Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
À Dudelange, le centre Opderschmelz a présenté sa programmation pour les trois prochains mois, continuant dans sa lignée d’exigence artistique, d’éducation populaire et de diversité. Avec, aussi, un anniversaire à fêter…
Depuis dix ans, la petite ville anciennement ouvrière du sud du pays a su développer son volet le plus connu auprès du plus grand nombre : la culture. À force d’investissements, 10 % de son budget global va chaque année soutenir les jeunes créateurs, qu’ils soient musiciens, artistes plasticiens, metteurs en scène, acteurs, danseurs… Oui, le centre Opderschmelz a su imposer son image et ses choix dans tout le pays mais aussi au-delà des frontières.
«Faire une programmation culturelle est un véritable acte politique!», s’exclame Danielle Igniti, la directrice des lieux, pour introduire cette nouvelle saison. Il est vrai que ces dix dernières années auront été marquées par une exigence artistique forte, proposant à un public aussi éclectique qu’il puisse être des formes de créations multiples, complexes, engagées, intelligentes, sensibles, pour donner à voir une facette de notre monde qui a tendance à disparaître dans les affres du capitalisme et de la rentabilité.
Si le célèbre adage d’Abraham Lincoln parlait d’éducation, il pourrait ici s’appliquer ainsi : «Si vous trouvez que la culture coûte cher, essayez l’ignorance!» Dudelange a choisi de ne pas y succomber, mais plutôt d’ouvrir les yeux à tous, tout le temps, quel que soit son statut social ou ses origines. Chapeau bas !
De notre collaboratice Mylène Carrière
Dix ans, ça se fête !
C’est bien évidement en musique que le centre Opderschmelz va fêter une décennie de création. Et pas n’importe laquelle… Celle qui a donné ses lettres de noblesse au niveau national et international le jazz, mais pas que… Pour un anniversaire de toute beauté, ce n’est pas moins de quatre soirées exceptionnelles qui seront proposées, l’occasion de réunir certains qui ont eu les joies de goûter à la résidence de création à Dudelange.
Trois grosses pointures seront donc réunies pour commencer les festivités : Sigi Flosason’s DeLux Project, Missing Sigi avec Jeff Herr, Michel Reis et Marc Demuth; Pit Dahm Trio avec Pit Dahm, Charley Rose et Lennart Heyndels; Pol Belardi’s Force avec Pol Belardi, Jérôme Klein, Niels Engel et David Fettmann. Une première soirée qui promet quelques heures de toute beauté.
Suivront United Instruments of Lucilin dans un registre classique, le petit chouchou Pascal Schumacher qui proposera de réinventer ses propres pièces sous forme de rétrospective, et enfin Benoît Martiny et Michel Pilz «Duo & Guests» viendront clôturer la semaine de leur modeste et élégant free jazz. Pour les frileux ou non-connaisseurs de jazz et de nouveau classique, et tout particulièrement pour ceux qui ne connaissent pas encore ces musiciens fantasques, courez les trouver, vous découvrirez ce qu’est le terme «liberté» !
Du jazz, du blues et un « singer-songwriter »
L’année commence sur les chapeaux de roues du côté de la programmation musicale, avec, rien de moins que l’Ensemble Bernica et Régis Huby réunis sous le titre Possibly. C’est la rencontre incroyable entre huit musiciens, quatre souffleurs et quatre rythmiciens, tous compositeurs et improvisateurs avec l’un des violonistes les plus en vue de la scène improvisée. Suivront les non moins talentueux et extraordinaires Michel Portal, Bojan Z et Jeff Ballard, trois pointures internationales qui ne manqueront pas de nous faire rêver.
Pour la première fois au Luxembourg, c’est à Dudelange que l’Italien Pippo Pollina viendra se produire pour présenter son nouvel album sur le thème de l’espoir. La «Nuit du Blues» nous régalera de moments extraordinaires avec Albert Lee, célèbre guitariste de légende, suivi par le groupe britannique The Brew et les Luxembourgeois de l’affiche, The Remo Cavallini Blues Band.
Un début de saison des plus prometteurs qui ouvre l’appétit pour le festival «Like a Jazz Machine», programmé lui au printemps.
Encore plus noir…
Comme chaque année, pour sonner l’entrée dans l’automne, le centre Opderschmelz se consacre, pendant dix jours, au genre «noir». Sombre et intriguant. L’obscurité se répand dans toutes les formes de création.
Pour cette nouvelle édition, qui aura lieu du 17 au 27 octobre, une commande a été passée aux deux auteurs du cru – Ian de Toffoli et Tulio Forgiarini – qui vont proposer pour le premier soir une lecture de variations autour d’un meurtre. À la frontière entre littérature et théâtre, ils vont nous entraîner au cœur d’une intrigue terrifiante. Pour la première fois au Luxembourg, le très talentueux Danois Jakob Bro et son trio nous plongeront dans le paysage hivernal du Grand Nord.
James Taylor Quartet et Horns feront, quant à eux, leur grand retour après avoir inauguré la première édition du festival en 2008, dans un univers toujours aussi acide. Les plus jeunes ne seront pas oubliés pour cette édition avec une création exclusive d’après des textes de Claudine Muno, produit par l’ASBL Openscreen et le CNA. En parlant d’images, cette idée signe le retour du genre cinématographique en proposant l’avant-première de The Snowman de Tomas Alfredson, toujours en collaboration avec les voisins du CNA.
Mais aussi…
Du théâtre pour les grands, avec un cabaret satirique de Lucien Blau qui se paiera la part belle de la société luxembourgeoise. Du théâtre pour les petits avec A, B, Zeh écrit, mis en scène et chorégraphié par une habituée de la maison, Ela Baumann.
La fête des Cultures, à ne manquer sous aucun prétexte, permettra de voir que la musique est partout une fête, même dans une période de conflits internationaux et de drames humains.
Enfin, et pas des moindres, la programmation dans les centres d’art de Dudelange proposera de découvrir la toute nouvelle création de Karolina Markiewicz et Pascal Piron, ainsi que Giulia Andreani à partir de samedi prochain, suivies par une exposition collective de photographes du coin (Silvio Galassi, Sven Erik Klein, Andres Lejona et Roger Wagner), d’un côté et un artiste bien connu de la ville, Armand Strainchamps, de l’autre.
