Naïveté contre sens critique

Il semble que les réseaux sociaux abaissent le sens critique de leurs utilisateurs. Depuis plusieurs semaines, Facebook est sur la sellette à cause des révélations liées à la société Cambridge Analytica, qui, pour faire simple, a utilisé les données personnelles de millions d’utilisateurs de Facebook. Elle a ainsi établi un profil psychologique et défini les thèmes, les termes et les opinions préférés des utilisateurs, puis a utilisé ces profils psychologiques, pour ne pas dire monétisé, afin de les revendre à des organisations anodines comme une équipe de campagne électorale américaine. Bref, les utilisateurs de Facebook se sentent trahis et les gouvernements de plusieurs pays semblent effrayés de voir qu’il est aussi facile d’influencer les utilisateurs de Facebook, soit quasiment toutes les personnes avec un smartphone ou un ordinateur.

Revenons à la trahison des utilisateurs. La vraie question n’est pas de savoir si Facebook ou Cambridge Analytica ont trahi les utilisateurs, mais plutôt comment un utilisateur peut être surpris par cette «trahison» ? Qui aujourd’hui peut penser qu’en indiquant une donnée personnelle sur internet, celle-ci restera confidentielle ? Qui pense encore qu’il est possible d’utiliser un smartphone sans qu’une multitude de données personnelles soient chaque seconde utilisées ? Comment peut-on penser que de bons Samaritains aient développé des applications pour nous montrer le chemin le plus court, le trafic en temps réel, le nombre de pas que l’on fait par jour ou encore les tendances déco du moment, gratuitement et sans arrière-pensées, seulement pour notre bien-être ? Faut-il encore le répéter : «Si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit.»

Il est également étrange que des citoyens fondent leur jugement sur ce qu’un homme politique déclare sans tenter de comprendre le pourquoi du comment ou encore en se basant sur des informations diffusées sur des réseaux sociaux ou tout simplement sur internet. Cela laisse penser que la naïveté est en train de prendre le dessus sur le sens critique. Une tendance à sans doute mettre en relation avec celle de la baisse du nombre de lecteurs de la presse papier dans le monde.

Jeremy Zabatta