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Emprunts verts : les entreprises s’y mettent de plus en plus


Les opérations restent concentrées dans l'énergie, le bâtiment et le transport bas carbone, relèvent les spécialistes. (photo : archives LQ)

Lancer un emprunt « vert », destiné à financer la transition énergétique et écologique, va-t-il devenir la norme pour une société? En 2019, les entreprises ont en tout cas dominé ce marché et rares sont désormais les dirigeants à ne pas y penser.

L’an dernier, sans compter les banques, « les entreprises ont représenté le pôle le plus important pour les émissions de dette verte, avec près de 60 milliards de dollars » sur un total qui devrait dépasser 250 milliards, détaille Manuel Adamini, responsable du Programme de sensibilisation des investisseurs de la Climate Bonds Initiative (CBI), organisme international de référence.

Au regard du reste du marché de la dette, les montants restent symboliques, entre 1 % et 2 %. Mais le dynamisme ne se dément pas et sa place dans la stratégie est devenue inversement proportionnelle à son poids concret.

«Le développement durable est devenu incontournable»

« Au-delà des chiffres, le développement durable est devenu incontournable », car « pour les entreprises ce créneau présente un double avantage : des conditions de financement excellentes et un vecteur de communication très important », explique  Frédéric Gabizon, responsable pour le marché obligataire chez HSBC France.

« Nous atteignons un stade où il devient normal d’émettre de la dette verte : de nombreux groupes se sentent poussés à le faire, notamment parce que leurs concurrents se lancent », estime également Bram Bos, gérant obligations vertes chez NN IP.

Dans ce contexte, l’essor qui a marqué 2019 devrait perdurer, anticipe Florence Devevey, analyste Finance Durable chez S&P Global Ratings. Elle prévoit également une poursuite de la diversification des acteurs, à l’instar l’an dernier de l’entrée en scène des télécoms, avec Telefonica, Verizon et Vodafone. L’arrivée de Pepsico a également marqué les esprits.

«Ce type d’opération nécessite des ressources»

« Les opérations sont toutefois toujours concentrée dans l’énergie, le bâtiment et le transport bas carbone », complète Noémie de la Gorce, analyste Finance Durable chez S&P Global Ratings, et « l’Europe reste la première région d’émission ». L’appétit des investisseurs constitue toujours un moteur puissant. « Et il est surtout plus important pour le vert que pour la dette classique », souligne Jérôme Zecchini, responsable pour la dette d’entreprise chez HSBC France.

« Mais ce type d’opération nécessite des ressources. Et comme la transition vers une économie bas carbone doit s’inscrire dans la durée, si le groupe mobilise des moyens pour un seul emprunt, il risque de décevoir », rappelle Yasmina Serghini, responsable du groupe de travail ESG pour Moody’s dans la zone Emea (Europe, Moyen-Orient, Afrique).

Le risque d’écoblanchiment

« Les sociétés ne peuvent plus se permettre le luxe d’ignorer ces sujets, mais franchir le pas nécessite des moyens spécifiques, notamment pour mesurer l’impact, un point sur lequel les investisseurs attendent beaucoup des sociétés », note également Blaise Bourdy, responsable (France, Belgique et Luxembourg) des émissions de dettes pour les entreprises chez Société Générale CIB.

Le marché arrive en outre à un carrefour délicat, car grossir induit plus de risques d’écoblanchiment ou « greenwashing ». « Nous espérons voir arriver de plus en plus d’entreprises » ce qui induit d’inclure des secteurs jusqu’ici complètement ignorés, comme l’industrie, explique Manuel Adamini.

Mais « définir ce qui est crédible climatiquement va alors devenir de plus en plus compliqué » et, développe-t-il, cela pose la question de l’intervention politique et réglementaire.

La question de l’impact concret de ces financements

« Il y a beaucoup de paroles sur les critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) », mais « comme il y a peu de régulations, l’impact financier des mauvais comportements reste faible », observe également Aymeric Poizot, directeur général France de Fitch Ratings. La qualité du marché dépend donc de la bonne conduite de ses acteurs qui, jusqu’ici, se conforment à de grands principes élaborés sous l’égide d’une association internationale.

Mesurer l’impact concret de ces financements reste aussi une clé pour l’avenir, mais cette science jeune progresse lentement. La publication en juin dernier d’un système de classification par la Commission européenne a constitué une avancée majeure.

Mais 2019 a néanmoins vu émerger des obligations dites de transition ou liées à des facteurs ESG qui ont suscité des réserves. CBI a isolé « de 55 à 60 milliards de dollars d’opérations vertes non crédibles », relève Manuel Adamini.

LQ/AFP

Le Luxembourg leader

Le Grand-Duché, avec son Luxembourg Green Exchange, reste le leader européen incontesté en matière d’obligations vertes. Plus de la moitié des obligations vertes dans le monde seraient cotées à la Bourse de Luxembourg, selon Luxembourg for Finance, l’agence de développement de la place financière. Ce sont essentiellement les banques et les grands acteurs institutionnels, tels que la BEI ou la Banque mondiale, qui y sont présentes.

Un commentaire

  1. La « verdure », voilà un slogan (idiot) qui va rapporter beaucoup à certains.

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