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L’ETA s’éteint lentement en Espagne


Un espagnol du village basque Llodio passe devant un graffiti "Euskadi Ta Askatasuna" (Pays basque et liberté), le 19 juin 2005. (Photo : AFP)

Quatre ans après avoir renoncé à la violence l’organisation séparatiste basque ETA agonise sans se dissoudre et au Pays basque beaucoup comptent sur un changement de gouvernement à Madrid pour débloquer la situation et tourner la page.

Que reste-t-il de l’ETA (Euskadi Ta Askatasuna, Pays basque et liberté), née en 1959 avec pour objectif la lutte contre le franquisme et l’indépendance du Pays basque et de la Navarre, accusée d’avoir tué au moins 829 personnes au nom de ce combat?

Le 20 octobre 2011, répondant à l’appel des participants à la conférence internationale pour la paix d’Aiete, dont l’ex-secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan, l’ETA, divisée depuis des années sur la poursuite ou l’arrêt des attentats, a renoncé définitivement à ses activités armées.

Elle réclame depuis, pour se dissoudre, une négociation sur le sort des détenus, des amnisties et un regroupement des prisonniers au Pays basque. Mais Madrid et Paris refusent toute négociation avec ce «mouvement terroriste».

Année difficile

L’ETA compterait moins de 30 membres en liberté, selon des sources policières des deux côtés de la frontière. «En dehors des prisons, il n’y a pas d’ETA», résume un avocat ayant défendu plusieurs membres de l’organisation.

Et l’année 2015 lui a sans doute été néfaste, notamment avec l’interpellation en janvier de cinq avocats, parmi les principaux défenseurs de ses 427 membres en prison.

Cette opération a porté atteinte «au maintien de la coordination et de la discipline» en sein de l’ETA car les avocats leurs servaient de courroie de transmission, assure Javier Zaragoza, chef du parquet anti-terroriste.

Fin mai, les polices française et espagnole ont découvert une cache d’armes à Biarritz (sud-ouest de la France), semblant selon les spécialistes du dossier couper l’herbe sous le pied de l’organisation. Elle entendait organiser une remise unilatérale d’armes qui l’aurait ramenée sur le devant de la scène.

En septembre, les deux dirigeants présumés de l’organisation, Iratxe Sorzabal, 43 ans, et David Pla, 40 ans, ont été interpellés en France.

«L’ETA est plongée dans un processus irréversible de disparition», affirme Javier Zaragoza. «L’ETA existe encore», répond cependant Jonan Fernandez, chargé du dossier de la paix au sein du gouvernement du Pays basque.

«Ils émettent encore des communiqués et il existe encore des caches». Et il ajoute, en défendant la position du Parti nationaliste basque (PNV, conservateur) au pouvoir dans la région, favorable à des discussions sans pour autant «négocier»: «il faut quand même canaliser une fin ordonnée de l’ETA, garantissant qu’il ne reste pas d’armes hors de contrôle».

Avancer semble être le souhait des habitants du Pays basque. Si 66% des Basques rejettent frontalement l’ETA selon l’enquête d’opinion Euskobarometro, 76% souhaitent une négociation entre l’organisation et le gouvernement central.

Pendant ces quatre ans il aurait fallu «que l’ETA avance plus vite sur le désarmement unilatéral (…) et soit plus critique sur ses atteintes aux droits de l’Homme», regrette Jonan Hernandez en dénonçant aussi «l’immobilisme du gouvernement du PP».

La situation pourrait évoluer après les élections législatives du 20 décembre, «il faut voir quel terrain de jeu sortira de ces élections», déclare Pernando Barrena, porte-parole du parti indépendantiste de gauche Sortu.

Selon une source proche du dossier, la France ne serait pas opposée à un rapprochement de certains des prisonniers.

Les partisans d’un «dialogue», ou d’une résolution du «conflit», tablent aussi sur la sortie de prison, attendue en avril, d’Arnaldo Otegi, dirigeant de Sortu, ancien membre de l’ETA et leader consensuel dans la mouvance indépendantiste. Opposé à la violence depuis 1999, il pourrait impulser des évolutions.

Même si, sur les moyens d’arriver à une réconciliation, les divisions restent profondes. Ainsi, l’emploi du mot «conflit» est contesté par les victimes, tandis que la gauche indépendantiste refuse de condamner ouvertement «la violence de l’ETA», souhaitant une condamnation de «toutes les violences» y compris des tortures ou exécutions extrajudiciaires de ses militants.

Ce qui est certain, assure Pernando Barrena, c’est que l’ETA «veut mener le processus de désarmement jusqu’à ses dernières conséquences». Dans son dernier communiqué, souligne-t-il, l’organisation dit avoir déjà «accompli l’essentiel de sa trajectoire», reconnaissance implicite que sa fin pourrait être proche.

AFP/M.R.

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