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Le Portugal s’apprête à adopter un budget à haut risque


Antonio Costa avait réussi début février le tour de force d'arracher à la Commission européenne un feu vert, certes assorti de réserves, au projet de budget 2016. (photo AFP)

Les députés de la gauche portugaise devaient adopter mardi un budget à haut risque qui promet de desserrer l’étau de l’austérité tout en réduisant les déficits, sous l’oeil inquiet de Bruxelles et des marchés financiers.

Après quatre années de rigueur extrême imposée au pays en contrepartie d’un plan d’aide internationale, « ce budget démontre qu’il est possible de vivre mieux au Portugal », a assuré le Premier ministre socialiste Antonio Costa. Un avis qui n’est guère partagé par son prédécesseur Pedro Passos Coelho, chef du PSD (centre droit): « C’est un budget irréaliste et populiste qui nuit aux Portugais », a-t-il asséné.

Reconduit après être arrivé en tête des élections législatives d’octobre, M. Passos Coelho avait été évincé au Parlement par une alliance inédite entre le Parti socialiste et l’extrême gauche.

Désormais chef du gouvernement, M. Costa avait réussi début février le tour de force d’arracher à la Commission européenne un feu vert, certes assorti de réserves, au projet de budget 2016, sans renier ses accords avec ses alliés de la gauche radicale.

L’ancien élève modèle de la zone euro s’était rebellé, soumettant d’abord un budget jugé peu crédible. Puis, Lisbonne a fini par céder en partie aux exigences de Bruxelles, tout en marquant un virage par rapport à la politique menée auparavant par la droite.

Sous la pression, le Portugal a ainsi revu à la baisse son objectif de déficit public, à 2,2% du PIB, contre 4,3% en 2015, et présenté des mesures de rigueur supplémentaires évaluées à 1,1 milliard d’euros.

Et d’autres efforts pourraient s’avérer nécessaires pour rester dans les clous du pacte de stabilité, a prévenu la Commission européenne qui passera le budget à nouveau au crible en mai.

« Alliance précaire »

« L’alliance gouvernementale est très précaire. Si les partis plus à gauche refusent un éventuel plan B, nous allons droit vers une crise politique », a commenté à l’AFP le politologue José Antonio Passos Palmeira.

« Antonio Costa ne devrait pas présenter de nouvelles mesures. Notre accord a été très clair: il ne faut pas toucher aux revenus des Portugais », a fait valoir Catarina Martins, dirigeante du Bloc de gauche, proche de Syriza en Grèce.

« Le budget va dans le bon sens, même s’il ne résout pas tous les problèmes, comme celui de la restructuration de la dette », a estimé Jeronimo de Sousa, secrétaire général du Parti communiste, qui devait voter un budget pour la première fois en 40 ans de démocratie.

Epouvantail pour les marchés, une renégociation de l’énorme dette du pays, qui frôle les 130% du PIB, n’est guère envisagée par le Parti socialiste.

La récente hausse des taux d’emprunt du Portugal, qui ont atteint le 11 février un pic à 4,5% avant de redescendre à 3,5%, a donné des sueurs froides au gouvernement, inquiet de voir le coût budgétaire de la dette s’envoler.

« Les investisseurs ne font pas confiance aux chiffres du budget qui ont déjà été revus trois fois. Ils préfèrent vendre les titres de la dette portugaise en attendant davantage de visibilité », a commenté Pedro Lino, gérant de la maison de courtage Dif Broker.

Fidèle à ses promesses électorales, Antonio Costa a supprimé les coupes dans les revenus des fonctionnaires, allégé une surtaxe sur les salaires et revalorisé les prestations sociales.

Mais pour répondre aux exigences de Bruxelles, le gouvernement a aussi annoncé une série de hausses d’impôts sur les carburants, les véhicules, le tabac et les alcools, reprenant ainsi d’une main ce qu’il avait donné de l’autre.

Au bout du compte, les Portugais gagnent cependant en pouvoir d’achat, à hauteur de 700 millions d’euros, a affirmé M. Costa devant les députés.

Un pronostic qui laisse sceptiques les analystes: « Le budget tente un équilibre impossible, ce sera un échec. Il n’arrivera ni à mettre fin à l’austérité ni à atteindre les objectifs de déficits », redoute ainsi le professeur d’économie Joao Cesar das Neves.

Le Quotidien / AFP

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