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Enseignante braquée par un élève : l’Éducation nationale vivement critiquée


L'élève du lycée Édouard-Branly a été mis en examen pour "violences aggravées" et remis en liberté avec des mesures de contraintes provisoires. (photo AFP)

La violence à l’école est souvent sous-estimée par l’Éducation nationale et les réponses apportées jusqu’ici n’ont pas été les bonnes, dénoncent des enseignants après l’affaire du lycéen ayant braqué sa professeure, certains s’exprimant sous le hashtag ironique #PasDeVague.

Ce week-end, la vidéo d’un élève menaçant sa professeure avec une arme factice dans un lycée de Créteil a suscité l’indignation jusqu’au sommet de l’État et conduit le gouvernement à promettre un « plan d’actions ». Cet élève du lycée Édouard-Branly a été mis en examen pour « violences aggravées » et remis en liberté avec des mesures de contraintes provisoires. Sur la vidéo relayée sur les réseaux sociaux, la professeure de biotechnologie de 60 ans apparaît plus lasse que paniquée. Mais elle était en réalité « surprise et très choquée », a expliqué lundi son avocate. Elle ne savait pas que l’arme était factice et a essayé de « réagir le plus intelligemment possible », a ajouté Me Hajer Nemri.

Agressions régulières

Depuis dimanche, des centaines de professeurs ont réagi sur Twitter en partageant leur expérience sous le hashtag #PasDeVague, certains ironisant sur la mesure proposée par le ministre de l’Éducation dans la foulée de l’incident. Jean-Michel Blanquer « encourage » l’interdiction du téléphone portable dans les lycées, a-t-il dit au Parisien lundi. Un « comité stratégique » doit se réunir cette semaine pour plancher sur une série de mesures.

Sur Twitter, une professeure de lettres raconte qu’une élève l’a frappée dans un couloir mais que « le conseil de discipline ne l’a pas même exclue ». Une autre, qu’un élève ayant agressé sexuellement un de ses camarades a réintégré la classe de sa victime après avoir été pourtant renvoyé définitivement par le conseil de discipline.

Parmi les témoignages, Jenny Lartaud, 28 ans, prof de Français dans un collège en Alsace, rapporte : « On vit des agressions verbales régulières, mais on est obligé de continuer d’enseigner ». Elle raconte avoir été « testée » il y a deux ans par sa classe de quatrième, pendant six mois. « J’ai proposé à mes élèves, pendant une heure de cours, de me dire ce qui ne se passait pas bien, selon eux », explique-t-elle. « Je n’aurais pas dû : ils se sont lâchés et j’ai entendu les pires ignominies ». Elle écrit alors un rapport à sa hiérarchie : « le principal adjoint m’a convoquée, je n’étais pas seule; mais malgré des courriers faits aux parents, malgré quelques exclusions, les élèves ont continué ». Selon elle, de nombreux profs préfèrent « faire comment si tout allait bien, pour ne pas qu’on dise d’eux qu’ils sont de mauvais enseignants ».

« Ça passe ou ça casse »

« Il existe une forme d’omerta », juge aussi la principale adjointe d’un collège de Seine-Saint-Denis. « Un chef d’établissement n’a rien à gagner à signaler les problèmes de son collège ou de son lycée ». Pour Rodrigo Arenas, président de la FCPE (fédération de parents d’élèves) du département, « les profs sont seuls face à des situations qui les dépassent. S’ils en font état, c’est comme un aveu d’échec ». Or ce n’est pas « leur métier de se retrouver face à des élèves qui vont mal », estime-t-il. Un isolement amplifié, selon lui, par la « baisse constante des postes de surveillants, conseillers principaux d’éducation, psychologues, ou encore médecins scolaires ».

Quand réponses il y a, ce ne sont souvent pas les bonnes, estiment d’autres enseignants : « On a eu systématiquement droit à des mesures sécuritaires », raconte par exemple une prof du lycée Suger de Saint-Denis (93), théâtre régulier de violences. « On nous a installé des caméras de vidéo-surveillance, pour 55 000 euros, qui ont été tout de suite endommagées ». Mais selon cette prof, ce dont le lycée a besoin c’est de « moyens humains ». « La formation des enseignants a énormément régressé au cours des dernières années », juge aussi Agnès Renaud, professeure de lettres au lycée Paul-Éluard à Saint-Denis. Or les jeunes profs sont « jetés dans le bain » des collèges difficiles. Ensuite, « ça passe ou ça casse ».

LQ/AFP

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