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Soixante œuvres du XXe siècle qui ont cassé les règles de l’art


Le Cri de Munch est là. La Danse de Matisse aussi. Venues du monde entier, quelque 60 œuvres majeures du XXe siècle, qui ont « cassé les règles » de l’art de leur époque, sont réunies à la Fondation Louis-Vuitton à Paris jusqu’au 6 juillet.

Le Moma et le Guggenheim de New York, le Musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg, la Tate de Londres, le Stedelijk Museum à Amsterdam, tous ont accepté de prêter leurs trésors. Et quand on demande à la directrice artistique de la fondation Vuitton, Suzanne Pagé, comment elle a fait, elle répond : « On est copains, ils ne peuvent pas me dire non. »

Alberto Giacometti côtoie Francis Bacon, Piet Mondrian Claude Monet, et Henri Matisse Wassily Kandinsky. « Ce sont des œuvres qui sont devenues universelles, qui ont jeté les bases de la modernité au moment où elles ont cassé toutes les règles », explique l’ancienne directrice du Musée d’art moderne de la Ville de Paris. « C’est parce qu’ils ont dérogé que ces artistes se sont imposés. »

Intitulée Les clefs d’une passion, l’exposition est organisée « en résonance » avec les quatre axes déjà retenus pour la collection de la fondation : expressionnisme subjectif, contemplatif, « popisme », musique. « Quatre lignes plus sensibles qu’intellectuelles », souligne Suzanne Pagé. Le Cri (1ère version) d’Edvard Munch ouvre la première séquence. « Une œuvre sidérante, un visage comme un masque de l’horreur primitive, aux orbites vides, avec un ciel couleur de sang coagulé », commente-t-elle.

Autre cri, celui du notable qui hurle dans une cage, comme un animal, de L’Étude pour un portrait de Francis Bacon. On songe au procès d’Eichmann. Le cri qui n’arrive pas à s’exprimer, c’est celui d’une série d’autoportraits d’Hélène Schjerfbeck, une artiste finlandaise peu connue hors de son pays, qui ose « regarder avec intrépidité la décrépitude de son propre visage ».

Un autre artiste finlandais, Akseli Gallen-Kalela, figure dans la séquence contemplative avec quatre paysages de lacs, « ou comment on peut se perdre dans un peu d’eau ».

« Langage des signes »

Il est exposé avec Claude Monet (Nymphéas), « un fragment de la nature qui renvoie au cosmos tout entier », ainsi qu’avec Les Dunes de Piet Mondrian et des paysages de Ferdinand Hodler, tous deux influencés par les croyances ésotériques de la théosophie. Radicalité absolue pour la séquence suivante avec notamment Le Carré noir, Le Cercle noir et La Croix noire de Kazimir Malévitch, ainsi que trois Compositions de Piet Mondrian et la première version de la Colonne sans fin de Constantin Brancusi.

« On est passé des Dunes à la réduction progressive au langage des signes », dit Suzanne Pagé. Ville, sport, mouvement, publicité : toute la dynamique urbaine s’exprime dans la séquence « popiste » où l’on retrouve Robert Delaunay (L’Équipe de Cardiff), Fernand Léger, « avec des femmes comme des machines », mais aussi l’esthétique de roman-photo de Picabia qui a influencé l’Américain Richard Prince.

Dans la dernière séquence, consacrée à la musique et au « rôle déterminant, évident ou implicite, qu’elle occupe » dans l’art du 20e siècle, deux œuvres emblématiques de Henri Matisse sont réunies pour la première fois. « L’une dans l’élan de sa jeunesse, La Danse, l’autre dans la mélancolie d’une vie finissante, La Tristesse du roi« , écrit Suzanne Pagé dans la préface du catalogue. « On parle d’aplats à propos de La Danse, mais c’est très vivant, c’est de la peinture – seulement trois couleurs, et si peu réalistes. Elle vient s’opposer à la douceur mélancolique des papiers découpés de La Tristesse du roi« .

Suzanne Pagé insiste sur l’importance du rapprochement entre les œuvres. « Lors de l’accrochage, ce sont elles qui disent oui ou non, elles veulent ou elles ne veulent pas », avant d’ajouter : « J’espère qu’on ne sort pas indemne d’une exposition comme celle-là. »

AFP

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