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Erdogan rejette les «menaces» allemandes, la crise s’envenime


Le président turc Recep Tayyip Erdogan et la chancelière allemande Angela Merkel au sommet du G20 à Hambourg en Allemagne, le 8 juillet 2017. (Photo : AFP)

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a assuré vendredi sur un ton de défi que son pays ne plierait pas face à l’Allemagne, qui a durci sa politique à son égard après l’arrestation de militants de droits de l’Homme à Istanbul.

La brouille entre les deux pays a pris une tournure d’une rare gravité après que Berlin a décidé, jeudi, de jouer la carte de l’économie pour mettre la pression sur Ankara, suscitant l’ire des dirigeants turcs. «Ils ne peuvent pas nous faire peur avec ces menaces», a déclaré Recep Tayyip Erdogan lors d’un discours à Istanbul, ajoutant que la «justice turque est plus indépendante» que celle de l’Allemagne.

Berlin a annoncé jeudi une «réorientation» de sa politique vis-à-vis de la Turquie avec une série de mesures, dont une mise en garde du ministère des Affaires étrangères pour les voyages en Turquie, destination traditionnellement très prisée des vacanciers allemands. Au-delà, les mesures envisagées à Berlin incluent un réexamen des garanties, prêts ou aides qu’apportent le gouvernement allemand ou l’UE aux exportations ou aux investissements dans le pays.

Ce durcissement intervient en réaction à la mise en détention d’un défenseur allemand des droits de l’Homme avec cinq autres militants, dont la directrice d’Amnesty International en Turquie. Ils avaient été arrêtés le 5 juillet alors qu’ils participaient à un séminaire à Istanbul. Au total, neuf Allemands, dont quatre ayant également la nationalité turque, sont actuellement détenus en Turquie. Parmi eux figure notamment le journaliste Deniz Yücel.

Commentant la mise en garde allemande pour les voyages en Turquie, Recep Tayyip Erdogan l’a qualifiée de «malicieuse et sans fondement». Il a aussi rejeté des informations de la presse allemande, confirmées par M. Gabriel, selon lesquelles Ankara avait remis à Berlin une liste de 68 groupes allemands ou cadres dirigeants d’entreprises, parmi lesquelles Daimler et BASF, qu’elle accuse de soutien au «terrorisme». «Vous ne pourrez pas ternir l’image de la Turquie», a-t-il dit, en dénonçant ces informations comme «une sinistre propagande».

«RDA»

Berlin a en outre annoncé vendredi un réexamen de ses livraisons d’armement prévues à la Turquie. La «réorientation» des relations avec la Turquie «inclut tous les domaines, y compris la politique en matière d’exportations d’armes», a indiqué un porte-parole du ministère de l’Economie, compétent sur ce dossier, Philipp Jornitz. «C’est pourquoi les demandes d’exportations d’armements font actuellement l’objet d’un réexamen».

Depuis janvier 2016, et particulièrement suite aux purges massives engagées en Turquie après la tentative de putsch du mois de juillet l’an dernier, l’Allemagne a déjà bloqué 11 demandes d’exportations d’armes à la Turquie. Après le renforcement de la mise en garde pour les voyages, les deux chaînes de télévision allemandes d’information en continu, n-tv et N24, ont annoncé vendredi l’arrêt de la diffusion de publicités de promotion de la Turquie sur leur antenne.

Le ministre allemand des Finances Wolfgang SchäPhoto : uble, poids lourd du gouvernement d’Angela Merkel, est lui allé jusqu’à comparer la Turquie d’Erdogan à la dictature communiste en RDA jusqu’en 1989. «La Turquie procède désormais à des arrestations arbitraires et ne respecte pas les règles consulaires minimales, cela me rappelle la situation qui existait autrefois en RDA», a dit M. Schäuble au journal Bild, «quand tu te déplaçais là-bas, les choses étaient claires: s’il t’arrivait quelque chose, personne ne pourrait rien pour toi».

Les rapports turco-allemands s’étaient fortement tendus au début du printemps lorsque des villes allemandes avaient interdit la tenue de rassemblements dans le cadre de la campagne pour le renforcement des pouvoirs de M. Erdogan par référendum. L’Allemagne compte la plus importante diaspora turque, avec environ 3 millions de personnes. Début juin, Berlin a décidé de retirer ses troupes déployées sur la base turque d’Incirlik, en réaction à l’interdiction faite aux parlementaires allemands de se rendre sur cette base de l’Otan, où quelque 260 soldats de la Bundeswehr participent aux opérations de la coalition internationale antijihadistes contre le groupe Etat islamique en Syrie et en Irak.

La Turquie accuse pour sa part l’Allemagne de tolérer la présence sur son sol de putschistes impliqués dans le coup d’Etat manqué de juillet 2016 et de séparatistes kurdes du PKK, classée organisation terroriste par Ankara et ses alliés occidentaux.

Le Quotidien/AFP

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