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Roodt-sur-Syr : hiver comme été, il fait toujours 37 degrés chez « le Fernand »…


«Un Ribatejano, il n'a pas peur, il ne baisse pas la tête !» Et en plus, il fait du bon café. (photo Didier Sylvestre)

Quel caractère ! Tout le monde connaît «le Fernand» à Roodt-sur-Syr, patron du bar « le Fern 37 ». Fernand Gonçalves est une personnalité. Rugueux, chaleureux, légèrement obsédé par les chiffres… et plein d’humanité.

On fait parfois des rencontres étonnantes, dignes d’un roman, des rencontres qui vous tombent dessus sans crier gare. Comme Fernand, dont le prénom suffit à Roodt-sur-Syr quand on demande son chemin. «Le Fernand», plus précisément, tient un café non loin de la voie ferrée.

Après un rapide coup d’œil, on se rend compte qu’on est cerné par le chiffre 37. Ici le Pastis 51 s’appelle Pastis 37, le café ouvre à 10h37, la porte est marquée du numéro 37, le bar lui-même s’appelle «le Fern 37»… angoisse. Non sans émotion, notre chaman portugais (son regard transperçant est impressionnant) s’est confié sur cette obsession.

«Ce chiffre symbolise ma réussite», glisse-t-il. Un numéro gagnant du Loto ? Pas exactement. En 1978, le Fernand quitte son Portugal natal. «C’était un 28 août, j’ai encore le billet de train. Je suis monté à Paris sans rien, sans argent. J’avais 18 ans.» Le début d’une nouvelle vie. La peur au ventre aussi. «Il y avait un impératif de travailler, vous n’imaginez pas… mais mon métier avait disparu avec le trajet !» Depuis ses treize ans, Fernand travaillait le bois en tant que tourneur. «Je fabriquais toutes sortes d’objets sur mesure, même des balles de baby-foot», lâche-t-il avec un sourire.

En France, la modernité avait déjà investi les salons et, sauf dans le haut de gamme, le sur-mesure n’était plus de rigueur. Pas de quoi décourager le natif de Pernes. «Un gars de chez nous, il n’a pas peur, il ne baisse pas la tête. C’est un Ribatejano !», lance le Fernand avec aplomb. Il trouve un métier qui fera sa fierté. Il est embauché chez Citroën à Clichy, la prestigieuse marque aux chevrons. «J’étais contrôleur de qualité, je gravais un numéro sur tous les moteurs vérifiés. Le numéro 37. Un jour, je suis rentré au Portugal et en ouvrant le capot d’une 2 CV, je suis tombé sur mon numéro. Vous ne pouvez pas savoir ce que j’ai ressenti.»

Chaleur humaine

Cet amour du travail l’a poussé jusqu’au Luxembourg par la suite. «Je suis arrivé en 1991, j’ai fait toutes sortes de métiers. Ce café, c’est une histoire de coup de cœur. Je sens les bons plans vous savez ! C’était à revendre, j’ai dit à un ami dans l’immobilier : celui-là, il me le faut.»

Le café du Fernand est une véritable auberge espagnole (disons portugaise…). Jeu de quilles, babyfoot, fléchettes, retransmission des matches, lecture : «Chez moi, tout le monde est le bienvenu, je ne veux pas qu’il n’y ait que des Portugais. J’aime bien la diversité, j’ai des super relations avec tout le monde au Luxembourg.» Il aime son pays d’adoption, au point de suivre la DN autant que le championnat portugais, sinon mieux ! Il ne cesse de se réinventer, d’un point de vue professionnel, pour ne pas perdre sa mentalité rugueuse de battant. «J’ai appris à faire les pizzas récemment, vous en voulez une ?»

On repassera. Pour une pizza, un crémant luxembourgeois (les bouteilles sont marquées «Fern 37») ou des sardines grillées. Chez le Fernand, c’est la chaleur humaine qui domine, hiver comme été, il fait toujours 37 degrés.

Hubert Gamelon

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