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Les deux Corées unies pour la première fois à l’Unesco


La lutte coréenne, fondamentalement liée à la terre et à l'agriculture, est à la fois un sport national et une pratique culturelle. (photo AFP)

Les deux Corées ont obtenu à l’issue d’une candidature conjointe lundi l’inscription de la lutte coréenne sur la liste du patrimoine de l’Unesco, une démarche sans précédent qui marque une nouvelle étape dans leur réconciliation.

Les deux pays, théoriquement toujours en guerre depuis le conflit de 1950-53 mais qui ont opéré un rapprochement spectaculaire ces derniers mois, ont fusionné au dernier moment des dossiers présentés séparément. « Le fait que les deux Corées aient accepté de fusionner leurs candidatures respectives est sans précédent », a déclaré la directrice générale de l’Unesco, Audrey Azoulay. « Ce résultat est une nouvelle illustration du pouvoir extraordinaire du patrimoine culturel comme vecteur de paix et trait d’union entre les peuples », s’est-elle félicitée.

Le comité ad hoc de l’Unesco, réuni à Port-Louis, capitale de l’île Maurice, a classé la lutte traditionnelle coréenne sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’Humanité. Le « Ssirum » en Corée du Nord ou « Ssireum » en Corée du Sud, fondamentalement lié à la terre et à l’agriculture, est à la fois un sport national et une pratique culturelle. Des compétitions sont organisées périodiquement à l’occasion d’événements ou de fêtes agricoles liées au cycle des saisons.

Les deux Corées, qui partagent la même langue et la même culture, avaient jusqu’ici toujours entrepris des démarches concurrentes pour l’inscription de traditions nationales au patrimoine de l’Humanité. En 2013, Séoul avait ainsi obtenu la reconnaissance du « kimchi » – spécialité à base de chou fermenté très prisée dans la péninsule – comme bien mondial immatériel, poussant le Nord à faire de même en 2015.

Le chant traditionnel « Arirang » a connu le même scénario : l’Unesco a d’abord retenu une candidature sud-coréenne en 2012, puis celle du Nord deux ans plus tard. Concernant la lutte coréenne, qui présente quelques similarités avec le sumo japonais, Pyongyang avait entrepris en premier des démarches auprès de l’Unesco, avant que Séoul ne lui emboîte le pas en 2016. Une inscription conjointe sur la prestigieuse Liste du patrimoine immatériel de l’Humanité va contribuer au « sentiment d’homogénéité, d’identité commune », estime Kim Dong-sun, spécialiste des questions sportives à l’Université Kyonggi.

D’autres projets de réconciliation

D’origine ancestrale – il est représenté sur des peintures murales dès le IVe siècle – le Ssireum met aux prises deux lutteurs, portant culotte et ceinture, dans un cercle de sable. Le fondateur du régime communiste de Corée du Nord, Kim Il Sung, avait fait du développement de ce sport une priorité nationale. Au Sud, le président autoritaire Chun Doo-hwan a aussi promu le Ssireum dans les années 1980 pour tenter de détourner l’attention de la vague contestataire à laquelle il faisait face. Ce sport a depuis perdu de son attrait – les équipes professionnelles sponsorisées par de grands groupes comme Samsung ont disparu – mais ses partisans espèrent lui redonner une nouvelle jeunesse à travers cette inscription commune.

L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture travaille aussi sur d’autres projets de réconciliation, dont la rédaction d’un dictionnaire étymologique coréen, recensant les pratiques linguistiques du Nord et du Sud. « D’une certaine manière, il n’y a que nous qui puissions avancer vraiment de manière décidée en ce moment », relève une source diplomatique à l’Unesco en rappelant les lourdes sanctions internationales qui frappent tout projet économique avec la Corée du Nord.

Une zone de biosphère pourrait aussi être créée dans la « DMZ », no man’s land de 4 km de large et 248 km de long sur la frontière intercoréenne où la nature a retrouvé ses droits en plusieurs décennies de Guerre froide. Sécurisée par un mur de fils barbelés, un tapis de mines et des milliers de soldats de part et d’autre, elle est paradoxalement appelée « zone démilitarisée ». Des initiatives sont aussi à l’étude pour permettre le partage et la gestion conjointe des eaux transfrontalières dans la péninsule.

LQ/AFP

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