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Voler aux riches

Tremblez, riches profiteurs : la justice danoise n’est plus aveugle. Son épée a été affutée, et sa balance attend des excuses sonnantes et trébuchantes. Oui, désormais, les policiers danois vont pouvoir confisquer légalement les biens des demandeurs d’asiles excédant une valeur de 10 000 couronnes (1 300 euros). Tous les biens : les billets comme les bijoux. Enfin, sauf les biens qui ont une «valeur sentimentale». Parce que quand même, jure l’écrasante majorité du parlement danois qui a voté mardi ce projet de loi, on n’est pas des salauds.

Bien sûr, on n’a pas encore trouvé de définition claire de la valeur sentimentale. Par exemple, la déclaration des droits de l’homme a une grande valeur sentimentale pour un petit nombre de personnes, tandis qu’une majorité se torche allègrement avec.

Par contre, c’est amusant, pour les billets de banque, c’est le contraire : une minorité se torche avec, tandis qu’une majorité s’y accroche désespérément.

En tout cas, les fouilles risquent d’être très enrichissantes pour les forces de l’ordre danoises. Car logiquement, ils devront bénéficier au préalable d’une formation de joaillier, d’historien de l’art, d’antiquaire et j’en passe, pour évaluer avec justesse et équité les biens saisis.

Certes, vu la richesse moyenne de la population ciblée, faut pas rêver, l’intérêt financier de cette mesure sera minuscule. Pelliculaire même. Mais les députés danois en ont derrière la tête. Des idées, j’entends. Car derrière l’argument officiel – «mais enfin, ces migrants coûtent cher, c’est normal qu’ils participent à l’effort national», se cachent les véritables peaux mortes qui démangent l’Europe: les xénophobes, populistes et autres «not in my backyard», qu’il faut brosser dans le sens du poil.

Ces derniers ont raison, c’est plus humain de dépouiller les réfugiés: cela leur évite un trop grand dépaysement avec les pays totalitaires qu’ils fuient. Comme une intégration en douceur.

C’est pourquoi je propose que l’on étende ce généreux principe aux exilés fiscaux : à ceux qui se baladent de paradis en paradis, confisquons leurs capitaux excédentaires. Cela leur permettra se sentir abattu fiscalement, et utile socialement. Comme tout le monde.

Romain Van Dyck (rvandyck@lequotidien.lu)

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