettait une petite chambre à sa disposition. Le domicile parental, elle l’avait quitté après s’être disputée avec ses parents. La raison : une intoxication éthylique à la suite de laquelle elle avait été hospitalisée.

Au tout début, ses horaires de travail au café étaient de 9 h à 17 h, mais très vite, ils se seraient étendus jusque tard dans la nuit. La prévenue a indiqué avoir non seulement été exploitée par son patron, mais également abusée sexuellement. Et au mois de juin, il l’aurait violée. Selon la prévenue, il arrivait aussi qu’il l’enferme dans sa chambre.

À noter que l’ancien patron du café, poursuivi pour viols sur deux serveuses en 2010 et 2011, a été reconnu coupable par la 13 e chambre criminelle. Le quadragénaire a écopé mi-février de 16 ans de prison, dont six avec sursis. Mardi prochain s’ouvrira son procès en appel.

Sur la même affaire : Abusée sexuellement, la serveuse avait mis le feu au café

 

« Quand j’étais enfermée, j’ai déjà réfléchi à sauter par la fenêtre. Mais la fenêtre de ma chambre était très petite », a poursuivi la prévenue, mercredi. L’idée de mettre le feu lui serait venue après qu’une poubelle dans la cuisine avait brûlé, par accident, le 10 août au soir. Le lendemain en fin de matinée, elle avait donc mis le feu à une poubelle près du comptoir. « Je voulais tout simplement ne plus voir le café », dit la prévenue pour expliquer son geste. Cette première tentative n’avait pas abouti.

En fin d’après-midi, un client avait détecté des traces d’incendie dans les toilettes du café à la cave. Or ce deuxième fait, la prévenue le conteste. Elle reconnaît toutefois avoir pris plus tard un morceau de papier-toilette pour l’allumer au-dessus du tapis au premier étage. « Pourquoi au premier étage? », l’a questionnée la présidente de la 9 e chambre criminelle, Elisabeth Capesius. Sa réponse : « Je n’ai pas réfléchi, je pensais que le feu descendrait. »

La défense plaide l’irresponsabilité pénale

Toujours est-il que le feu n’avait pas pris. Ce n’était toutefois pas sa dernière tentative. La prévenue a déclaré, mercredi, avoir mis le feu au matelas dans le palier après qu’un client du café lui avait fait des avances. Les conséquences sont connues. « À ce moment, j’ai commencé à trembler. C’est alors que j’ai réalisé ce que j’avais fait. Lorsque j’ai appris que des personnes se trouvaient à l’étage, j’ai espéré que rien ne leur arriverait », a soulevé la prévenue.

Me Marc Lentz a plaidé l’irresponsabilité pénale de sa cliente en se référant principalement à l’article 71.2 du code pénal («N’est pas pénalement responsable la personne qui a agi sous l’empire d’une force ou d’une contrainte à laquelle elle n’a pu résister»). Selon l’avocat, à l’époque, sa cliente « se trouvait dans une impasse ».

Dans son réquisitoire, le parquet a toutefois considéré la prévenue comme complètement responsable, mais estimé qu’« on ne peut pas faire abstraction de ce qu’elle a vécu ». Comme circonstances atténuantes, le substitut a retenu que la prévenue avait fait des aveux et avait un motif. « Même si le mobile n’excuse rien, il est à prendre en considération. »

Plusieurs points gênent néanmoins le parquet. Ainsi, le substitut a noté que la prévenue avait mis le feu à un endroit qui constituait un chemin de fuite. Lors de l’incendie, trois personnes n’avaient en effet pas pu sortir par la cage d’escalier. Le parquet a également constaté que la prévenue a mis le feu au moment où son patron se trouvait en vacances. « Tout cela fait vaciller un peu le mobile », a estimé le substitut.

Le parquet a requis dix ans de réclusion. En ce qui concerne un éventuel sursis, il se rapporte à la prudence du tribunal, mais ne s’y oppose pas. Prononcé le 30 juin.

Fabienne Armborst

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