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Michel Neyret, grand flic devenu paria, attend son procès


Michel Neyret à son arrivée le 4 septembre 2012 au conseil de discipline de la police à Paris. (Photo : AFP)

Une réputation et une aura qui volent en éclats, à l’aube du 29 septembre 2011, quand la police des polices le cueille à son domicile: quatre ans et demi plus tard, Michel Neyret, le superflic révoqué, attend son procès, anxieux mais combatif.

«Quelle que soit l’issue, j’ai surtout envie que ça se termine pour récupérer ma liberté de circuler et de vivre», souffle l’ex N°2 de la PJ lyonnaise, poursuivi notamment pour corruption – avoir accepté du «milieu» des séjours de luxe et des cadeaux en échange de renseignements et de services.

«Oui, j’ai forcément peur de retourner en prison», reconnait celui qui a passé huit mois en détention provisoire à la Santé. Écroué au quartier VIP, il y occupait son temps entre le sport, la lecture ou les échecs, notamment avec le comédien Sami Naceri. Cheveux poivre et sel, teint hâlé, à 60 ans Michel Neyret a gardé son allure de playboy aux costumes bien taillés. Le côté anxieux plus marqué.

Toujours interdit dans le Rhône dans le cadre de son contrôle judiciaire allégé, ce grand amateur de soirées mondaines, qui se flattait d’être un people, ronge son frein. Et joue au golf. «J’ai la santé et la liberté, et des arguments à faire valoir au procès», glisse-t-il, déterminé à «garder le moral».

« Un sang-froid particulier »

A 22 ans, ce fils de mineur lorrain voulait «être flic ou pilote de chasse», deux métiers qui le «fascinaient». Mais sa légende, ce camarade de promotion de Bernard Squarcini à l’école des commissaires la bâtit à Lyon, où il arrive dans les années 1980 pour prendre la tête du prestigieux «antigang», aujourd’hui brigade de recherche et d’intervention.

En 21 ans à la BRI lyonnaise, ce «gros bosseur» redouté des voyous se tisse un volumineux carnet d’adresses, d’indics comme de notables. «Mes meilleures années», soupire-t-il. Neyret «avait la confiance et l’estime de ses hommes», explique Bernard Trenque, patron de la PJ lyonnaise de 1995 à 2002, resté «son ami». «Il avait un sang-froid particulier et cette qualité éminente de calmer les gens autour de lui», souligne-t-il.

«Comme tout bon poulet, il avait quelque chose d’un peu voyou, il voulait réussir, faire de belles enquêtes (…) et il se défonçait pour ses indics», renchérit l’un d’eux dans une biographie signée par le journaliste lyonnais Richard Schittly (Taillandier, 2016). Au point de franchir la ligne jaune dans sa façon de les rémunérer.

Son arrestation des évadés par hélicoptère de la prison de Luynes (Bouches-du-Rhône) lui vaudra la Légion d’honneur en octobre 2004. Un mois plus tard, il est «contraint de partir à Nice», selon ses dires, pour y diriger l’antenne de police judiciaire. Éloigné de son épouse, qui tient un hôtel en Isère, il le vit comme un déracinement. C’est là qu’il aurait commencé à «déraper» selon ses détracteurs, ce qu’il dément, tout comme des policiers qui l’ont côtoyé sur la Côte d’Azur.

« On peut raconter n’importe quoi »

En 2007, Neyret retrouve Lyon, sa terre de cœur, comme N°2 de la PJ. «Il revendiquait d’être un homme de terrain, un opérationnel; j’avais une totale confiance», expliquait après son interpellation l’ancien procureur général Jean-Olivier Viout.

Nombre de collègues et magistrats décrivent aussi un «grand professionnel» aux résultats incontestés. «Beaucoup d’entre eux ne m’ont pas tourné le dos», assure Neyret qui concède avoir «commis des imprudences», par «amitié», mais voudrait «casser l’image du pacte de corruption».

En septembre 2014, il était venu défendre ses méthodes – la culture du +flag’+ – mises en cause lors d’un procès de braqueurs devant les assises à Lyon.

Depuis le début de l’affaire, un téléfilm («Borderline» du réalisateur et ancien policier Olivier Marchal) est aussi sorti. «Je ne suis plus maître de mon image, on peut raconter n’importe quoi», enrage celui qui appréciait jadis la médiatisation – en 2011, il avait déjà inspiré Marchal pour son film sur le Gang des Lyonnais. Il ne digère pas la relaxe en diffamation de l’acteur François Cluzet, qui avait suggéré qu’il avait «peut-être piqué le butin» de l’ex-convoyeur de fonds Toni Musulin.

Quand «tout sera fini», conclut Neyret, il fera avec sa fille ce voyage en Thaïlande qu’ils prévoyaient avant son arrestation.

Le Quotidien/AFP

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