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Pôle thermal d’Amnéville : les salaires exorbitants de l’ancien directeur


Les montants des salaires et des primes perçus par le directeur général (DG) du pôle thermal mettent l’eau à la bouche. (photo RL / Maury Golini)

Le procès de l’ancien directeur révèle des pratiques étonnantes dans le plus pur style western mosellan.

Où fallait-il postuler en Moselle pour gagner très correctement sa vie dans la première décennie des années 2000 ? Dans le Far West du département, à Amnéville. Les montants des salaires et des primes perçus par le directeur général (DG) du pôle thermal mettent l’eau à la bouche.

Mais ont-ils été honnêtement attribués ? C’est justement ce qui a fait débat hier devant le tribunal correctionnel de Metz où Olivier Schmitt, 42 ans, désormais ex-DG du pôle depuis son licenciement en 2008, était poursuivi pour abus de confiance et escroquerie entre janvier 2005 et décembre 2007.

Tout est parti d’une plainte déposée en décembre 2008 par le maire de l’époque, l’emblématique Dr Jean Kiffer. Décédé en 2011 avant que l’instruction ne s’active vraiment en 2013, l’élu se serait mis en boule et senti trahi par son poulain en découvrant ses primes et salaires dans le rapport de gestion du pôle.

Selon le conseil du pôle partie civile, Me Delphine Buchser, le maire n’aurait signé qu’une première augmentation de salaires pour éviter les « excès » connus avec les prédécesseurs du prévenu. « Je n’ai jamais vu de salarié bénéficier d’autant d’avenants, […] un tous les quatre ou cinq mois », compte l’avocate. Parti de 5 000 € en 2004 (il n’était pas encore DG et ce n’est pas poursuivi), Olivier Schmitt a culminé à 11 000 € en 2007 (donc durant la période de la prévention).

400 000 € de primes

Les primes sont elles aussi généreuses mais, comme la paie, paraissent injustifiées au regard du chiffre d’affaires et du déficit que le pôle creusait déjà. Aux yeux de la partie civile, Jean Kiffer aurait signé, en confiance, des avenants présentés par le prévenu et certifiés relus « par les avocats », sans que cela soit le cas. Une trahison en réparation de laquelle Me Buchser réclame la restitution de 82 000 € de salaires et 400 000 € de primes. Elle ajoute 20 000 € de préjudice moral pour son client et 16 500 € de dépenses personnelles d’Olivier Schmitt dans des palaces, lors de séjours en famille supportés par le pôle.

Elles « servaient à voir ce qui se faisait de mieux pour l’appliquer à Amnéville. Nous étions, à ce moment, dans une recherche de soins très haut de gamme », explique l’intéressé. Un projet de spa. « Je suis parti avant qu’il ne se réalise », ajoute le prévenu dont la défense est une mine d’informations inédites.

François Grosdidier en témoin

Trois témoins de moralité, cités par Me Guy Reiss, attestent que Jean Kiffer ne signait jamais rien les yeux fermés. « Il avait une mémoire sélective […], il ignorait ce qu’il avait envie d’ignorer […]. C’était un très bon acteur », peint le défenseur. Sa trahison aurait été feinte. « Elle n’est là que pour instrumentaliser un volet prud’homal », plaide Me Reiss qui, après l’éviction de son client, réclamait plus de 300 000 € d’indemnités au pôle.

Mieux, l’un des trois témoins, François Grosdidier, maire de Woippy, raconte que Jean Kiffer « se rendait compte que ça coûtait cher » et lui avait demandé d’intervenir après la rupture du contrat (à la suite de la mauvaise « gestion d’un problème syndical ») et de transiger avec l’actuel prévenu. C’est pas fini. On pouvait se permettre des salaires et des primes élevés parce que le pôle n’était pas en difficulté.

Mais « les chiffres étaient bidonnés », selon Me Reiss. Par exemple le pôle réglait à la mairie d’Amnéville un loyer mensuel de 400 000 €. Et, pour éviter l’impôt sur les sociétés, ses bénéfices étaient écrêtés et dépensés ailleurs, dans le fonctionnement de la commune. « On est dans un contexte amnévillois », précise Me Reiss, « c’est fondamental » et il est indispensable de le comprendre, raconte l’avocat qui demande la relaxe en démontrant, jurisprudence à l’appui, que Jean Kiffer n’a pas été abusé et que le pôle n’a pas été escroqué.

Finalement, le parquet n’a pas pris position. Délibéré le 20 octobre.

Frédéric Clausse (Le Républicain lorrain)

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