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Affaire Saïd : la tension monte


Le procès de Saïd se rallonge à mesure qu’il produit de nouvelles pièces pour prouver sa bonne foi. Prévu sur deux semaines, il pourrait finalement se poursuivre après les vacances de Pentecôte. (Photo : archives lq/julien garroy)

Saïd encaisse les coups, esquive, fait diversion… Rincé, il continue de crier à la machination de la part de sa victime présumée pour éviter de payer les travaux.

Jiaoli et Saïd ont tissé une relation amoureuse et commerciale complexe qui fait l’objet d’un procès face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Il est entré dans sa troisième semaine de débats et va encore une fois être prolongé. Le prévenu apporte de nouveaux éléments à l’enquête que le tribunal doit vérifier le plus rapidement possible. Comme ce prêt de 17 000 euros que Saïd dit avoir prêté à Madame Li, une amie et collaboratrice de la victime présumée, en décembre 2018 pour l’aider à s’occuper de son frère incarcéré en Chine.

À la barre hier après-midi, Madame Li explique que Jiaoli lui a demandé de prêter son numéro de compte en banque pour que Saïd lui verse de l’argent qu’elle devrait prélever et répartir dans des enveloppes que Jiaoli a remises au prévenu. Son frère était bien en prison, mais jusqu’au mois de février 2018. La veille, elle avait dit à l’enquêteur avoir dû faire transiter l’argent vers l’Italie pour Saïd. Une nouvelle version que n’a pas manqué de relever Me Hellinckx, l’avocat du prévenu, qui souligne les versions mouvantes de la partie adverse.

Saïd, lui, continue de produire de nouveaux éléments pour prouver sa bonne foi. «Vous jouez à un petit jeu avec nous, mais on n’est pas sûr de qui sera le gagnant en fin de compte. Nous n’aimons pas quand on joue avec nous après 3 ans d’enquête», l’avertit la présidente de la chambre criminelle. «Je ne joue pas. Madame Li est en train de mentir», s’emporte Saïd. Mercredi déjà, il avait prétendu être victime d’un complot monté par la victime présumée.

Saïd, ne disposant pas de pièces matérielles prouvant ses dires, est à bout d’arguments. Le peu de documents au dossier semblent contestables. La juge perd patience et hausse le ton. Les loyers et les cautions de certains appartements appartenant à Jiaoli étaient versés sur le compte de la société du prévenu. «Pourquoi?», le questionne la juge. «Jiaoli et la secrétaire voulaient me faire des problèmes», répète le prévenu. «Quelle est l’intérêt de la secrétaire?», ne lâche pas la présidente. «Vous auriez dû vous en rendre compte et intervenir en tant que chef d’entreprise. Vous n’étiez ni propriétaire ni bailleur.»

«Parlons de votre crédibilité»

Comme la veille, on tourne en rond. Saïd n’a pas transféré l’argent perçu à Jiaoli parce qu’elle lui devait de l’argent, reconnaît le prévenu qui prétend que l’argent qu’on lui reproche d’avoir escroqué à Jiaoli serait en fait une compensation pour des travaux réalisés hors devis ou contrat. La présidente l’interroge sur les loyers reçus en liquide de la main à la main par deux locataires. «Ce n’est pas vrai. Je n’ai pris du liquide que pour payer le mazout qui était toujours payé en liquide», répond le prévenu. «L’immeuble est chauffé au gaz et le gaz ne vient pas en camion», le reprend la présidente. «Je sais ce que je dis, le gaz est apporté en camion. Certaines communes n’ont pas l’accès dans les maisons», se défend Saïd. Le fournisseur de gaz n’a pas été payé.

La présidente tente de le coincer. Elle produit une facture de 100 000 euros pour des fours à pizza destinés, affirme Saïd, au restaurant chinois d’une des sœurs de Jiaoli, potentiellement fausse, selon elle. «L’entreprise qui a établi la facture est inconnue au bataillon au Maroc», précise le procureur. «Je me demande si vous ne nous prenez pas pour des cons?», l’interroge la présidente. «Je me demande vraiment comment fonctionnait votre société. Il n’y a ni factures ni devis… Il n’y a que de l’argent qui rentrait.»

Jiaoli a expliqué hier que Saïd avait fait du «bricolage» avec «des matériaux bon marché» dans un studio et un appartement dans un des immeubles pour 20 000 euros payés en liquide. Mais là aussi, il n’y aurait ni facture, ni contrat, ni devis. Saïd, sans surprise, conteste. S’ensuit une vérification des travaux dans les divers bâtiments sur des photographies entre les deux parties. Sur une d’entre elles figure le camion de livraison de gaz! Le prévenu insiste sur le fait que des travaux supplémentaires ont été faits. «Vous auriez dû faire un contrat supplémentaire», le blâme la présidente.

Saïd s’échine, encaisse les coups, perd de sa superbe, mais tient bon, fait diversion. Le procureur assène le suivant : «On ne sait pas ce que Saïd faisait dans une société qui était dirigée par un autre entrepreneur jusqu’à sa démission en juin 2018. Ce dernier avait une autorisation d’établissement. Après cela, les travaux étaient illégaux.» Le prévenu tente de se justifier en disant que d’autres entreprises actives sur le chantier en disposaient. «Vous jouez sur la crédibilité des témoins. Parlons un peu de la vôtre», balance la présidente. Saïd s’enferre. Tout a été organisé par Jiaoli dans le but de ne pas payer les 500 000 euros des travaux. Reste à comprendre à quoi correspond le million d’euros viré au total par Jiaoli au prévenu.

Ce matin, il devra répondre des accusations de violence à l’encontre de Jiaoli.

 

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