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« L’Odyssée » : la folie des profondeurs du commandant Cousteau

L’Odyssée : une immersion dans la vie du « commandant Cousteau » avec Lambert Wilson. Un film épique et intime, qui ne cède jamais à l’hagiographie, réalisé par le Français Jérôme Salle. Bienvenue dans les profondeurs marines et sur la banquise.

C’est un film à grand spectacle. Un film écolologique. Et en rien une hagiographie. Résumé, voilà donc L’Odyssée, nouveau film du réalisateur français Jérôme Salle qu’on connaît surtout pour son adaptation de la BD Largo Winch. Cette fois, bénéficiant d’un budget conséquent (30 millions d’euros), le réalisateur a changé de décor. Opté pour les fonds marins et la banquise en contant en images le commandant Jacques-Yves Cousteau (1910-1997), officier de la marine nationale, explorateur océanographique et longtemps une des personnalités préférées des Français.

Jérôme Salle, 49 ans : «C’était incroyable pour les gens de ma génération! Le «commandant Cousteau» c’était un peu Jésus-Christ, l’un des hommes les plus connus au monde… En discutant autour de moi, j’ai réalisé qu’il était en train de tomber complètement dans l’oubli. J’ai donc commencé à regarder ce qui était écrit sur lui. Tout cela a réveillé une nostalgie d’enfance. Je me suis également aperçu qu’à part La Vie aquatique (NDLR : Wes Anderson), aucun projet de cinéma n’avait jamais abordé ce destin exceptionnel.»

Donc, il y aura film. Titre : L’Odyssée. Et un postulat de départ : ce ne sera, ce ne devra être en aucun cas une hagiographie. De son vivant, certes, quelques voix discutaient le caractère et l’exemplarité du commandant qui, en 1948, a inventé le scaphandre pour respirer sous l’eau puis fabriqué la Calypso, sous-marin devenu légendaire pour explorer les fonds marins. Qui était vraiment Jacques-Yves Cousteau, surnommé «JYC» ou encore «Le Pacha» et membre de l’Académie française?

«Le rapport de l’homme avec l’environnement»

L’un de ses fils, Jean-Michel Cousteau, confiait récemment : «Le commandant, c’était mon père, mon ami, mon patron»… Mais dans son film qui explore la folie des profondeurs, Jérôme Salle, qui a rencontré la famille Cousteau avant de tourner, ne se prive pas de montrer la face cachée, obscure de l’homme des mers. Un homme qui n’aimait rien tant que la lumière dirigée sur lui, et seulement sur lui… Tourné dans différents sites – Croatie, Afrique du Sud, Bahamas, Antarctique – le film a nécessité un important travail de recherches et de documentation.

Le tournage, ensuite, n’a d’ailleurs pas été simple, avec des scènes tournées avec des requins-tigres de quatre mètres ou des baleines, plusieurs incidents avec le bateau des années 50 ou encore une violente tempête en Antarctique. «Ce film d’époque avec des animaux, tourné sur l’eau et sous l’eau», cumulait en effet «beaucoup de risques», soutient ainsi le cinéaste qui, de surcroît, craignait, avec L’Odyssée, de donner une vision «trop classique, trop biopic».

Ce qui a renversé cette sensation? La rencontre, d’abord, Pierre Niney qui incarne l’un des fils, Philippe Cousteau, et a suggéré que son personnage prenne plus de place. Le scénario a ainsi été reconstruit, insistant sur l’opposition entre le fils et le père – au passage, toute la première partie sur la jeunesse de celui qui allait devenir le commandant a été supprimée. Ensuite, celle avec Lambert Wilson, préféré à l’acteur américain Adrian Brody et au Français Romain Duris. L’acteur a dû perdre du poids et apprendre à plonger pour se glisser dans la peau de l’explorateur, dont il «espère que l’on percevra une véracité, une sincérité».

Au final, sur l’écran, on a un film intelligent, sans esbroufe, qui sait mêler le ressort psychologique et la beauté des grands espaces, tant dans les profondeurs marines avec requins et baleines que sur la banquise. Un film tourné en partie sur une réplique de la Calypso et usant (sans jamais en abuser) des effets spéciaux numériques – par exemple, ajouter des poissons pour les scènes tournées en Méditerranée parce que ces espèces ont disparu ou se sont trop raréfiées depuis 70 ans… Un beau film qui mêle avec grâce l’épique et l’intime, c’est plutôt rare!

Le film était aussi l’occasion d’aborder la façon dont un homme du XXe siècle, «qui avait une volonté de conquérir la mer» s’est «rendu compte qu’à force de vouloir dominer la nature, on était en train de la détruire», ajoute Jérôme Salle. «La fin de sa vie soulève des questions qui nous occupent encore beaucoup : le rapport de l’homme avec l’environnement.»

Serge Bressan

L’Odyssée, de Jérôme Salle (France, 2 h 02) avec Lambert Wilson, Pierre Niney, Audrey Tautou…

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