Sainte PJ Harvey et les hommes à la Rockhal

Accompagnée de neuf musiciens, PJ Harvey a décliné son dernier album, The Hope Six Demolition Project, sur la scène de la Rockhal, mardi soir. Un concert millimétré, peut-être un peu trop.

De PJ Harvey, on gardait le souvenir de ses shows rock, brutaux, où le sacro-saint trio guitare-basse-batterie suffisait à soutenir l’intensité de sa voix, comme au Zénith de Paris, en 2004. Rien de tout ça, mardi soir, à la Rockhal, où l’Anglaise s’est présentée avec un big band de premier choix, dans lequel on retrouvait son producteur et musicien préféré, John Parish, mais aussi l’ancien Bad Seed Mick Harvey.

Un casting cinq étoiles pour un show qui débutait sur les notes de The Ministry of Defence, comme une évidence. En Pythie vêtue de noir et coiffée d’une couronne de lauriers, PJ s’animait autour des cuivres et tambours de sa troupe d’hommes. Chaque morceau, tel un oracle, résonnait alors comme une scansion.

Un public facilement conquis

Un orchestre au service de la princesse pour mieux revisiter The Community of Hope mais aussi Let England Shake de l’album éponyme. De la maîtrise, de l’entrain et une partition aux petits oignons enflammaient une Rockhal facilement conquise, heureuse de retrouver les notes à peine remaniées de ses deux derniers disques.

Mais lorsque retentissaient Down By The Water et To Bring You My Love, on repensait à ce que PJ était à ses débuts, déesse gothique d’un rock asséché. On regrettait alors que toute la précision du concert n’ait pas laissé de place à ces instants si précieux où elle s’abandonne à son art, tressaille et parfois trébuche sur des notes inaccessibles.

Cette Polly Jean si forte et si fragile qui a offert au monde les éblouissants Dry et To Bring You My Love, à une époque où elle se mettait littéralement à nu, a cédé la place à une PJ Harvey apaisée, sûre de son art. C’est splendide, par moment trop prévisible. Les cicatrices d’hier semblent refermées.

Christophe Chohin