Avec les nouvelles voitures électriques allemandes en vedette, le salon de l’automobile de Francfort a ouvert mardi à la presse dans un contexte morose, mêlant conjoncture ralentie et inquiétude des constructeurs face aux nouveaux plafonds européens de CO2 dès l’an prochain.
Entre les halles gigantesques du centre des expositions de la capitale financière allemande, impossible de rater les voitures électriques qui circulent en silence. Des berlines Hyundai Ionic côtoient de gros SUV I-Pace de Jaguar. Même impression sur les stands, où les modèles à brancher (« plug-in ») sont mis en avant. Volkswagen attire tous les regards avec sa nouvelle berline compacte ID.3, qui doit redorer son image après le scandale des moteurs diesel truqués.
[vc_row][vc_column][vc_gallery type= »nivo » interval= »0″ images= »248522,248521,248524,248523,248525,248520,248518″ img_size= »large »][/vc_column][/vc_row]Opel exhibe sa nouvelle e-Corsa, une citadine « zéro émission », et Porsche sa nouvelle Taycan, une sportive à batteries présentée comme une arme anti-Tesla, la start-up californienne qui domine le marché mondial de l’électrique face aux constructeurs historiques. Malgré cette offensive, les constructeurs s’inquiètent des objectifs de réduction des émissions de CO2 imposés en Europe au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. « Les années 2020 et 2021 représentent un défi notable.
Etant donné l’incertitude du marché, on ne peut pas exclure » de manquer les objectifs de 95 grammes de CO2 par km en moyenne sur la gamme, a averti Ola Källenius, le patron de Daimler, affichant néanmoins sa confiance de voir le groupe rentrer dans les clous en 2022 ou 2023. Ces nouveaux plafonds poussent les constructeurs à électrifier tous leurs modèles. Les entreprises non conformes risquent des amendes qui se chiffrent en centaines de millions d’euros, d’après les experts. Contrairement à Daimler, le groupe français PSA se dit « prêt », avec ses nouveaux véhicules électrifiés, à respecter les règles dès l’an prochain. « On entre avec 2020 dans une période qui va être extrêmement chahutée, au moins jusqu’en 2030. Toute la transformation de l’industrie va maintenant s’opérer et on verra bien quels sont ceux qui se sont les mieux préparés », a déclaré à des journalistes son patron, Carlos Tavares, qualifiant l’époque de « darwinienne ».
A la traîne, les groupes allemands peuvent cependant « encore gagner la course vers l’électrique », estime S&P dans une étude parue lundi. BMW, Daimler et Volkswagen « ont 38 modèles électrifiés déjà sur les routes ou prévus pour cette année, et ils en auront 23 de plus l’an prochain ». « Mais les investissements significatifs en R&D pour les véhicules électriques et d’autres technologies pourraient continuer à peser sur leur rentabilité au-delà de 2022, avec un impact possible sur leur notation financière », ajoute l’agence.
Un marché encore marginal
D’autant plus que le marché mondial a entamé un mouvement de recul, sous l’effet du bras de fer commercial lancé par le président américain Donald Trump avec la Chine. En outre, les marges s’annoncent faibles voire inexistantes sur des véhicules dont le coeur, la batterie, est acheté à des fournisseurs asiatiques avec lesquels risque de se nouer une relation de dépendance. Le patron de Volkswagen Herbert Diess a expliqué ne pouvoir renoncer aux SUV, ses voitures les plus rentables majoritairement en versions essence ou gazole, « parce que nous devons naturellement pouvoir financer nos nouveaux modèles ».
Ces déclarations devraient faire tousser les militants écologistes qui ont décidé de se mobiliser en marge du salon. Une vingtaine de membres de Greenpeace ont gonflé mardi matin un ballon noir géant avec des inscriptions « CO2 », en forme de gros nuage au bout d’un pot d’échappement de 4×4, pour dénoncer la pollution des gros véhicules à moteur thermique. Environ 15 000 à 20 000 manifestants, selon la police, ont prévu de rallier samedi à pied ou à vélo le parc des expositions pour réclamer une « révolution des transports ».
Si le marché des véhicules purement électriques double chaque année dans le monde, il reste marginal, à environ 2% des ventes en Europe. Ils souffrent de leur autonomie encore restreinte et de leurs prix encore élevés. Les marques allemandes pourront en tout cas profiter de l’absence sur le salon de nombreux concurrents étrangers pour capter la lumière. Des centaines de milliers de visiteurs sont attendus à partir de jeudi et jusqu’au 22 septembre. Mais les géants japonais Toyota et Nissan ont renoncé à un stand, comme les américains General Motors et Fiat-Chrysler ainsi que les français Renault, Peugeot et Citroën.
AFP/LQ