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Exposition – Changer l’histoire de l’art


Composition occidentale, sujets orientaux : un étonnant mélange signé Étienne Cail. (Photo : DR)

La galerie Hervé Lancelin présente, pour la première fois au Grand-Duché, les œuvres du prodige Étienne Cail. Un voyage à la croisée des cultures et de l’histoire de la peinture.

À seulement 24 ans, le jeune artiste français Étienne Cail présente son travail à Luxembourg. L’exposition «La Tentation de l’Orient» est un voyage aux multiples facettes. Elle nous entraîne dans les confins de l’histoire de l’art et de la civilisation orientale, jouant avec les codes des uns et des autres.

Si certains artistes ont indéniablement des parcours extraordinaires, le jeune Français Étienne Cail fait définitivement partie de cette catégorie. Autodidacte, il commence à peindre à l’âge de 18 ans seulement pour être repéré deux ans plus tard par une galerie de Lyon, en France. Depuis, à chacune de ses expositions, ses œuvres partent comme des petits pains.

Tout a commencé lors d’un voyage en Chine, en résidence d’artiste, une expérience qui va changer le cours de sa vie et de son travail artistique. «Dès son arrivée en Chine, il a été totalement subjugué par la technique et l’histoire de l’art chinois, par cette culture que nous ne connaissons finalement que très peu en Occident», explique le galeriste Hervé Lancelin. C’est alors que le déclic s’opère : après ce voyage, Étienne Cail prendra un virage radical dans sa carrière, s’imposant de ne plus peindre qu’en noir et blanc et s’appropriant des tableaux historiques de l’art occidental.

À première vue, ses larges peintures en noir et blanc nous rappellent sans hésiter le plus français des artistes chinois, Yan Pei-Ming, dont les immenses portraits de personnalités publiques sont célèbres dans le monde entier. Après ce clin d’œil qui sera apprécié des aficionados de l’art contemporain, on pénètre plus avant dans la galerie et l’on découvre une Mona Lisa sous les traits d’une jeune fille asiatique, un Déjeuner sur l’herbe de Manet revisité avec des personnages aux yeux bien plus bridés que sur l’original.

Donner une place à l’Orient

Étienne Cail nous entraîne à la fois dans un jeu des sept erreurs, mettant à mal notre culture visuelle collective, et dans une réflexion teintée d’humour et d’ironie autour de la peinture historique, de la représentation des puissants ou des icônes. Au-delà de la Mona Lisa, qui a très souvent été détournée depuis sa création par d’autres artistes, on s’amuse à découvrir ses personnages anonymes de l’Extrême-Orient prendre la place du pape, du Roi-Soleil, ou bien encore des crânes normalement nus des vanités.

Ce qui rend son travail exceptionnel réside à la fois dans une technique des plus abouties, chose surprenante à un âge si jeune, et surtout dans la profondeur de ces regards venus d’ailleurs, squattant littéralement notre histoire commune, notre patrimoine culturel. L’Extrême-Orient a, de tout temps, fasciné les artistes et grands hommes occidentaux qui y ont recherché tantôt la sagesse, tantôt l’art de la guerre ou ont simplement essayé de comprendre les contours de cette civilisation millénaire.

Le titre de l’exposition, «La Tentation de l’Orient», est d’ailleurs un clin d’œil à un ouvrage d’André Malraux, écrit au même âge que l’artiste, La Tentation de l’Occident. «Dans cet ouvrage, Malraux raconte l’histoire d’un jeune Chinois parti en voyage en Occident et un jeune Occidental parti en voyage en Chine. Tous deux s’envoient des lettres racontant leurs expériences et leur vision de la culture de l’autre. C’est exactement cet aller-retour entre deux cultures et la curiosité de la découverte que nous raconte Étienne Cail», ajoute le galeriste.

À une période où la mondialisation nous laisse croire que le monde tend à s’uniformiser, qu’en un clic sur internet nous pouvons connaître l’autre, le travail d’Étienne Cail concrétise cette mondialisation et révèle par le même geste toute la complexité de l’histoire des civilisations. Alors que les artistes asiatiques se passionnent pour l’art occidental, jusqu’à le copier pour entrer dans le moule du marché de l’art, Étienne Cail nage à contre-courant et redonne toutes ses lettres de noblesse à un art méconnu.

Mylène Carrière

Galerie Hervé Lancelin – Luxembourg. Jusqu’au 25 juillet.

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