Thionville-centre : 5 raisons d’avoir peur de SuperGreen

L’ouverture du nouveau parc commercial de Terville suscite beaucoup d’inquiétude chez les commerçants du centre-ville de Thionville, déjà en grande difficulté. Voici pourquoi.

Ne parlez pas des zones de périphérie aux commerçants du centre-ville de Thionville, ça leur donne des boutons. À l’occasion d’une réunion de commerçants organisée par la mairie lundi soir, la tension est même montée en flèche lorsque la représentante d’un grand centre commercial du Linkling a pris la parole.

Il faut dire qu’ils n’en peuvent plus, les commerçants. Après Geric, les Linkling 1, 2 et 3, ils doivent maintenant affronter une nouvelle concurrence, celle de SuperGreen, le nouveau parc commercial de Terville. « C’est la goutte d’eau qui va faire déborder le vase, se plaint un commerçant qui tient à rester anonyme. C’est déjà très difficile de subsister aujourd’hui, je crains que ça ne devienne impossible. »

Les commerçants du centre-ville ont au moins cinq raisons d’être inquiets.

1. Un concept qui s’inspire du centre-ville

« On a rassemblé, dans un même concept, le meilleur du commerce de centre-ville et le meilleur du commerce de périphérie », déclare Mathieu Mollière, le directeur de la communication, du marketing et de l’innovation du groupe Frey, l’opérateur de SuperGreen. Le meilleur de la périphérie, c’est facile : le parking gratuit et l’accessibilité par l’autoroute. Le meilleur du centre-ville, c’est cette grande rue piétonne dans laquelle on peut flâner librement de boutique en boutique.

Ce sont aussi ces jeux pour enfant, ces bancs, ces terrasses de café. Cet esprit « marché » avec Grand Frais également. Bref : Frey a réussi l’exploit de créer ex nihilo une expérience de shopping très proche de celle qu’offre un centre-ville piéton. Le maire Patrick Luxembourger s’en amusait d’ailleurs au moment de l’ouverture : « On a recréé la rue Serpenoise à Terville. » Le parking gratuit en plus.

2. Des enseignes qui sont les mêmes

Jusqu’à présent, les enseignes présentes dans les zones commerciales de périphérie étaient souvent identifiées « low cost » et donc peu concurrentielle pour l’hypercentre. Les enseignes prestigieuses préférant, pour leur image de marque, s’implanter en rue piétonne ou en centre commercial.

Sauf qu’avec son concept très qualitatif, Frey a réussi, comme Waves à Metz, à attirer des enseignes qui étaient jusque-là des fidèles des centres-villes. C’est le cas d’Armand Thierry, de Promod ou encore de Jacqueline Riu. « Nous voulions ces enseignes qui tirent le parc vers le haut », admettent d’ailleurs les responsables de Frey. Résultat : SuperGreen devient un concurrent direct du centre-ville.

3. Des surfaces adaptées aux besoins des enseignes

C’est une donnée que l’on ignore souvent mais qui est très importante dans l’immobilier commercial. Avec ses immeubles anciens et ses petites rues étroites, le centre-ville est essentiellement composé de petites cellules commerciales. Elles font rarement plus de 100 m².

« Or, les marques qui accélèrent leur développement en France aujourd’hui sont à la recherche de surfaces plus importantes, d’au moins 150 m², explique un professionnel de l’immobilier commercial. Et c’est exactement ce qu’offre SuperGreen. De quoi concurrencer le centre-ville dans sa capacité à attirer de nouvelles enseignes. »

4. Des loyers attractifs

Les loyers pratiqués à Supergreen sont en moyenne 1,5 à 2 fois inférieurs à ceux pratiqués au centre-ville de Thionville. Ceux qui souhaitent créer un commerce dans l’agglomération pourraient donc jouer la prudence en préférant la périphérie au centre-ville.

5. Un effet nouveauté

Si les commerçants thionvillois sont inquiets, c’est aussi parce qu’ils ont besoin de doper leur chiffre d’affaires rapidement. Ils sortent d’un printemps morose plombé par le manque d’animations résultant de l’annulation de l’élection municipale.

Mais à en juger par l’exceptionnelle fréquentation de SuperGreen samedi dernier (20 000 visiteurs), l’effet nouveauté semble fonctionner à plein régime. Et un client qui passe son après-midi à SuperGreen n’est pas en centre-ville…

Anthony Villeneuve (Le Républicain Lorrain)