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Fiscalité : comment le Luxembourg prépare l’après-BEPS


Pierre Gramegna, lors de la présentation du projet concernant le budget et les recettes de l'État, le 14 octobre. (photo archives LQ)

Le 28 janvier dernier, l’Union européenne adoptait les préconisations du plan BEPS de l’OCDE pour mettre fin à l’optimisation fiscale des multinationales. Le Luxembourg se prépare à sa mise en place.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a à peine fait valider son texte par les pays de l’Union européenne que ceux-ci travaillent à le contrer. Le Luxembourg, spécialiste de l’optimisation fiscale, le reconnaît par l’intermédiaire de son ministre des Finances, Pierre Gramegna.

C’est une petite phrase, à la fin d’une question parlementaire en apparence anodine, qui en dit long sur les intentions du Luxembourg et des pays spécialisés dans l’optimisation fiscale.

Dans cette question du 8  janvier 2016, le député chrétien-social Laurent Mosar s’inquiète de la fin du régime fiscal des «patent boxes», avec effet au 1er  juillet 2016. Les «patent boxes» sont un régime de taxation de la propriété intellectuelle appliqué dans certains pays afin d’y obtenir des taux d’imposition favorables. Le régime des «patent boxes» participe à l’optimisation fiscale des multinationales que l’OCDE a décidé de combattre, notamment après les révélations de l’affaire LuxLeaks.

Dorénavant, les brevets déposés dans un pays et qui servent de base d’imposition devront avoir été développés, tout ou partie, dans ce pays, sous peine de voir prendre fin le régime fiscal avantageux qui leur est appliqué. Laurent Mosar s’inquiète de cette mesure et de ses conséquences potentielles. S’adressant au ministre des Finances, Pierre Gramegna, il lui demande s’il n’aurait pas dû présenter «des plans alternatifs pour soutenir la création de la propriété intellectuelle au Luxembourg et pour rassurer les entreprises? De tels plans existent-ils? Quand Monsieur le ministre déposera-t-il un projet de loi afférent?»

«Compétitivité du système»

Le député CSV cristallise dans cette question les inquiétudes des milieux polico-financiers, qui voient dans le plan de l’OCDE une menace sur les rentrées fiscales. À tel point que Laurent Mosar demande s’il existe une estimation du déchet fiscal et de l’impact découlant de cette abrogation des «patent boxes». Sur ce point, Pierre Gramegna reste muet. Mais sur les plans alternatifs pour contrer le BEPS, il est (un peu) plus disert.

Dans sa réponse, on peut lire que «la mise en œuvre progressive des mesures BEPS aura inévitablement pour conséquence un certain élargissement de la base imposable des entreprises.» Cela signifie que les multinationales promptes à domicilier leurs bénéfices dans des pays spécialistes de l’optimisation fiscale pourraient choisir de leur tourner le dos. Pour éviter cette fuite des recettes fiscales, qui pourrait avoir un effet désastreux sur les finances du Grand-Duché, Pierre Gramegna reconnaît que «l’un des objectifs essentiels de la réforme fiscale sera de diminuer le taux d’impôt nominal, dans l’objectif d’assurer la compétitivité du système».

Un système qui devrait perdurer jusqu’en 2021, même si les nouveaux entrants, à compter du 1er  juillet prochain, devront accepter le changement des règles tel que prévu dans le projet de loi de finance présenté le 14  octobre 2015.

Actuellement, le taux d’imposition effectif dans le cadre du système de «patent box» au Luxembourg est de 5,72  %. Les multinationales habituées à être imposées au Grand-Duché attendent l’annonce du nouveau taux pour sortir leurs calculatrices.

Christophe Chohin

Des États sous surveillance

Le Base Erosion and Profit Shifting (BEPS) de l’OCDE est le plan de lutte contre l’optimisation fiscale. En 15  actions, il vise à mettre fin à cette pratique entre les pays signataires. Dans son action numéro  5, il détaille notamment que «pour accroître la transparence, un cadre d’échange spontané de renseignements couvrira les décisions de l’administration qui seraient susceptibles, en l’absence d’un tel échange, de soulever des préoccupations en matière de BEPS.»

En clair, le système entrera en alerte si un État ne répond pas à certains critères. Impossible dès lors d’accorder un taux d’imposition favorable à une multinationale sauf à prouver qu’elle réalise dans le pays une activité «substantielle» qui justifie une fiscalité avantageuse.

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