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Regression : le retour d’Amenábar, entre messes noires et trous de mémoire


Alejandro Amenábar met en scène Emma Watson et Ethan Hawke dans un thriller paranoïaque. Après six ans de silence, l'Hispano-Chilien Alejandro Amenábar est de retour avec Regression . Sur fond de cultes sataniques aux États-Unis dans les années 1980, une fille accuse de viol un homme qui ne se rappelle de rien.

Alejandro Amenábar est de retour avec Regression. Sur fond de cultes sataniques aux États-Unis dans les années 1980, une fille accuse de viol un homme qui ne se rappelle de rien… Amenábar revient là au thriller psychologique, un genre qu’il avait déjà dominé avec Tesis ou Ouvre les yeux.

Présenté en ouverture du festival international de Cinéma de Saint-Sébastien le mois dernier, le nouveau film du réalisateur de Mar adentro, Oscar du meilleur film étranger en 2004, a été accueilli par une salve d’applaudissements.

Le silence depuis six ans et l’échec de l’ambitieux et brillant Agora , et revoici Alejandro Amenábar, le réalisateur hispano-chilien de 43 ans qui présente Regression , son sixième film en vingt ans. Il confie : « Peut-être que je ne suis pas très créatif. Je reçois beaucoup de scénarios d’Espagne ou des États-Unis. J’en ai examiné quelques-uns et à chaque fois, je me suis demandé : « Est-ce que je veux vraiment investir trois ans de ma vie dans cette histoire qui n’est pas la mienne? » »

Et lui à qui on doit, entre autres, Mar adrento (2004) et Les Autres (2001) fait un retour remarqué (et remarquable!) dans le genre du thriller d’horreur et vénéneux. Autre confidence : « Je me suis retrouvé à parler de la peur. De la manière dont elle nous aveugle et nous empêche de voir la réalité des choses. » La consultation du dictionnaire nous éclairera également sur la signification du titre du nouveau film d’Amenábar : la régression, c’est le mode de pensée qui rompt avec la logique, les désirs et les craintes qui prennent le pas sur la réalité.

Inspiré d’une histoire vraie

Ainsi, le spectateur est embarqué vers une ville du Minnesota en 1990. Là, la jeune Angela accuse son père, John Gray, d’avoir commis un crime, et l’enquête est confiée à l’inspecteur Bruce Kenner. Aussi inattendus que soudains sont les aveux du père qui n’a pas gardé le moindre souvenir des faits. Alors, appel est fait au docteur Raines – lui, c’est un psychologue réputé et sa mission est simple : aider John à retrouver la mémoire. Problème : dans cette quête, les deux hommes vont mettre à jour un terrifiant mystère qui concerne le pays tout entier…

Avec un budget de 20 millions de dollars (15,5 millions d’euros), Alejandro Amenábar s’est grandement inspiré de faits divers qui ont secoué les États-Unis dans les années 1980, sur fond d’un accroissement du pouvoir politique et religieux. « Une série d’évènements a nécessité l’intervention conjuguée de la police et de psychologues afin de résoudre l’étrange affaire des abus liés à des rituels sataniques , explique le réalisateur. La vague d’accusations et d’aveux qui a suivi fut sans précédent et a détruit des familles entières, provoqué le chaos et la panique sociale. Dans plusieurs cas, de lourdes condamnations ont été prononcées. Cela a été très intéressant de se replonger dans ces affaires des années 1980-90 avec le point de vue du XXI e siècle. » Pour cette histoire, Amenábar a particulièrement travaillé la lumière – ainsi, il a tourné toutes les scènes d’extérieur au crépuscule.

Et il revendique quelques influences et références, parmi lesquelles L’Exorciste de Friedkin (1974), Conversation secrète de Coppola (1974) et Le Verdict de Lumet (1983). Influences et références qui l’aident, avec une photo bleutée irréaliste et des cadrages surprenants, à guider le spectateur dans Regression aussi subtilement qu’élégamment, à mettre en perspective des ciels gris et pesants, une atmosphère pluvieuse, des maléfices enfouis dans une province paisible, une enquête glissant sur la pente de la conspiration… Oui, alors, tout est en place pour un thriller paranoïaque où, aux côtés d’un Ethan Hawke en inspecteur, on retrouve Emma Watson, l’actrice britannique sortie, à 24 ans, de la saga Harry Potter .

Le réalisateur lui a confié le rôle d’Angela. Elle glisse que « ce rôle a été le plus difficile que j’ai eu à interpréter depuis le début de (ma) carrière ». Et la comédienne, d’ajouter : « L’horreur en tant que telle n’est pas vraiment ma tasse de thé, mais ce film est un véritable mélange des genres .» Ce que reconnaît Amenábar : « Il commence comme un film de terreur, puis c’est un thriller et il se termine comme un drame .» Et sur l’écran, un pesant de frissons garanti!

Serge Bressan

Regression, d’Alejandro Amenábar. (Espagne/Canada, 1h47), avec Emma Watson, Ethan Hawke, David Thewlis…

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