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[Dossier] Luxembourg : les arbres parés pour résister à la chaleur


La Ville cherche les moyens de conserver un maximum d'arbres en milieu urbain, malgré les canicules (Photo : Anne Lommel).

La nature souffre du réchauffement climatique et de la sécheresse. Le service parcs de la capitale a anticipé ce problème depuis des années, notamment en diversifiant les essences d’arbres.

« Tout le monde parle des conditions climatiques et on essaye de réagir depuis longtemps déjà », explique Roland Kirch, le responsable de la section Arborescence auprès du service parcs de Luxembourg. «Il n’y a pas seulement le changement climatique, les arbres des rues souffrent aussi beaucoup de la sécheresse. C’était le cas il y a 20 ans, c’est toujours le cas aujourd’hui, mais avec les fortes températures, le besoin a encore augmenté.» Il y a une quinzaine d’années, Roland Kirch a eu le nez fin pour changer de stratégie en diversifiant les essences. Plus question comme c’était souvent le cas autrefois de voir toute une rue avec un seul type d’arbre, le meilleur moyen pour qu’une maladie ou un parasite se propagent rapidement.
Le responsable des arbres suit de près les études qui sortent dans les pays voisins en «Suisse, Allemagne, Angleterre. Ils font des essais pour voir quels sont les arbres qui résistent aux fortes températures.»

Augmenter le volume de terre

D’autant que le macadam et le manque de verdure augmentent encore la température en milieu urbain. «On le sait moins, mais en hiver aussi il y a de la sécheresse (hors période de gel)», poursuit Roland Kirch. «Ces épisodes de sécheresse sont très néfastes, notamment pour les pins (exemple : pins noirs et pins sylvestre) et les épicéas qui gardent leurs épines toute l’année, tout comme les arbres, arbustes ou plantes à feuillage persistant qui ont besoin d’eau tout l’hiver.»

Sans eau, les arbres peuvent survivre mais perdre leur vitalité et devenir sensibles. Ils laissent alors la porte ouverte aux attaques parasitaires et aux maladies (comme par exemple l’épicéa avec le scolyte). Autre difficulté qui s’ajoute pour les arbres, les nappes phréatiques baissent, une tendance plus ou moins problématique selon le sol : «S’il y a des rochers dessous, comme dans plusieurs endroits de la capitale, les racines ne peuvent pas s’enfoncer profondément. Si le sol est plus lourd, argileux, il va retenir l’eau plus longtemps dans ses alvéoles. Si le sol est sablonneux, l’eau est au contraire facilement drainée.»

La bonne essence au bon emplacement

Le chef de service sort des catalogues (notamment en provenance des Pays-Bas) où sont listés les arbres qui résistent aussi bien au gel qu’à la sécheresse. Dans la ville de Hambourg, au Danemark, en Belgique, en Allemagne ou en France ces arbres sont mis à l’essai. «Certains vieux arbres meurent, pas seulement dans les rues mais aussi dans les parcs. Pour éviter cela, il faut avoir la bonne essence au bon emplacement, selon la terre, l’ombre…», souligne Roland Kirch.

L’autre mesure importante pour parer à la fois à la sécheresse et à la chaleur, c’est augmenter le volume de terre des arbres : «Plus il y a de substrat, plus la teneur en humidité est importante. En Allemagne, on préconise de mettre 12 m3 de terre. Actuellement, nous en mettons entre 8 et 12 m3 et nous allons essayer de passer de 15 à 18 m3 de terre», complète le responsable de la section Arborescence.
Dans les plus petites rues, des essences à la ramure plus étroite, qui sont donc moins exposées à la chaleur, sont choisies. Cela évite aussi d’avoir à tailler sans cesse un arbre destiné à grossir davantage.
Les essences qui résistent au défi des nouvelles conditions météorologiques sont appelées «arbres climatiques». Parmi eux, on retrouve le noisetier de Byzance (il y en a actuellement 214 dans la capitale), l’aulne, ou encore le chêne à feuilles de châtaignier (qu’on peut retrouver dans une rue du quartier Cents). Le magnolia et les tilleuls peuvent également désormais être plantés dans les endroits les plus chauds.
Du côté des plantes, les vivaces vont être privilégiées au détriment des plantes annuelles beaucoup plus gourmandes en entretien. Actuellement, beaucoup d’entre elles nécessitent un arrosage régulier, elles seront dorénavant sélectionnées pour être plus résistantes sans eau.

Audrey Libiez

Vingt et un mille arbres choyés dans la ville
et bientôt 1 500 de plus

La commune de Luxembourg est la seule du pays à posséder un cadastre où les arbres sont tous répertoriés», explique Serge Wilmes premier échevin de la Ville de Luxembourg, notamment en charge des parcs et espaces verts, plantations publiques.
La carte d’identité de chaque arbre est enregistrée dans le système. On y trouve des informations telles que la date de plantation, les dates des tailles, les maladies, ses dimensions, etc.
En tout, 21 000 arbres sont recensés par les trois contrôleurs du service des parcs.
Depuis 1991, un inventaire des arbres, qui était d’abord manuscrit, est fait. Il est devenu informatisé en 1995. La Ville va bientôt une nouvelle fois changer de logiciel afin d’avoir des données encore plus précises, des statistiques plus poussées.

Tout faire pour que la ville « reste verte »

La santé des arbres est scrutée à la loupe par le service des parcs et Serges Wilmes insiste : «La Ville aime les arbres, ils sont importants pour nous depuis longtemps et le resteront. Nous nous donnons les moyens de bien nous en occuper, ce cadastre en est la preuve. Nous faisons tout pour que la ville reste verte, et même encore plus verte, martèle l’échevin. Des années en arrière, personne n’était ému lorsqu’on coupait un arbre. Désormais, il y a une prise de conscience des particuliers et même des entrepreneurs qui pour certains coupaient facilement les arbres. À chaque arbre qu’on enlève aujourd’hui, nous avons une levée de boucliers, par exemple avenue de la Liberté et boulevard Roosevelt, et c’est très bien que les gens s’en inquiètent. Mais il faut savoir que nous ne coupons jamais un arbre sans avoir étudié toutes les autres possibilités (comme le déplacer). Nous le faisons quand nous n’avons vraiment pas le choix et systématiquement un autre arbre est planté comme le prévoit d’ailleurs la loi.»
Sonja Fandel, cheffe du service des parcs, assure que la commune va même aller plus loin en augmentant le nombre d’arbres total :
– 800 arbres devraient être plantés au quartier Kiem au Kirchberg.
– Entre 200 et 300 dans le nouveau quartier du Ban de Gasperich.
– Au moins 500 arbres dans le nouveau parc du Ban de Gasperich.
Bien sûr, ce seront des arbres adaptés au nouveau climat.
«Avoir des arbres, c’est important pour le climat, reprend Serge Wilmes. Les discussions autour de ce sujet ont permis à la population de prendre conscience de ça. Mais c’est aussi important pour le confort de vie.» Sonja Fandel, renchérit : «Il y a un microclimat sous un arbre, c’est plus frais, plus agréable en été.»

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