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Thionville : une rue théâtre d’un trafic de stups à ciel ouvert


Le city-stade de la rue Molière constitue l’épicentre d’un trafic de drogue de longue date. (Photo RL /Armand Flohr)

L’installation de deux caméras de surveillance, en août dernier, n’aura pas résisté longtemps à la détermination des trafiquants de drogue. La peur et une profonde lassitude imprègnent les murs des bâtiments de la rue Molière, dans le quartier de la Côte des Roses : « C’est devenu invivable », souffle une résidente.

Juin 2021 : l’éternel débat sur les bienfaits supposés de la vidéosurveillance revient sur la table du conseil municipal. Ce jour-là, il est question d’acter l’installation de deux caméras de vidéoprotection , rue Molière, dans le quartier de la Côte des Roses. La demande émane de Batigère. Le bailleur social entend endiguer un trafic de stups enraciné de longue date au city-stade ainsi qu’aux abords de l’un de ses immeubles.

La majorité accède à la requête : « Dans cette rue, il y a de la drogue et c’est de notre responsabilité de surveiller », insiste notamment Christiane Zanoni, adjointe dévolue aux questions de sécurité. « Les caméras sécurisent les lieux mais déplacent le problème ailleurs. Cela n’apporte rien à la lutte contre la délinquance », objecte l’opposante Brigitte Vaïsse.

Dans les faits, personne n’aura raison. Le trafic n’a pas ralenti et ne s’est pas déplacé : il prospère toujours dans cette partie reculée du quartier…

Caméras cassées deux jours après leur installation

3 août 2021 : sous protection policière, les deux objectifs inquisiteurs sont déployés sur le toit du bâtiment. Le 5 août, deux jours plus tard donc, le système de protection n’émet plus aucun signal : « Ils sont parvenus sur le toit en passant par une trappe de désenfumage », déplore Laurent Cavalieri, le responsable de la police municipale.

« Ils » n’ont jamais été retrouvés. Pourtant, « ils » n’ont pas pris soin d’œuvrer dans la discrétion ce soir-là : « J’ai tout vu, tout entendu. Je rentrais de vacances, ils ont cassé les caméras à coups de marteau, témoigne, sous couvert d’anonymat, une résidente. Entre habitants, on avait même parié combien de jours tiendrait le dispositif. »

Résignée, fataliste, elle décrit la scène qui se joue en ce moment même sous ses yeux : « Là, maintenant ? Ça trafique au city. À visage découvert, en toute impunité. »

« Aujourd’hui, plus encore qu’hier, on éprouve un sentiment d’abandon »

Plus de deux décennies que notre témoin voit de la drogue irriguer le cœur de la Côte des Roses : « J’en serais presque à regretter l’ancienne génération. Ils trafiquaient plus discrètement et sans manquer de respect aux habitants », juge-t-elle en mesurant la portée de son propos. La nouvelle génération se montrerait plus sauvage : « Ils hurlent la nuit, incendient les véhicules parfois. Je parle en connaissance de cause : ma voiture a été vandalisée. »

On la questionne sur le rôle de la police : « Quand il y a une patrouille, des guetteurs, très jeunes, alertent les trafiquants. De toute manière, personne n’ose porter plainte. Aujourd’hui, plus encore qu’hier, on éprouve un sentiment d’abandon. » « Ce secteur se prête bien à la fuite », reconnaît Laurent Cavalieri.

Quelle solution ?

Une impasse. Comment soigner la rue Molière, qui n’a rien d’un malade imaginaire ? Les politiques préventive et répressive ne semblent pas avoir de prise sur ce trafic enraciné dans le quotidien du quartier.

Pour Christiane Zanoni, pas question toutefois de baisser les yeux. La voie de la vidéosurveillance pourrait une nouvelle fois être explorée : « On réfléchit à remettre des caméras à des endroits où ils n’auraient pas accès. » « Ils » ont pourtant de la ressource…

Jean-Michel Cavalli (Le Républicain Lorrain)

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