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[Portraits d’artistes] Jhemp Bastin au naturel


Depuis 18 ans, le sculpteur Jhemp Bastin transforme les troncs d'arbre en œuvres d'art. (Photo : Didier Sylvestre)

Après avoir travaillé le métal ou encore le papier mâché à ses débuts, le sculpteur de 48 ans s’exprime uniquement par le bois depuis 18 ans.

Après une révélation au milieu de la forêt ardennaise, Jhemp Bastina choisi les troncs d’arbres comme «partenaires» pour s’exprimer.

La forte odeur du bois se mélange à celle du brûlé, les troncs bruts côtoient les œuvres en cours et celles terminées, la tronçonneuse et le chalumeau ont une place de choix, les fenêtres offrent une vue magnifique sur la forêt avoisinante et la musique jazz de Hadouk Trio ajoute à l’ambiance apaisante du lieu. Bienvenue dans l’antre de Jean-Paul Bastin, dit Jhemp.

Après un dialogue avec le tronc, Jhemp Bastin se lance dans la découpe...

Après un dialogue avec le tronc, Jhemp Bastin se lance dans la découpe…

Niché sur les hauteurs de Büderscheid, situé entre Wiltz et Esch-sur-Sûre, l’atelier de l’artiste de 48 ans est tout simplement un havre de paix. « C’est mon univers , dit Jhemp Bastin. Ici, toutes mes pensées sont axées sur mon travail et en même temps je garde un lien vers l’extérieur et la nature. »

Les débuts d’artiste étaient bien loin de cet univers. Il a développé sa fibre artistique au cours de son adolescence au contact de Georges Fautsch, son professeur d’art au lycée classique de Diekirch. «J’ai fait mes premiers modelages à 16-17 ans , raconte-t-il. Manipuler de la matière m’a attiré naturellement. Pendant l’année de mon bac, c’est devenu une évidence. »

Il se perfectionne ensuite à l’Académie royale des beaux-arts de Bruxelles et à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris. La sculpture devient son terrain de travail, le métal et le papier mâché ses (premières) matières de prédilection. « Je travaillais surtout sur le corps humain et les formes abstraites », indique Jhemp Bastin.

«Un dialogue s’installe entre le tronc et moi»

Et puis, tout bascule en 1997. Jhemp Bastin, sa femme Pia et leurs deux enfants, Svenia et Cédric, quittent Bockholtz pour emménager à Büderscheid. « Je suis né dans la forêt, j’ai toujours eu une attirance pour le bois, mais je n’avais pas l’outil , confie l’artiste. Et ici, j’ai découvert la tronçonneuse, qui m’a permis d’aborder le bois de manière artistique. Elle laisse des traces, elle est brutale, elle correspond au caractère du bois. Depuis, j’ai une approche artistique plus directe. »

Le processus de création est toujours le même. Après avoir récupéré un tronc de chêne, hêtre ou de robinier – « des arbres abattus pour des raisons forestières », précise-t-il – Jhemp Bastin s’assied dans le fauteuil de son atelier et « un dialogue s’installe entre le tronc et moi », affirme-t-il. « Chaque tronc est différent et il faut bien le connaître avant de l’attaquer , poursuit-il. Au final, nous sommes deux à décider. Le bois est un partenaire d’égal à égal. »

... puis, après quelques mois de séchage, l'heure des finitions est venue.

… puis, après quelques mois de séchage, l’heure des finitions est venue.

Ensuite, les découpes horizontales et verticales en différentes géométries s’enchaînent avec « l’idée de ne pas dénaturer l’arbre, de trouver la bonne combinaison entre la matière organique et la géométrie ».

Puis vient le temps de séchage avant de passer aux finitions au chalumeau, notamment pour apporter une autre couleur naturelle (le noir essentiellement). « J’ai besoin de plusieurs semaines, voire mois, pour faire une œuvre », souligne Jhemp Bastin. Et l’inspiration, l’artiste la trouve « dans le travail qui s’enchaîne et dans (ses) promenades dans la forêt ardennaise ».

Auprès des jeunes également. En parallèle à son travail d’artiste, il entame, en septembre 1988, une carrière d’enseignant au lycée agricole d’Ettelbruck. Il y est toujours (à mi-temps depuis 1998). « C’est complètement différent de mon travail d’artiste , confie-t-il. Je leur enseigne le dessin, la peinture et la sculpture sur bois. C’est important pour moi de transmettre. Mon but n’est pas d’en faire des artistes, mais c’est fantastique de les voir évoluer. Leur façon de travailler, leurs idées, leur vivacité m’inspirent. » Il tire aussi son inspiration des conversations qu’il a avec les personnes qui viennent voir ses œuvres lors des expositions. « Sortir les sculptures, les confronter à l’opinion des gens, c’est important , estime Jhemp Bastin. Par le biais de mes œuvres, je recherche un dialogue avec les gens. Je m’inspire de ce partage aussi pour faire évoluer mon travail. »

Résultat : depuis 18 ans, l’artiste est resté fidèle au bois. Et cela devrait durer encore quelques années. « Pour le moment, je n’ai pas l’intention de changer de matière , assure Jhemp Bastin. Et j’ai encore des choses à faire et à dire. »

L'apaisant atelier de Jhemp Bastin est niché sur les hauteurs de Büderscheid et est propice à la création.

L’apaisant atelier de Jhemp Bastin est niché sur les hauteurs de Büderscheid et est propice à la création.

Guillaume Chassaing

Durant le mois de septembre, Le Quotidien vous propose de découvrir, chaque jeudi, le travail d’un artiste luxembourgeois.

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