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Un siècle plus tard, la Meuse dernière terre de soldats américains


Avec 14 246 hommes enterrés, la Meuse abrite la plus grande nécropole américaine d'Europe pour les deux guerres mondiales. (photo AFP)

Cent ans après l’entrée en guerre des États-Unis, dans une terre de Meuse imprégnée par Verdun, quelques passionnés font tout pour maintenir la mémoire des soldats américains tombés sur le front de l’Est de la Grande guerre.

C’est un petit bloc de granit à l’entrée d’un village de 60 habitants en Meurthe-et-Moselle. Trois noms y sont gravés : le Caporal Gresham, 24 ans, et les soldats Hay, 21 ans, et Enright, 20 ans, furent les premiers Américains tombés pour la France, à l’automne 1917. Au total, des centaines de milliers d’hommes vinrent se battre sous l’uniforme américain en Europe. Un peu plus de 100 000 y laissèrent leur vie.

Mais ces trois jeunes hommes tombés non loin du village de Bathelémont, dans un coin de Meurthe-et-Moselle, à une vingtaine de kilomètres à l’est de Nancy, furent les premiers. Appartenant au 16e régiment d’infanterie, ils étaient arrivés en France quelques semaines après l’annonce de l’entrée en guerre des États-Unis, le 6 avril 1917. L’assaut allemand, dans la nuit du 2 au 3 novembre, n’a duré que quelques minutes, mais, comme ailleurs durant la Grande guerre, il a été précédé par des milliers d’obus tombés sur les Américains venus rejoindre le 33e régiment d’artillerie français. Un autre monument devrait être bientôt érigé à l’endroit même où ils sont morts, un peu plus haut vers le bois.

Plus grande nécropole américaine d’Europe

Leurs corps furent rapatriés aux États-Unis dès 1921. Mais des milliers d’autres ont été enterrés en Lorraine, un peu plus haut, au cimetière américain de Romagne-sous-Montfaucon. Avec 14 246 hommes enterrés, la Meuse abrite la plus grande nécropole américaine d’Europe pour les deux guerres mondiales. Des croix blanches à perte de vue, sur une pelouse immaculée.

Le cimetière, géré par la Commission américaine des Monuments de Guerre, accueille environ 38 000 visiteurs par an, en très grande majorité des Français, explique David W. Bedford, son directeur. « Il y a eu un peu plus d’Américains cette année, et probablement aussi l’année prochaine, mais il y a une mauvaise connaissance de la Première guerre mondiale aux États-Unis », admet le directeur. « Parce que l’on est arrivés à la fin de la guerre, et parce que nous n’avons pas perdu beaucoup d’hommes. Et plus de 15 000 ne sont pas tombés au combat, mais sont morts de la grippe espagnole ». « En France, vous connaissez tous quelqu’un dans votre famille qui a été blessé au combat ou est mort sur le champ de bataille. Nous, nous n’avons rien de comparable », estime David W. Bedford.

« L’Histoire, on ne la connait pas »

C’est d’ailleurs avec un Français qu’il est le plus fascinant de visiter ce cimetière. Jean Marie, la moustache aussi blanche que les croix qui s’étalent sur les 52ha du cimetière, est le président du souvenir français de Dun-sur-Meuse. Depuis plusieurs années, cet ancien militaire originaire de Verdun s’est pris de passion pour le destin des Américains dans la guerre. « Je suis tombé dans une brocante sur un livre qui racontait l’histoire des Américains, et cela m’a intéressé », parvient-on à saisir au milieu des mots qui se pressent pour raconter mille et une anecdotes. « Ici, le cimetière de Romagne, tout le monde le connait. Mais l’Histoire, on ne la connait pas », ajoute celui qui s’inquiète de chaque exhumation, chaque cérémonie.

Alors il a monté un petit musée avec le Souvenir français: une salle, une vingtaine de panneaux, tous faits par ses soins, sur lesquels se déroule l’histoire des Américains dans la guerre. Dans le cimetière, il vous emmène tout droit vers deux croix, celles de deux frères : l’un est mort sous l’uniforme français, il s’était engagé de son plein gré, avant la mise en place de la conscription. Croix de guerre, est-il mentionné sur sa tombe. L’autre est arrivé avec le gros des troupes, et est mort en portant l’uniforme américain. Des histoires comme ça, Jean Marie en a plein. Même s’il cherche encore à boucler celle de trois soldats, ceux dont il a découvert l’histoire dans le livre qui a lancé sa passion. Il est parvenu à suivre leur trace pendant plusieurs années, mais elle s’arrête. Vivants ou morts à la fin de la guerre ? Il l’ignore. « Si vous trouvez, vous me le dites ? ».

Le Quotidien/AFP

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