Accueil | Culture | Cinéma : l’affaire Polanski jette une ombre sur les César

Cinéma : l’affaire Polanski jette une ombre sur les César


Le réalisateur Roman Polanski, le 20 mars 2015 à Paris. (Photo : AFP)

A quelques jours de l’annonce des nominations pour les César, le choix de Roman Polanski pour présider la cérémonie suscite un appel au boycott et des critiques des féministes et d’une ministre, jetant une ombre sur cette fête du cinéma français.

La ministre française des Droits des femmes, Laurence Rossignol, a jugé vendredi «surprenant et choquant» le choix, annoncé mercredi, du réalisateur franco-polonais pour succéder à Claude Lelouch comme président de la cérémonie des plus hautes récompenses du cinéma français, qui se tiendra le 24 février. «C’est un choix qui témoigne, de la part de ceux qui ont décidé de le nommer président des César, d’une indifférence à l’égard des faits qui lui sont reprochés», a-t-elle estimé.

Le réalisateur de «Tess», du «Pianiste» ou de «Rosemary’s Baby», qui a reçu de nombreux prix à travers le monde, est toujours poursuivi par la justice américaine pour le viol présumé d’une mineure en 1977. La réaction de la ministre a suivi celle jeudi d’une association féministe, Osez le Féminisme, qui a exprimé sa «colère» et appelé à un rassemblement de protestation le jour de la cérémonie devant la salle Pleyel à Paris, où se tiendra la cérémonie des César.

«Quelques semaines après l’affaire David Hamilton, et alors qu’est menée une réflexion sur les délais de prescription pénale pour les victimes de violences sexuelles (…), la désignation de Roman Polanski est un pied de nez indigne fait aux nombreuses victimes de viols et d’agressions sexuelles», a estimé l’association. Le photographe David Hamilton avait été accusé par l’animatrice Flavie Flament de l’avoir violée il y a près de 30 ans, avant d’être retrouvé mort à son domicile parisien fin novembre, probablement à la suite d’un suicide.

Filippetti en défense

Dès l’annonce de la présidence de Roman Polanski, un appel au boycott a été lancé sur les réseaux sociaux, sous le hashtag #boycottcesar. Une pétition sur change.org pour la «destitution de Roman Polanski comme président des César» a aussi été initiée. Elle avait recueilli plus de 45 000 soutiens vendredi.

L’ex-ministre de la Culture Aurélie Filippetti a en revanche estimé jeudi que ce choix était «la liberté absolue de l’Académie des César», et a souhaité «qu’on laisse (Roman Polanski) présider cette cérémonie», saluant un «très grand réalisateur». «C’est quelque chose qui s’est passé il y a 40 ans», avait-elle souligné. L’Académie des arts et techniques du cinéma, organisatrice des César, présidée par Alain Terzian, n’a pas souhaité réagir. La ministre de la Culture Audrey Azoulay ne s’est pas non plus exprimée.

Né en France de parents polonais, Roman Polanski, à l’époque âgé de 43 ans, avait été poursuivi en 1977 en Californie pour le viol d’une adolescente de 13 ans. Libéré sous caution après 42 jours de prison, le cinéaste qui avait plaidé coupable de «rapports sexuels illégaux» avec une mineure mais nié le viol, s’était enfui des États-Unis avant le verdict, craignant d’être lourdement condamné. Considéré depuis comme un «fugitif» par les États-Unis, il court toujours le risque d’y être extradé, malgré les interventions en sa faveur de la victime, qui a réclamé à plusieurs reprises l’abandon définitif des poursuites et dit lui avoir pardonné. En décembre, la Cour suprême polonaise a mis fin à une procédure d’extradition entamée en 2014 à la demande de la justice américaine.

Depuis 40 ans, cette affaire refait régulièrement surface. Elle avait encore été évoquée implicitement lors de la cérémonie d’ouverture du dernier Festival de Cannes, suscitant la colère de son épouse, l’actrice Emmanuelle Seigner. Aujourd’hui âgé de 83 ans, Roman Polanski vit en France. Avec 21 longs métrages à son actif, le cinéaste a été huit fois récompensé aux César, dont deux fois pour le meilleur film, avec «Tess» (1980) et «Le Pianiste» (2003), et quatre fois comme meilleur réalisateur. Il prépare actuellement son 22e film, consacré à l’affaire Dreyfus.

Le titre de président de la cérémonie des César est essentiellement honorifique, les récompenses étant attribuées par plus de 4 000 professionnels. Les nominations pour les 42e César seront annoncées mercredi matin.

Le Quotidien/AFP

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.