Allons-nous voyager cet été ? Rien n’est moins sûr. Alors pourquoi ne pas découvrir les endroits insolites en pleine nature comme le parc industriel, naturel et ferroviaire Minett Park ?
L’an dernier, #VakanzDoheem c’était un hashtag pour lancer une action de promotion du secteur touristique luxembourgeois. Cette année, face à la pandémie de Covid-19, c’est devenu un mot d’ordre. Le bon exemple à suivre. Le Luxembourg n’est peut-être pas une destination exotique, mais il regorge d’endroits qui valent le détour le temps d’un week-end ou d’une journée. Suivez-le guide !
Un parfum humide de noisettes fraîches se confond avec l’odeur grasse du fer si caractéristique du sud du pays. Au loin, un train à vapeur siffle de grosses volutes de fumées pour prévenir de son arrivée imminente en un galop régulier de traverse de chemin de fer en traverse de chemin de fer. Sur l’unique quai de la petite gare du Fond-de-Gras, on en perdrait presque la notion du temps. On se trouve projeté quelque part entre la fin du XIXe siècle et les années 1970 lorsqu’une poignée de passionnés ont ressuscité cet ancien site industriel encaissé dans une vallée paisible, perdue à deux pas de la frontière française.
Un bon filon
Une énorme locomotive noire et rouge en a fait la renommée. De nombreuses autres ont suivi. Elles sillonnent, passagers à leur bord, l’ancienne ligne des Minières entre Fond-de-Gras et Pétange en témoignant de manière ludique de l’histoire d’une région. Presque toutes ont servi pendant de longues années – plus de 70 ans pour le «Train 1900» – sur un des grands sites sidérurgiques du pays. Chouchoutées par l’association du même nom, elles vivent une retraite dorée à l’abri des hangars du site. Certaines, mangées par le temps et la rouille, en cours de restauration, reposent sur les voies qui mènent au site.
Le filon étant trouvé, une autre association a mis un projet sur les rails visant à transporter les visiteurs au cœur de l’histoire du site, la Minièresbunn. Une petite locomotive qui extrayait les wagons de minerai de fer des profondeurs du site au début du siècle dernier, conduit les visiteurs jusqu’au carreau de la mine Doihl à Rodange avant de descendre sous terre pour rejoindre Lasauvage (l’un des plus anciens sites sidérurgiques luxembourgeois avec sa forge construite en 1625) puis Saulnes en France, et retour vers l’ancien site exploité depuis 1873. Dernière activité en date proposée sur le site, les très ludiques draisines mènent les sportifs jusqu’au Doihl.
Témoins clés
Les gisements de minerai de la région étaient déjà exploités par les Celtes qui ont établi un riche oppidum sur le Titelberg, dont les vestiges sont à découvrir non loin du site classé monument historique en 1986. À la fin du XIXe siècle, Fond-de-Gras était devenu un des sites miniers les plus importants du sud du pays. À travers les bâtiments subsistants, comme les hangars, les anciens dortoirs ou l’épicerie dont un des tiroirs porte l’inscription «polenta», il raconte la vie des ouvriers, les débuts de l’immigration, l’industrie de l’époque.
L’intérêt du site du Fond-de-Gras est donc multiple. Il a également été choisi par le Service des sites et monuments nationaux pour accueillir un train de laminage, utilisé entre 1913 et 1989 à Esch-Belval, élément indispensable dans le processus de fabrication de rails et de profilés. De nombreux vestiges jalonnent le chemin qui mène de la gare du Fond-de-Gras au très typique restaurant «Bei der Giedel», fréquenté dans la région depuis des générations pour sa décoration qui n’a pas bougé depuis près d’un siècle. Il peut être une étape sur une des nombreuses promenades sur le Titelberg, le long des entrées d’anciennes galeries ou vers la réserve naturelle du Giele Botter, une ancienne mine à ciel ouvert où la nature a repris ses droits sur la terre rouge. Une découverte qui vaut le détour.
Lasauvage ne fait plus peur
Intimement lié à l’histoire du Fond-de-Gras, le village minier de Lasauvage a tiré un trait sur sa mauvaise réputation pour mettre l’accent sur ses richesses et son passé sidérurgique. La légende de la femme sauvage qui terrorisait le hameau a été supplantée par les réalisations du comte de Saintignon. L’industriel français a développé le village pour améliorer la qualité de vie de ses salariés au retour de la mine. On peut y visiter les infrastructures du carreau de la mine, dont la salle des pendus et deux musées, l’église Sainte-Barbe (actuellement fermée pour restauration) et les étangs ou passer la nuit à l’hôtel-restaurant Le Presbytère. En raison de travaux d’infrastructures routières, le moyen le plus simple de s’y rendre est d’emprunter la Minièresbunn.
Si l’épidémie de Covid a freiné les activités du Minett Park, il n’en reste pas moins un endroit agréable et riche à découvrir ou à redécouvrir seul ou en famille. Immuable et inscrit dans une époque pas si lointaine, le site évolue par touches. Les prochaines évolutions devraient très prochainement être un bureau d’accueil et à terme un centre pédagogique pour transmettre mieux encore la valeur culturelle et sociale de ce site unique.
Sophie Kieffer