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1877 : la cathédrale Saint-Étienne de Metz s’embrase


Quelques flammèches de fusées tirées la veille en l’honneur de l'empereur Guillaume 1er se sont probablement insinuées entre les interstices des ardoises du toit ou dans l’ouverture des lucarnes. (photo collection Christian Fauvel/RL)

Traversant les siècles, nombre de cathédrales et de grands édifices ont connu le sort de Notre-Dame de Paris. Détruits par le feu, les guerres, les éléments, la plupart se sont redressés et continuent de rayonner. C’est le cas de la cathédrale Saint-Étienne de Metz qui s’embrasa une nuit de 1877.

Le 7 mai 1877, au début de l’annexion de l’Alsace-Lorraine, l’empereur Guillaume Ier est en visite à Metz. L’illumination de la cathédrale par des feux de Bengale et un feu d’artifice clôturent les festivités le 6 mai au soir. Une minute ou deux après la sonnerie de quatre heures le lendemain matin, un premier coup de tocsin retentit.

Quelques flammèches de fusées tirées la veille en l’honneur de Guillaume 1er se sont probablement insinuées entre les interstices des ardoises du toit ou dans l’ouverture des lucarnes.

Une charpente de 1468

Un germe incendiaire s’est ainsi immiscé dans les combles formés de charpentes en bois datant de la dernière reconstruction de la toiture en 1468.

L’incendie se déclare. La toiture s’embrase. Et comme ce fut le cas à Paris pour Notre-Dame ce lundi 15 avril 2019, les secours sont désarmés. «Comme aujourd’hui, les pompiers ne maîtrisaient pas la propagation de l’incendie. L’architecte de l’époque, Paul Tornow, parlait pour Metz d’une ‘absolue impossibilité d’agir’. Je trouve que c’est assez similaire à ce qu’on a vécu ce lundi soir. Les moyens paraissent dérisoires face à une charpente qui s’enflamme à une telle hauteur», explique Rafael-Florian Helfenstein, architecte du patrimoine originaire de Saint-Avold.

Une charpente particulière et un architecte sous influence

Au bout de six heures de lutte, il ne reste plus qu’un tas de cendres de la couverture de la cathédrale Saint-Étienne, qui avait une particularité : «C’était une charpente quasiment plate à l’origine. C’était la seule en France.»

Cette toiture sera rehaussée par l’architecte allemand Paul Tornow au moment de sa reconstruction : «Il décide cela parce que dans son schéma de pensée, une cathédrale gothique doit avoir des toitures hautes comme à Amiens et à Chartres, explique Rafael-Florian Helfenstein. Il a sans doute développé une image parfaite de la cathédrale qui a influencé ses interventions. Paul Tornow était un architecte qui avait des idées assez proches de celles d’Eugène Viollet-le-Duc auquel on doit la restauration de Notre-Dame et, notamment, la flèche qui s’est effondrée dans la nuit de lundi. Pour ces architectes du XIXe siècle, la restauration, c’est une façon d’améliorer un bâtiment. De le restituer dans un état parfait.» «Restaurer un édifice, ce n’est pas l’entretenir, le réparer ou le refaire, c’est le rétablir dans un état complet qui peut n’avoir jamais existé à un moment donné», disait Viollet-le-Duc.

Tendre vers un idéal

Poursuivant le même idéal de beauté et d’équilibre que pour les toitures, Paul Tornow redessinera et reconstruira entièrement le portail (1902-1903) de la cathédrale de Metz qu’aujourd’hui tout le monde croit dater du Moyen-Âge.

Retour en 1877… À dix heures du matin, les pompiers sont maîtres de la situation, mais la toiture est détruite. Le reste du magnifique édifice, dont les fondations ont commencé vers 1220, est sauvé…

Paul Tornow

En 1874, l’architecte allemand Paul Tornow a été nommé «architecte en chef de la cathédrale Saint-Étienne» par l’empereur Guillaume 1er. Il n’a que 26 ans. Lorsque la cathédrale brûle, cela fait trois ans que le jeune homme travaille à sa restauration. L’incendie va précipiter l’ouverture du chantier des toitures.

Sont alors engagés les travaux de réparation. Paul Tornow établit un diagnostic de la structure : des voûtes, des mortiers, des pierres… La pierre de Jaumont devient rouge sous l’effet de la chaleur quand elle n’éclate pas. On peut en voir quelques-unes dans la cathédrale.

Évacuer les décombres

La première étape est d’évacuer ce qu’il reste des combles. Des débris et des cendres remplissent l’extrados, la partie supérieure des voûtes. Il est déblayé. Ensuite est construite une toiture provisoire et protectrice, entre le 16 mai et le 15 juillet 1877.

La réfection totale du toit s’achève en janvier 1882. La charpente est réalisée en métal en utilisant le système Polenceau qui porte le nom de son inventeur, l’ingénieur français Jean-Barthélémy Camille Polonceau. Elle est ensuite habillée de feuilles de cuivre.

Le nouveau toit n’a pas été reconstruit à l’identique mais avec une inclinaison plus importante de 60 degrés. Les restaurations s’accompagneront de modifications.

520 000 marks

L’empereur financera en partie les travaux de sa poche. Rafael-Florian Helfenstein : « Souvent, les sources indiquent : ‘l’empereur prend sur sa cassette privée’, relève Rafael-Florian Helfenstein. Il y a aussi un appel aux dons. Le coût de l’époque s’élève à 520 000 marks, soit autour de 3,4 millions d’euros. Mais c’est difficile à estimer parce que les ouvriers étaient payés entre 1 et 3 euros€ par jour.»

Thierry Fedrigo et Christian Fauvel/RL

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