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Une diatribe anti-immigrés qui fait un tollé au Sénat


«L'immigration d'aujourd'hui, c'est le terrorisme de demain», a lancé Jean-Louis Masson au Sénat, sous les huées de ses collègues. (photo archives RL)

Amalgames, raccourcis, le sénateur mosellan Jean-Louis Masson a prononcé mardi au Sénat une violente diatribe anti-immigrés. Elle a mis sens dessus dessous l’hémicycle. L’élu regrette juste de n’avoir pu s’exprimer clairement.

Bronca, tollés et réactions en cascade. Une dizaine de jours après l’affaire Morano, un autre Lorrain, le sans étiquette Jean-Louis Masson, a défrayé la chronique mardi au Sénat. L’élu mosellan a profité des explications de vote du projet de loi sur le droit des étrangers pour se livrer à une violente diatribe anti-immigrés de près de quatre minutes. Un discours entrecoupé de sifflets et de huées d’une grande partie de l’auditoire. Mais salué des deux mains par les deux seuls sénateurs FN de l’hémicycle, qui n’en demandaient pas tant.

« On a l’impression qu’on ne peut pas avoir un avis sur l’immigration qui soit divergent de ce que pensent les soi-disant bien-pensants. Je vous le dis très clairement  : je suis hostile à l’immigration pour des raisons conjoncturelles et structurelles », a commencé le sénateur et conseiller départemental de Moselle. Ajoutant que ce n’était pas le moment « de charger la barque », il a ensuite affirmé sous les quolibets qu’une « veuve d’agriculteur touche beaucoup moins que ce que touche un immigré qui n’a jamais travaillé pour la France ».

Sur le thème du «c’était mieux avant», l’élu a ensuite cité en exemple son département  : « Par le passé, nous avons eu d’énormes vagues d’immigration  : des Polonais, des Italiens, des Portugais. C’était des gens qui ne posaient pas de problèmes… Il faut avoir le courage de le dire. »

Poursuivant son entreprise de hiérarchisation des immigrés par leur pays d’origine, il a rendu hommage aux immigrés du Sud-Est asiatique. « Très souvent, leurs enfants étaient les premiers de la classe. Actuellement, avec des gens qui viennent d’autres endroits, ce ne sont ni les premiers de la classe… » Houspillé, l’élu ne terminera pas sa phrase.

Pas de quoi le freiner dans son élan. « Par le passé, l’immigration conduisait à l’assimilation. Aujourd’hui, elle conduit au communautarisme. Il y a des quartiers où on ne va plus. Il n’est pas pensable qu’on ait aujourd’hui des piscines où on sépare les hommes et les femmes, qu’on fasse des menus communautaristes dans les cantines scolaires », a-t-il ajouté.

Avant de conclure  : « Tout à l’heure, on nous a dit que l’immigration avait conduit à des gens qui étaient de très bons Français, des Français remarquables. C’est vrai  : Necker, Madame Curie, etc. Simplement, j’aurais aimé que la liste continue. Mohamed Merah, Amedy Coulibaly, ce sont les terroristes aujourd’hui! L’immigration d’aujourd’hui, ce sont les terroristes de demain! » Un raccourci entre les populations de confession musulmane et les terroristes qui a laissé pantois.

Un demi-rectificatif

Joint mercredi, Jean-Louis Masson dit ne rien regretter. Mis à part de n’avoir pu s’exprimer normalement. Ce bazar ambiant l’aurait poussé à prononcer une dernière phrase qui n’était pas prévue  : « Il y avait un tel cirque que je n’ai pas pu lire mon texte. Je ne voulais pas dire cela. Je voulais dire que les terroristes d’aujourd’hui sont le produit de l’immigration récente. »

Gérard Larcher, président du Sénat, a déclaré qu’il ferait procéder à la vérification de savoir si les propos tenus l’étaient « dans le champ de la République ».

Jean-Louis Masson, lui, se défend de toute stigmatisation, n’ayant cité ni religion ni pays d’origine. Et n’est pas inquiet quant à des sanctions  : « Je n’ai rien dit de contraire au règlement. » Quant au tollé provoqué, il le qualifie par un laconique  : « C’est le jeu politique! »

Jean-Louis Masson oscille depuis des années entre droite dure et Front national. Dans un no man’s land qui le pousse régulièrement à parrainer Nicolas Dupont-Aignan, sans pourtant adhérer à Debout la France. Mardi, il a fait un pas de plus vers l’extrême.

« Ces propos sont indignes de notre Assemblée. » Le sénateur écologiste Jean-Vincent Placé est l’un des élus qui a condamné le plus vivement les propos de Jean-Louis Masson  : « Racisme, xénophobie, stupidité, ignorance? Comment peut-on raconter des bêtises pareilles? Ici, il y a de nombreux enfants et petits-enfants de ceux qui sont venus par l’immigration dans notre beau pays. Nous sommes en train de passer un cap supplémentaire vers l’extrême droitisation, vers la lepenisation des esprits. » Pour Didier Guillaume, président du groupe PS du Sénat, « cette intervention a dépassé les bornes et peut-être même les limites de la République ». Pour Pierre Laurent, secrétaire national du PC, « on ne peut pas laisser passer une telle intervention dans l’enceinte d’une des chambres de la République ».

Les condamnations viennent aussi de la droite. La sénatrice UDI Nathalie Goulet dénonce une « scandaleuse intervention islamophobe ». Même réprobation chez Philippe Bas, président Les Républicains (LR) de la commission des lois  : « Notre travail, notre réflexion, nous conduisent à ne pas souscrire à certains propos qui ont été justement dénoncés et qui ne sont pas les nôtres. » Meilleur ennemi de Jean-Louis Masson, le sénateur mosellan LR François Grosdidier regrette « un discours d’une violence inouïe, plus dur que celui du FN. Poser ainsi le principe de l’immigration en hiérarchisant les bons et les mauvais élèves en fonction de leur origine, c’est du racisme pur. »

Philippe Marque (Le Républicain lorrain)

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