Trafic d’héroïne au Luxembourg : neuf prévenus au tribunal

Lors de leur arrestation il y a tout juste un an, 900 grammes d’héroïne et 12 000 euros avaient été saisis à Esch-sur-Alzette, Luxembourg et Oberkorn.

Depuis lundi après-midi, neuf prévenus poursuivis pour être impliqués dans la vente d’une importante quantité d’héroïne dans la capitale en 2015 comparaissent devant la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement. Les sept hommes et deux femmes âgés de 32 à 46 ans et originaires de Guinée-Bissau avaient été arrêtés début décembre 2015.

Huit des prévenus sont actuellement détenus à Schrassig. Le neuvième est placé sous contrôle judiciaire. Leur procès doit s’étirer sur six audiences jusqu’en début de semaine prochaine. Lundi après-midi, la parole était en premier lieu à l’enquêteur du service de recherche et d’enquête criminelles section stupéfiants de Luxembourg.

Dans l’exposé de son rapport, il a détaillé pendant près d’une heure et demie les observations et écoutes téléphoniques effectuées ayant mené à l’arrestation des neuf prévenus. « Début 2015, le trafic d’héroïne dans la rue s’est transformé. Des dealers de Guinée-Bissau vendaient des drogues de bonne qualité à des prix de dumping. Avec cette stratégie, ils ont gagné le marché dans le quartier de la Gare », a-t-il entamé.

La section stupéfiants lance des observations. Au fil des mois, un certain nombre de personnes de Guinée-Bissau ont pu être arrêtées. « Ce qui était frappant, c’est que c’étaient toujours de grandes quantités qui étaient saisies. Avec le temps, la qualité des drogues baissait, mais les prix restaient les mêmes », note l’enquêteur.

Les observations se poursuivent et permettent notamment de repérer un certain va-et-vient autour d’un café situé rue Joseph-Junck dans le quartier de la Gare. Trois personnes sont identifiées comme jouant un rôle clé. Début octobre, ces trois personnes sont mises sur écoute. Très vite, les enquêteurs se rendent compte qu’ils disposent d’autres contacts. La liste s’allonge. Deux hommes semblent chapeauter le tout. Ils sont en contact avec des marchands à Lisbonne et aux Pays-Bas. Mi-octobre, les écoutes révèlent la livraison d’une marchandise d’une valeur de 20 000 euros.

Ce qui ressort par la suite des écoutes, ce sont les réclamations sur la qualité de la marchandise. Ainsi, au cours d’une conversation téléphonique, l’un des prévenus se plaint auprès de son interlocuteur : « Cette fois-ci, tu n’étais pas correct. Il y avait une différence. Les gens se sont plaints. » L’enquêteur note : « Ce n’est pas la première fois qu’il est livré, sinon il ne pourrait pas se plaindre sur la qualité .»

70 euros, en moyenne, par boule

Pour ce prévenu suspecté d’être à la tête du réseau, 14 clients ont pu être identifiés. Ce qui fait 153 rendez-vous au total. « Si on compte une boule par rendez-vous, avec une moyenne de 70 euros par boule, alors il aurait vendu pour 10 710 euros de drogues », récapitule l’enquêteur. L’enquête établit que ce n’est pas le seul des prévenus à avoir eu un certain nombre de clients.

Les écoutes téléphoniques révèlent encore en novembre d’autres réclamations. « Je crois que je vais chercher ailleurs », finit par lâcher l’une des prévenues en précisant que des clients se sont plaints de la qualité de la drogue. Dans les écoutes, la drogue n’est pas explicitement nommée. Il est régulièrement question du «truc».

« Sur base de tous ces éléments, on a eu le mandat d’arrêt pour neuf personnes. Le 1 er décembre 2015, on a débuté avec les arrestations. » Le premier jour, trois personnes sont arrêtées. Les arrestations et les perquisitions organisées sur trois jours dans quatre appartements à Luxembourg, Oberkorn et Esch-sur-Alzette permettent aux forces de l’ordre de saisir notamment 12 000 euros et 900 grammes d’héroïne. Lors du passage au scanner de l’un des prévenus arrêté à Esch-sur-Alzette, sept corps étrangers sont détectés. Ce qui, au final, se révèle être 29,49 grammes d’héroïne. La perquisition chez lui met au jour 4 640 euros en liquide et 258 grammes d’héroïne.

«La championne de la drogue»

Au cours de l’enquête, 40 toxicomanes ont également été entendus. Si l’on suit leurs dépositions, les prévenus auraient vendu au total autour de 5 kg d’héroïne. L’un des témoins avait même qualifié l’une des prévenues comme « championne de la drogue », car cela faisait quatre ans qu’elle vendait de la drogue.

Sur les neuf prévenus, six ont reconnu lundi après-midi avoir vendu des produits stupéfiants. Les trois autres contestent. Le procès se poursuit ce mardi après-midi.

Fabienne Armborst