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Industrie automobile allemande: un scandale qui pourrait coûter cher


Drapeaux avec le logo de Daimler, soupçonné d'entente avec d'autres constructeurs automobiles allemands, à Stuttgart, le 24 juillet 2017. (Photo : AFP)

Soupçonnée d’avoir colludé pendant des décennies, l’industrie automobile allemande pourrait se trouver face à un nouveau scandale extrêmement coûteux pour ses finances et son image, alors que celui du diesel a déjà fait tomber le secteur de son piédestal.

Si les informations du magazine Der Spiegel se confirmaient, le vaste trucage de onze millions de véhicules diesel par le groupe Volkswagen, révélé en 2015, pourrait presque passer pour peu de choses: les plus gros constructeurs du pays (Volkswagen, Audi, Porsche, BMW et Daimler) auraient tenu depuis les années 1990 des réunions secrètes pour s’accorder sur nombre d’aspects techniques de leurs voitures, lésant ainsi les consommateurs.

C’est Volkswagen qui aurait fait «une sorte d’auto-dénonciation» aux autorités anti-cartel en juillet 2016, de même que Daimler, certainement dans l’espoir d’obtenir un peu de clémence de la part des gendarmes de la concurrence car la facture des amendes pour entente peut être extrêmement douloureuse. Daimler en a fait l’amère expérience l’été dernier, quand la Commission européenne lui a infligé un milliard d’euros d’amende pour s’être mis d’accord sur les prix de vente de ses camions avec trois autres fabricants européens.

En théorie, l’amende de Bruxelles ou de l’Office anti-cartel allemand peut aller jusqu’à 10% du chiffre d’affaires de l’entreprise. Pour les constructeurs automobiles allemands, cela pourrait atteindre presque 50 milliards d’euros, en se basant sur leurs revenus de 2016. Cela sans compter le coût des plaintes de clients qui risqueraient de ne pas se faire attendre. Le responsable de la fédération allemande des associations de consommateurs, Klaus Müller, évoque déjà dans le quotidien Süddeutsche Zeitung la possibilité de dizaines de milliers de plaintes d’automobilistes, qui auraient «possiblement payé un prix trop élevé» pour leur voiture.

Pas encore d’enquête

L’élucidation de cette éventuelle entente risque de prendre du temps. Pour l’heure, aucune enquête n’est officiellement ouverte. Bruxelles et l’Office allemand anti-cartel ont chacun indiqué avoir «reçu des informations» et celles-ci «sont en train d’être examinées par la Commission», a indiqué samedi l’exécutif européen, ne voulant pas «spéculer davantage».

Volkswagen, dont le conseil de surveillance va tenir une réunion exceptionnelle mercredi, n’a pour le moment rien dit. Daimler s’est contenté d’indiquer qu’il appliquait son programme interne de respect du droit de la concurrence. BMW a lui nié dimanche toute entente avec ses concurrents concernant les émissions de ses voitures diesel et affirmé qu’aucun de ses modèles n’avaient été manipulé. Selon le Spiegel, le cartel des constructeurs allemands est en effet en partie lié à la manipulation des émissions polluantes.

Les marques se seraient rencontrées de nombreuses fois pour déterminer la taille des réservoirs d’Adblue, un additif qui permet de réduire les émissions polluantes d’oxyde d’azote, d’après l’hebdomadaire. De gros réservoirs se révélant plus chers, les groupes auraient opté de concert pour de petits réservoirs, ne contenant pas assez de liquide pour réduire de manière suffisante les gaz polluants émis.

« Gigantesque escroquerie »

«Si cela s’avère vrai, cela coûtera des dizaines de milliards d’euros à l’ensemble des constructeurs concernés, et au moins quelques milliards d’euros à chacun d’entre eux», a indiqué Frank Schwope, expert de la banque allemande Nord/LB. Une crainte partagée par les investisseurs de la Bourse de Francfort, où les actions des constructeurs étaient délaissées depuis les révélations du Spiegel vendredi. Vers 09h55, l’action Volkswagen perdait 2,90% à 133,75 euros, celle de Daimler 3,58% à 60,34 euros et celle de BMW 2,59% à 79,09 euros.

Au-delà du coût potentiel, «la tenue de transactions secrètes, avec le scandale du diesel en arrière-plan, est aussi une catastrophe absolue pour la crédibilité de l’industrie automobile allemande», met en garde Stefan Bratzel, directeur du Center of Automotive Management (CAM). A l’approche des élections législatives en Allemagne en septembre, il fait peu de doute que le gouvernement va vouloir hausser le ton.

Proche d’Angela Merkel, le député conservateur Volker Kauder a lundi matin appelé «à faire table rase» dans cette histoire. «On doit dire les choses clairement: le droit et la justice valent aussi pour l’industrie automobile», a-t-il insisté. Si l’histoire se révélait exacte, «ce serait une gigantesque escroquerie sur le dos des clients et des fournisseurs, souvent des entreprises de taille moyenne», a prévenu le rival social-démocrate de la chancelière, Martin Schulz.

Le Quotidien/AFP

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