Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Selon le journaliste italien, l’évasion fiscale contribue à la montée de l’extrême droite en Europe. Dans un entretien à Mediapart, il dénonce le Luxembourg qu’il qualifie de coffre-fort de la France.
Roberto Saviano est devenu l’ennemi public numéro un du vice-Premier ministre italien d’extrême droite Matteo Salvini. Sur les réseaux sociaux, il déconstruit presque quotidiennement les informations et le discours mensongers diffusés par le leader de la Ligue du Nord qu’il qualifie par ailleurs «d’homme de la mafia» en raison de ses liens supposés avec des clans calabrais. En retour, Salvini a porté plainte pour diffamation contre Roberto Saviano et menace de lui retirer la protection policière dont il bénéficie.
Le journaliste de 39 ans vit depuis 2006 sous haute protection des autorités alors que sa tête a été mise à prix par des parrains de la Camorra, la mafia napolitaine et de Campanie, après la publication de Gomorra, un récit dans lequel il dépeint leurs activités criminelles.
« Chaque pays a son coffre-fort»
Dans un entretien publié le 10 septembre par le site français d’information en ligne Mediapart, Roberto Saviano dénonce les politiques migratoires répressives mises en place dans presque tous les pays de l’Union européenne. Il fustige particulièrement l’action de la France et le discours d’Emmanuel Macron qui, selon lui, alimente la montée des partis d’extrême droite car, tout comme Matteo Salvini, il criminalise la solidarité avec les migrants.
Mais pour Roberto Saviano, la question de l’immigration n’est qu’un prétexte électoral et les migrants des «boucs émissaires». Analysant les causes de la montée des partis souverainistes et d’extrême droite en Europe, il estime que le «le cœur du désastre politique européen est dans le système offshore». « Chaque pays a son coffre-fort», poursuit-il : «La France a le Luxembourg, l’Espagne a l’Andorre, l’Allemagne le Liechtenstein, tout le monde a la Suisse et jusque récemment la capitale du recyclage mondial est Londres.»
«Seuls les idiots paient leurs impôts»
«Qu’est-ce que cela signifie ?» s’interroge le journaliste qui en conclut «que ce ne sont que les « idiots » qui paient leurs impôts. Car toutes les multinationales passent par des paradis fiscaux.» Il estime que «l’Union européenne laisse perdurer, voire favorise cette évasion fiscale. Bien sûr d’autres politiques sont possibles. On aurait pu faire des accords avec les entreprises, conditionner les remises fiscales à l’investissement. Mais non, c’est une tout autre voie qui a été choisie.»
Pour Roberto Saviano, «ce système participe forcément à la montée des extrêmes qui peuvent facilement s’emparer de la colère et de la frustration des populations.»
Fabien Grasser