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Réglée au respect

À 15 ans, le premier jour de mon premier stage d’étudiant dans l’entreprise où travaillait mon papa, un de ses collègues lui a demandé s’il existait des photos de moi en bikini. À 20 ans, dans la rue, c’était des «Hé mademoiselle, t’es bonne!», suivis d’insultes si je ne remerciais pas l’auteur de ce «compliment» servi à toutes les jeunes femmes croisées sur l’avenue. À 25 ans, j’apprenais que ce sont «les grandes cheminées qui tirent le mieux» et que si je n’appréciais pas la «blague», ce n’est pas parce qu’elle n’était pas drôle, mais forcément parce que «j’avais mes règles». À 35 ans, si j’étais victime de harcèlement, c’est parce que je ne comprenais toujours pas l’humour et que j’étais un «peu trop souriante» ou que «mes jupes étaient un peu trop courtes». À 40 ans, grâce au mouvement #MeToo, je réalisais que je n’étais pas seule et que je n’avais pas besoin de remettre ma féminité ou ma personnalité en question.

Le problème n’est pas le manque d’humour ou la longueur des jupes. Le problème vient du fait que certains hommes sont convaincus d’être drôles ou charmants, mais que leur comportement prouve le contraire. C’est pour cette raison qu’ils ont l’impression que nous avons nos règles, que nous sommes frigides ou  mal baisées. Le problème vient aussi du silence de ceux qui observent et qui laissent faire. Attention, je ne dis pas que tous les hommes sont vils. Non, si ce n’était pas la journée de la femme aujourd’hui, je rendrais hommage aux hommes qui changent la donne. Pas de guerre des sexes. Les femmes entre elles ne sont pas tendres non plus, malgré les appels à la sororité et au travail d’équipe.

Plutôt que d’enfoncer son nez dans son smartphone et de se dire qu’une femme a forcément cherché ce qui lui est arrivé, peu importe la gravité de l’agression, si on se livrait, hommes et femmes, à une analyse personnelle pour comprendre pourquoi on pense que la femme est coupable. La réponse est vertigineuse. Pandore dans la mythologie grecque, Ève et Lilith dans la Bible… les femmes ont infligé les pires maux à l’homme par leur faiblesse. Les pures étaient béatifiées, les indépendantes brûlées vives. C’est pour ces raisons qu’on manque parfois d’humour. Les femmes ne sont pas pires ou meilleures, elles sont des individus qui méritent le respect.

Sophie Kieffer

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