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Panama Papers : Londres au cœur du système des paradis fiscaux


"Londres est l'épicentre d'une grande partie des affaires douteuses qui ont lieu dans le monde", accuse Nicholas Shaxson, auteur du livre "Les paradis fiscaux". (photo AFP)

Les Panama Papers n’ont pas seulement levé le voile sur les secrets financiers des riches et puissants, ils ont aussi mis en lumière le rôle central de Londres au cœur du système des paradis fiscaux.

Les dossiers du cabinet d’avocats panaméen Mossack Fonseca, qui ont fuité dans la presse ces derniers jours, montrent les liens entre le Royaume-Uni et des milliers de firmes basées dans ces territoires à la fiscalité réduite et à la législation laxiste.

Ils montrent aussi comment ces fonds discrets sont investis dans des actifs britanniques, notamment sur le très spéculatif marché londonien de l’immobilier.

« Londres est l’épicentre d’une grande partie des affaires douteuses qui ont lieu dans le monde », accuse Nicholas Shaxson, auteur du livre « Les paradis fiscaux ».

L’expert compare la capitale au coeur d’une « toile d’araignée » qui s’étend sur de lointains territoires d’outre-mer, reliquats de l’empire, comme les Iles Vierges. Sur ce seul minuscule archipel sont ainsi enregistrés 110.000 comptes du cabinet Mossack Fonseca.

Si la Grande-Bretagne elle-même est relativement transparente et vertueuse en matière financière, les affaires les plus douteuses sont sous-traitées aux territoires d’outre-mer, souvent via des sociétés-écrans anonymes, détaille Nicholas Shaxson.

« L’évasion fiscale et ce genre de pratiques ont lieu dans les parties extérieures de la toile et en général on y retrouve des liens avec la City de Londres ou des firmes britanniques spécialisées dans la fiscalité ou la comptabilité », explique l’auteur.

Ces paradis fiscaux « sont tous des agents de la City, d’où est contrôlé l’ensemble du système », confirme Richard Murphy, professeur à la City University de Londres.

Traduction concrète de ces circuits: un certain nombre de personnalités du monde politique et des affaires possèdent de vastes propriétés immobilières à Londres par l’intermédiaire de sociétés offshore montées avec l’aide du cabinet panaméen, selon le quotidien The Guardian.

Parmi les bénéficiaires de ces pratiques opaques, mais souvent pas illégales pour autant, figure le président des Émirats arabes unis, cheikh Khalifa Ben Zayed Al-Nahyane, avec un parc immobilier estimé à 1,2 milliard de livres (1,5 milliard d’euros), selon le journal.

« Valises pleines de billets »

Ces révélations vienenent en contrepoint des déclarations récurrentes du gouvernement de David Cameron sur sa lutte contre les paradis fiscaux et l’évasion fiscale. Ironiquement, le Premier ministre a lui-même dû s’expliquer sur sa fortune familiale, alors que feu son père Ian s’est retrouvé cité dans le scandale des « Panama papers ».

« La plupart des villes du mondes sont intraitables avec les étrangers qui arrivent avec des valises pleines de billets pour acheter des maisons ou des entreprises. Mais pas Londres », déplore Simon Jenkins, éditorialiste de l’Evening Standard, un quotidien populaire. Il n’est toutefois guère étonnant de retrouver Londres au centre de ces flux financiers, selon les spécialistes.

La ville, qui vient de conforter sa place de capitale de la finance mondiale dans le dernier classement de référence Global Financial Centres Index (GFCI), a su capitaliser sur l’héritage de l’empire britannique et sa tradition commerciale.

« Londres est au carrefour de l’argent du monde entier depuis des siècles », souligne Nicholas Shaxson.

Une position renforcée par de nombreux facteurs comme l’utilisation de l’anglais dans le monde de la finance, un système juridique stable, une position géographique idéale entre l’Europe et les Etats-Unis, ou encore une tradition politique de non-interventionnisme dans l’économie.

Aujourd’hui, Londres est pourtant sous pression pour rendre ses territoires d’outre-mer plus vertueux, mais les bonnes volontés se heurtent au lobbying du puissant secteur financier britannique, estime Richard Murphy. « La City semble croire que sans ces réseaux, elle perdrait l’avantage compétitif dont elle a besoin », regrette le professeur.

Le Quotidien / AFP

 

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