À moins d’un revirement de situation, les terrasses rouvrent le 7 avril ! L’annonce était en elle-même déjà une raison de lever nos verres et de trinquer, depuis le temps qu’on attendait une bonne nouvelle. À nous les apéros avec les collègues, les petits cafés en matinée et le dernier verre avant de rentrer nous confiner à 18h ! Le shoot de dopamine retombé, la joie et l’enthousiasme qui ont suivi l’annonce se sont évaporés aussi sec. Pschiiitt ! Le retour à la réalité a été aussi rapide que le temps d’ouvrir une canette de soda. Les terrasses seront ouvertes de 6h à 18h. Qui, à moins d’être retraité et vacciné, aura le temps d’en profiter ? Et qui est en manque de terrasse au point d’aller s’y installer à 6h du matin avec la polaire et les moufles ? Nous pensions déjà pouvoir nous retrouver entre amis sans nous sentir hors-la-loi, ne plus avoir à nous réfugier dans des arrière-cuisines ou ne plus devoir boire de «cafés rouges» dans des tasses pour conserver un semblant de vie sociale. Il va falloir être stratège pour se regrouper à plus de deux en terrasse à un horaire qui convient à tout le monde…
L’annonce a fait l’effet d’une éclaircie en pleines giboulées de mars. Mais à bien y réfléchir, combien d’établissements, hormis ceux situés sur une place et pouvant étaler leurs terrasses sur plusieurs mètres, vont-ils profiter de cette autorisation ? Le petit bar de quartier qui ne dispose que de la largeur du trottoir et de la longueur de sa façade pour installer trois tables va-t-il prendre la peine d’ouvrir ? Je me suis laissé dire que non. Pas assez rentable. Le secteur de l’Horeca continuera à être perfusé par l’État en attendant que tombe la décision d’un retour à la normale, en espérant disposer de suffisamment de réserves pour tenir jusque-là.
Ce geste d’apaisement du gouvernement envers les citoyens apparaît comme une poire pour la soif bien verte et amère, une sorte de consensus mou qui peine à apaiser les esprits fatigués par un an de sacrifices pour peu de résultats. Alors que la frustration et le découragement s’expriment par un retour des fêtes clandestines – jeunesse s’est passée au parc des Trois-Glands samedi soir avant de fuir vers les faubourgs à l’arrivée de la police –, la mesure du gouvernement qui a le fondement entre deux chaises de bistrot, paraît bien dérisoire face aux besoins de la population et des indépendants. Chef, si vous me lisez, je pose congé le 9 avril pour en profiter, en croisant les doigts pour que la météo soit au rendez-vous !
Sophie Kieffer